L’Egypte sur la voie de la Révolution, un an après : quid du respect des droits de l’Homme et des réformes démocratiques ?

09/02/2012
Communiqué
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A l’occasion du premier anniversaire de la démission de Hosni Moubarak le 11 Février 2011, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) publie une note de position faisant état de la faillite du Conseil suprême des forces armées (CSFA), qui gouverne de fait l’Égypte depuis un an, quant à son devoir de respect des droits et libertés fondamentaux des Égyptiens les douze premiers mois de la période transitoire.

Les manifestants qui ont afflué à de multiples reprises vers la place Tahrir du Caire ainsi que vers d’autres lieux de rassemblements ailleurs dans le pays pour protester contre la politique du CFSA, ont été quasi-systématiquement confrontés à la violence, aux arrestations, à des actes de torture et de mauvais traitements de la part des forces de sécurité.

"Depuis la chute de l’ancien président Moubarak et la prise du pouvoir par l’armée, nous avons documenté et signalé des développements dangereux qui questionnent sérieusement la capacité du Conseil suprême des Forces armées à négocier une transition pacifique. A un moment clé où la protection des droits fondamentaux, tels que la liberté de réunion pacifique, la liberté d’expression, la liberté de religion et la liberté d’association ne doit pas être compromise, nous sommes inquiets de constater que les lignes rouges ont été régulièrement franchies au cours de l’année écoulée, ce qui constitue évidemment un recul par rapport aux exigences initiales des mouvements de la révolution égyptienne", explique Souhayr Belhassen, présidente de la FIDH.

"Par conséquent, nous demandons au Parlement nouvellement élu de s’engager dans les réformes législatives nécessaires qui permettront une meilleure protection des droits et des libertés fondamentales du peuple égyptien", poursuit Mme Belhassen.

Le 9 mars 2011, 17 femmes figuraient parmi les personnes arrêtées par les militaires quand ils ont violemment dispersé un sit-in place Tahrir. Les manifestants arrêtés ont été emmenés au musée égyptien où ils ont été sévèrement battus, soumis à des décharges électriques et insultés. Les détenus ont ensuite été transférés au centre de détention militaire Hykestep, où 7 femmes ont été menacées de poursuites, dépouillées de leurs vêtements, et forcées de se soumettre à des « tests de virginité » administrés par des médecins militaires de sexe masculin.

Le 9 octobre, des manifestants coptes ont organisé une marche vers Maspero, le bâtiment de la télévision d’État au Caire, afin de dénoncer l’incendie d’une église à Assouan. Les manifestants ont été confrontés à la violence brutale des forces militaires qui ont tiré à balles réelles pour disperser la foule, avant de diriger des véhicules de transport de troupes blindés sur les manifestants entraînant la mort de 24 personnes et blessant des centaines d’autres. Suite à ces violences sans précédent de la part de l’armée, le CFSA a promis d’ouvrir des enquêtes, mais quatre mois après ces incidents, aucun résultat n’a encore été rendu public [1].

Le 19 novembre, de nouveaux affrontements entre manifestants et forces de sécurité se sont produits après la dispersion violente d’un sit-in sur la place Tahrir. Les forces de sécurité ont alors utilisé une quantité excessive de gaz lacrymogène, ont utilisé des balles en caoutchouc, des balles à plomb puis ont tiré à balles réelles sur les protestataires. Ces affrontements qui ont duré quatre jours ont entraîné la mort de 45 manifestants et fait des milliers de blessés [2].

A nouveau, le 17 décembre, les forces militaires ont violemment dispersé un rassemblement de manifestants devant le siège du Cabinet des ministres au Caire, ont arrêté et placé en détention plusieurs manifestants qui ont ensuite témoigné sur les mauvais traitements qu’ils ont subis pendant leur détention. Au cours de ces événements récents, on a assisté à une violence sans précédent contre les femmes qui manifestaient. Ainsi, par exemple, Ghada Kamal, une des manifestantes détenues à la suite de cette violente répression, a déclaré avoir été rouée de coups par des agents de l’armée et avoir reçu des menaces de mort. Les forces militaires ont frappé les manifestants avec des matraques, ont administré des chocs électriques, ont tiré à balles réelles, et ont à certains moments lancé des bombes incendiaires. Cet usage excessif de la force a entraîné la mort de 17 manifestants et fait des centaines de blessés [3].

Le 2 février 2012, des manifestations se sont dirigées vers les rues à proximité du ministère de l’Intérieur au centre du Caire pour dénoncer un « massacre organisé [4] », le veille au soir, lors d’un match de football dans la ville de Port-Saïd. Les manifestants souhaitaient protester contre l’inertie et la négligence des forces de sécurité qui ne sont pas intervenues pour protéger les fans de l’équipe d’Al-Ahly attaqués par les supporters de l’équipe adverse, entraînant ainsi la mort de 78 civils selon les chiffres officiels (179 morts selon les familles des victimes) . Lors de la manifestation du 2 février, les forces de sécurité ont une nouvelle fois utilisé des quantités excessives de gaz lacrymogène, ont utilisé des balles à plomb et tiré à balles réelles contre les civils. Quinze manifestants au moins ont trouvé la mort et des centaines d’autres ont été blessés [5].


Des défis majeurs pour le nouveau parlement élu

Les premières élections législatives libres depuis plusieurs décennies se sont déroulées à partir de novembre 2011, avec un taux de participation sans précédent dans les bureaux de vote. Les partis islamistes ont remporté près de 70% des sièges de l’Assemblée du peuple. En dépit de la participation massive de l’électorat féminin, seulement 11 femmes siègent aujourd’hui à l’Assemblée (9 élues et 2 nommées), représentant seulement 2% de la chambre basse du Parlement. Ce nouveau parlement, conformément au décret constitutionnel émis en mars 2011, aura la charge de nommer un comité composé de 100 membres qui devra rédiger une nouvelle constitution ; le projet de constitution sera ensuite soumis à un référendum populaire. Le CSFA a dans le même temps annoncé que les candidatures pour les élections présidentielles seraient ouvertes à partir du 10 mars 2012.

Ce nouveau parlement, premier organe législatif libre élu de l’Histoire de l’Egypte contemporaine, doit se montrer à la hauteur des attentes en matière de réformes législatives réclamées par le peuple égyptien. A cet égard, la FIDH a formulé une série de recommandations qui devraient être considérées par le parlement dans le cadre des réformes législatives à venir.

Sur la liberté d’association

Tout d’abord, le parlement devrait adopter une nouvelle loi sur les associations qui garantisse la liberté de former des organisations non gouvernementales, conformément aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples et de la Charte arabe des droits de l’Homme. Le nouveau parlement doit se démarquer de la politique du régime de Hosni Moubarak que le CSFA continue de mettre en oeuvre. En juin 2011, la ministre de la Coopération internationale, Fayza Abou El Naga, a annoncé l’ouverture d’une enquête en collaboration avec le ministère de la Justice, sur les organisations non gouvernementales qui travaillent sans autorisation dans le pays et accusées de recevoir des financements étrangers. Le 29 décembre, les forces de sécurité lourdement armées ont fait irruption dans les bâtiments abritant les bureaux de plusieurs ONG au Caire, confisquant documents et ordinateurs portables et dans certains cas, procédant à l’arrestation de leurs employés. Cet assaut contre les ONG faisait suite à une campagne médiatique de diffamation orchestrée par les autorités qui s’est intensifiée au cours des derniers mois de l’année 2011, accusant certaines ONG, notamment étrangères, de recevoir des fonds étrangers et de s’immiscer dans les affaires de l’Egypte [6].

Il est important de noter que la loi n°84 sur les associations datant de 2004 a régulièrement permis au gouvernement de s’ingérer dans, et parfois de restreindre les activités des ONG indépendantes opérant en Egypte. La loi exige que les ONG s’enregistrent auprès du gouvernement et qu’elles soumettent au gouvernement un rapport sur leurs activités ; le ministère des assurances et des affaires sociales peut en outre décider unilatéralement de dissoudre une organisation. Par ailleurs, le ministère peut rejeter certaines demandes d’enregistrement d’associations sans motiver sa décision. La FIDH est profondément préoccupée par les récents développements en matière de liberté d’association début février 2012 alors que 43 employés d’ONG, y compris 19 Américains et 24 Égyptiens, ont été déférés devant la justice pénale sur des accusations de financement illégal. En conséquence, la FIDH recommande que le Parlement modifie l’actuelle loi sur les associations afin de garantir la liberté d’association conformément aux obligations internationales souscrites par l’Egypte, y compris en substituant au régime d’autorisation d’enregistrement un régime de déclaration, en précisant les limitations admissibles et en soumettant celles-ci au contrôle du juge. Un tel contrôle doit notamment s’exercer concernant les décisions de refus d’enregistrement et les décisions de dissolution d’association. La FIDH recommande également que la loi permette aux ONG opérant en Egypte de recevoir des financements étrangers, tant que les financements sont transparents et les activités de l’ONG licites. Les employés et membres d’ONG en attente d’enregistrement en vertu de la loi en vigueur doivent être protégés contre les poursuites pénales abusives, c’est à dire visant en réalité à sanctionner une activité conforme aux normes internationales souscrites par l’Egypte.

Sur le droit à un procès équitable et l’interdiction de juger des civils devant des tribunaux militaires et des tribunaux d’exception

Le Parlement devrait modifier le Code de justice militaire qui permet le renvoi de civils devant les tribunaux militaires, afin de limiter la compétence de ces tribunaux aux seuls militaires accusés d’infractions de nature militaire. Depuis le 28 janvier 2011 et la prise de pouvoir par l’Armée, plus de 12 000 civils ont été jugés par des tribunaux militaires au mépris du droit à un procès équitable. En effet, les civils jugés devant ces tribunaux se sont vus signifier leurs peines à l’issue de procès hâtifs, en l’absence de leurs avocats, et sans le droit de faire appel des décisions rendues. Les procès militaires ont souvent été utilisés à l’encontre des opposants au régime et des militants des droits humains dans le but de les faire taire. Ainsi, en avril 2011, Maikel Nabil, un blogueur qui avait publié un article en mars 2011 intitulé « Le peuple et l’armée n’ont jamais été main dans la main" détaillant les violations des droits humains commises par les militaire depuis le 28 Janvier, a été condamné à une peine de prison de 5 ans, ramenée ensuite à deux ans [7], avant d’être finalement libéré suite aux nombreuses dénonciations de sa situation par les ONG nationales et internationales.

Suite aux incidents meurtriés de « Maspero », le blogueur Alaa Abdel Fattah a été arrêté et déféré devant le procureur militaire, accusé d’avoir volé des armes d’assaut et attaqué des officiers militaires. Abdel Fattah a été libéré suite à une énorme campagne de solidarité organisée par les organisations de défense des droits de l’Homme mais les charges qui pèsent contre lui n’ont toujours pas été abandonnées [8]. A l’heure actuelle, plusieurs manifestants, opposants politiques et militants font l’objet d’enquêtes judiciaires suite à l’incendie de l’Institut scientifique du Caire lors des manifestations de décembre 2011. Les autorités égyptiennes continuent de recourir au harcèlement judiciaire pour faire taire ceux qui s’opposent à leurs politiques [9]. La FIDH exhorte le CSFA à cesser immédiatement tout renvoi de civils devant des juridictions militaires, sans aucune exception. Le Parlement doit également abroger la loi d’urgence partielle qui permet encore de juger les « voyoux » devant les tribunaux militaires selon le décret du CFSA en date du 24 Janvier 2012 (voir ci-dessous).

Le Code de justice militaire ne permet pas seulement au président de déférer des civils devant des tribunaux militaires en vertu de la loi d’urgence, mais il donne également compétence aux tribunaux militaires pour connaître des crimes commis dans un lieu sous contrôle militaire, ou si l’une des parties concernées est un personnel militaire. Après que l’armée a pris le pouvoir le 28 Janvier 2011, cette loi a été largement utilisée par le procureur militaire pour poursuivre des civils devant les tribunaux militaires, l’article 48 du Code de justice militaire permettant au procureur de définir librement son champ de compétence [10]. En conséquence, le parlement devrait réformer ce code afin de limiter la juridiction militaire aux seuls militaires accusés de crimes ayant une nature militaire, comme l’a rappelé la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples, dans plusieurs décisions concernant notamment le Nigeria et le Soudan [11]. En outre, la future constitution devrait stipuler qu’aucun civil ne peut être jugé devant des juridictions exceptionnelles.

Par ailleurs, tous les civils qui ont été condamnés par les tribunaux militaires depuis le 28 janvier 2011 devraient être libérés ou transférés vers un tribunal civil pour être rejugés si des charges valides pèsent contre eux. Le ministre de la Justice devrait demander au Président de la Cour d’appel de nommer des juges d’instruction aux fins d’examiner toutes les peines prononcées contre des civils par les tribunaux militaires [12]. Enfin, les juges devraient ouvrir des enquêtes sur les violations des droits de l’Homme qui auraient été commises (telles que des actes de torture ou encore les tests de virginité) par des militaires à l’encontre des civils au cours de leur détention.

Sur la nécessité de mettre fin à l’état d’urgence

Le Parlement doit lever immédiatement et complètement l’état d’urgence. Le Maréchal Tantawi, chef du CSFA, a annoncé le 24 Janvier 2012 que l’état d’urgence avait été levé partiellement mais que la loi d’urgence, en vigueur depuis 1981, serait toujours applicable aux actes de « banditisme ». Encore une fois, le maintien de l’application des mesures exceptionnelles à certaines situations qui ne sont pas précisément définies est de nature à permettre de larges violations des droits de l’Homme : en effet, et on l’a constaté à plusieurs reprises au cours des derniers mois, la qualification de « bandit » ou « voyou » a été abusivement appliquée aux organisateurs de manifestations anti-gouvernementales. En conséquence, le parlement doit modifier la loi d’urgence N°162 de 1958 pour la mettre en conformité avec l’article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui dispose que la loi d’urgence ne doit s’appliquer que lorsque la vie de la nation est menacée. Le PIDCP dispose également que, même sous état ​​d’urgence, les lois limitant les droits et libertés fondamentaux des citoyens doivent être limitées à certaines situations précises.

Sur le droit au rassemblement pacifique

Au cours de l’année qui vient de s’écouler, les manifestants pacifiques ont été confrontés à la violence brutale et disproportionnée des forces de sécurité et de l’armée. La FIDH exhorte le Parlement à modifier la loi n °156 de 1964 qui accorde au ministre de l’Intérieur le droit d’ordonner l’utilisation de balles réelles pour la dispersion de protestations et de sit-in. La FIDH rappelle que le droit fondamental de se rassembler pacifiquement ne saurait être compromis en aucune circonstance. Dans ce contexte, la FIDH appelle également le Parlement à abroger la loi interdisant les manifestations et la grève (loi n ° 34) adoptée par décret militaire en avril 2011. Le droit à la liberté de réunion devrait être garanti dans la nouvelle constitution et toute restriction à ce droit devra être prévue en conformité avec le droit international.

Sur le droit des victimes à justice et réparations

Un an après le déclenchement du soulèvement populaire le 25 Janvier 2011 et les violations flagrantes des droits de l’Homme commises par les forces de sécurité qui ont suivi [13], les victimes attendent toujours que justice soit faite. Hormis la procédure pénale engagée à l’encontre de l’ancien président Moubarak et plusieurs responsables de l’ancien régime et le procès spectacle qui se déroule depuis des mois, une seule condamnation, in abstentia, a été prononcée à l’encontre d’un officier de police pour le meurtre de manifestants le 28 Janvier 2011. L’officier de police s’est ensuite rendu à la justice, son nouveau procès a été ajourné à avril 2012. Quatre autres policiers du gouvernorat de Qalioubeya sont en procès depuis mars 2011 ; les audiences ont été constamment ajournées jusqu’à ce jour. En décembre 2011, la cour pénale du Caire a acquitté six agents de police de Sayeda Zeinab. En janvier 2012, la Cour pénale a acquitté deux policiers accusés d’avoir tué des manifestants à Ain Shams. Le procès de 13 autres agents de police accusés d’avoir tué des manifestants à Imbaba et Kerdasa a été ajourné à février 2012. La FIDH considère que la lenteur de la justice est une indication de l’absence de volonté politique de poursuivre et de punir les membres des forces de police impliqués dans le meurtre et les blessures de manifestants, commis notamment entre le 25 et le 28 janvier 2011.

La FIDH a appelé à plusieurs reprises le CSFA à diligenter des enquêtes impartiales et indépendantes et à poursuivre les auteurs de violations des droits de l’Homme commises après la chute du président Moubarak, mais même lorsque le CFSA a annoncé l’ouverture d’enquêtes, aucun résultat n’a jamais été rendu public, ni les auteurs de violations poursuivis et jugés. Les seuls incidents qui ont fait l’objet de poursuites judiciaires concernent le meurtre de manifestants devant Maspero le 9 octobre 2011. Cependant, les procès sont entre les mains du procureur militaire et seulement trois soldats sont accusés d’homicide involontaire, sans aucune considération pour la chaîne de commandement. La FIDH rappelle que les officiers militaires qui ont donné des ordres devraient également être poursuivis comme responsables du meurtre de manifestants. La FIDH exhorte le Parlement à rompre avec la politique de l’impunité, et à exiger la poursuite pénale de tous les auteurs de violations flagrantes des droits de l’Homme.

Sur la prévention de la torture

La FIDH rappelle que les manifestations du 25 janvier 2011, à l’origine du soulèvement populaire, avaient pour but de protester contre l’utilisation systématique de la torture par la police, en particulier durant les interrogatoires. La FIDH rappelle que la définition actuellement incomplète de la torture dans la législation égyptienne a été encore une fois critiquée au cours de l’Examen périodique universel de l’Egypte par le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies en 2010 [14]. La FIDH appelle le Parlement à adopter une définition de la torture conforme à la définition donnée par l’article 1, paragraphe 1, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT). La FIDH rappelle l’obligation des États parties à la CAT d’« éliminer les obstacles juridiques ou autres qui entravent l’éradication de la torture et les mauvais traitements", et appelle donc le Parlement à modifier les articles pertinents du Code pénal, en particulier les articles 126, 128, et 129, de sorte qu’ils soient en ligne avec la jurisprudence du Comité contre la torture. En outre, la FIDH rappelle aux autorités qu’elles doivent ouvrir des enquêtes indépendantes et impartiales sur les allégations de torture commises sous le régime de Moubarak et jusqu’à nos jours. La FIDH souligne que la poursuite des agents et officiers de police accusés de torture est une étape essentielle pour rompre avec la longue histoire de la pratique de la torture de l’époque Moubarak, et que les victimes de la torture devraient être en mesure d’obtenir réparation pour les préjudices qu’elles ont subis. La FIDH recommande également que les ONG travaillant sur la torture soient autorisées à effectuer des visites inopinées dans les lieux de détention et les prisons afin d’examiner les conditions de détention.


Recommandations :

La FIDH appelle le Parlement égyptien à :

  • modifier l’actuelle loi sur les associations afin de garantir la liberté d’association conformément aux obligations internationales souscrites par l’Egypte, y compris en substituant au régime d’autorisation d’enregistrement un régime de déclaration, en précisant les limitations admissibles et en soumettant celles-ci au contrôle du juge ;
  • modifier le Code de justice militaire afin de limiter la compétence de ces tribunaux aux seuls militaires accusés d’infractions de nature militaire ;
  • lever immédiatement et complètement l’état d’urgence ;
  • modifier la loi n °156 de 1964 qui accorde au ministre de l’Intérieur le droit d’ordonner l’utilisation de balles réelles pour la dispersion de protestations et de sit-in ;
  • abroger la loi interdisant les manifestations et la grève (loi n ° 34) adoptée par décret militaire en avril 2011 ;
  • adopter une définition de la torture conforme à la définition donnée par l’article 1, paragraphe 1, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT) ;
  • modifier les articles 126, 128, et 129 du Code pénal, afin qu’ils soient en ligne avec la jurisprudence du Comité contre la torture.

En outre, la FIDH exhorte les autorités égyptiennes à :

  • ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à l’abolition de la peine de mort ;
  • ratifier le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
  • ratifier le Statut de Rome instituant la Cour pénale internationale ;
  • ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées .

La FIDH rappelle au Parlement que l’Egypte doit veiller à mettre sa législation nationale et sa pratique en conformité avec les dispositions et obligations découlant des traités qu’elle a ratifiés ; les membres du Parlement devraient donc envisager la meilleure façon d’incorporer en droit interne les droits garantis par ces conventions internationales.

Enfin, l’Égypte devrait également inviter les procédures spéciales de l’ONU et de la CADHP et passer en revue les recommandations émises par les procédures spéciales dans le passé, afin de prioriser leur mise en œuvre dans le cadre de la transition.

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