Amnesty international, Défense des enfants international, la FIDH (Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme) et Human Rights Watch demandent la libération immédiate d’un enfant emprisonné en raison de son orientation sexuelle supposée

30/10/2001
Communiqué
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Amnesty International, Défense des Enfants International, la FIDH (Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme) et Human Rights Watch déplorent la condamnation et l’emprisonnement d’un jeune homme égyptien de 16 ans au motif qu’il aurait adopté un "comportement obscène". Les quatre ONG internationales appellent à sa libération immédiate et inconditionnelle.

Le 31 octobre, le tribunal pour enfants du Caire examinera en appel le cas du jeune Mahmud. Arrêté en mai pour avoir eu, selon l’accusation, un comportement homosexuel, il a été condamné le 18 septembre à une peine de prison de trois ans. Durant les deux premières semaines de sa détention, il n’a pu ni voir sa famille, ni s’entretenir avec un avocat, deux droits pourtant fondamentaux. Les aveux qui lui ont été extorqués pendant cette période ont été utilisés lors du procès en première instance qui a aboutit à sa condamnation. Son avocat affirme que ces aveux ont été extorqués sous la pression et que le jeune homme les a par la suite réfutés.

Amnesty international, Défense des enfants international, la FIDH et Human Rights Watch sont extrêmement préoccupés par cette condamnation d’un enfant, et par le prononcé d’une peine particulièrement lourde à son encontre, en raison de son orientation sexuelle présumée. Il est en effet extrêmement dangereux de refuser à Mahmud les garanties de bases durant sa détention et de lui faire ainsi risquer d’être victime de violations des droits de l’Homme.

Les quatre ONG sont très préoccupées par le fait que cet enfant n’a pas subi un interrogatoire conforme aux normes internationales en la matière. De tels aveux auraient dû être considérés comme des moyens de preuve irrecevables par le tribunal. Aux termes de l’article 37 (d) de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, à laquelle l’Egypte est partie, les Etats veillent à ce que " les enfants privés de liberté aient le droit d’avoir rapidement accès à l’assistance juridique ou à toute autre assistance appropriée".

Le cas de Mahmud est lié au procès des 52 homosexuels poursuivis pour "comportement obsène" et qu’on soupçonne d’homosexualité. Le procès est en cours devant un tribunal d’exception - fondé sur la loi sur l’Etat d’urgence - qui interdit tout possibilité de faire appel de ses décisions, en violation du droit international des droits de l’Homme. Au cours des audiences devant le Bureau du procureur de la sûreté de l’Etat, ces hommes ont affirmé avoir été l’objet de torture et de mauvais traitement en détention provisoire, en particulier dans les jours qui ont suivi leur arrestation. Aucune enquête approfondie et impartiale n’a été diligentée sur la base de ces allégations.

Amnesty International, Défense des enfants International, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme et Human Rights Watch ont mandaté un observateur à l’audience qui se déroulera le 31 octobre 2001 devant le Tribunal pour enfants du Caire.

Complément d’information
Selon les informations reçues, Mahmoud a été arrêté le 10 mai vers 11 h du matin, rue Ramsès, en plein centre du Caire. Après avoir été placé en garde à vue au poste de police d’Al-Azbekiya, il a été transféré au Service de renseignements de la sûreté de l’Etat, dans le district de Misral-Gadida, au Caire. Là, il a été interrogé dans le cadre d’une enquête criminelle concernant une cinquantaine d’hommes, soupçonnés comme lui d’avoir eu des rapports sexuels consensuels avec des personnes du même sexe. Le 12 mai, Mahmoud et les autres ont été déférés devant le procureur général de la sûreté de l’Etat, qui a ordonné leur incarcération pendant la durée des enquêtes. Mahmoud a été détenu pendant plus de quatre mois à la prison de Tora, au milieu d’adultes. Après sa condamnation, il a été transféré le 18 juin dans un centre de détention pour délinquants juvéniles à Al-Marg près du Caire.

La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE) formule des directives claires concernant la protection des enfants en détention.
Ainsi, l’article 37 (c) prévoit que " tout enfant privé de liberté [doit être] traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d’une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l’on estime préférable de ne pas le faire dans l’intérêt supérieur de l’enfant ".

Les normes internationales indiquent clairement la procédure à suivre en ce qui concerne les mineurs en détention avant jugement.
Conformément à l’article 37 (d) de la CDE :
" Les enfants privés de liberté [ont] le droit d’avoir rapidement accès à l’assistance juridique ou à toute autre assistance appropriée, ainsi que le droit de contester la légalité de leur privation de liberté devant un tribunal ou une autre autorité compétente, indépendante et impartiale, et à ce qu’une décision rapide soit prise en la matière. "

Conformément à l’article 15.2 des Règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing) :
" Les parents ou le tuteur peuvent participer à la procédure et peuvent être priés de le faire, dans l’intérêt du mineur, par l’autorité compétente."

L’article 40.2 (b) (iv) de la CDE stipule qu’aucun enfant ne doit "être contraint de témoigner ou de s’avouer coupable."

Mahmoud a passé plus de quatre mois en détention avant jugement, bien que l’article 37 (b) de la CDE souligne que la privation de liberté d’un enfant doit " n’être qu’une mesure de dernier ressort, et être d’une durée aussi brève que possible."
Les Règles de Beijing et les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté contiennent des dispositions analogues.

Le 18 juillet 2001, une procédure a été engagée par la Cour de sûreté de l’Etat contre 52 homosexuels présumés. Ce tribunal d’exception a été fondé en vertu d’une législation d’exception qui ne reconnaît pas le droit d’appel, ce qui constitue une violation des normes internationales en matière de droits de l’homme. La totalité des prévenus sont accusés de " comportement immoral ", et deux d’entre eux également de " mépris de la religion ". Le verdict doit être prononcé le 14 novembre 2001. (NB : Pour de plus amples informations sur cette affaire, se reporter aux communiqués suivants (uniquement en anglais) : Amnesty International : Egypt : Concerns over detention of alleged gays, 8 June 2001, AI Index : MDE 12/015/2001 ; Human Rights Watch : Egypt : Emergency Court Trials for Homosexuality Suspects, 4 July 2001.)

En Egypte, il arrive fréquemment que les garanties internationales pour la protection des détenus, notamment des enfants, soient violées.

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