La FIDH et le BCHR fustigent une vague de condamnations à mort sans précédent au Bahreïn

01/02/2018
Communiqué
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Manama – Paris, le 1er février 2018. Le Bahreïn connaît depuis 2017 une augmentation spectaculaire des condamnations à mort, alors que les récentes exécutions montrent un dangereux retour en arrière après le moratoire observé depuis 2010. Dénonçant cette tendance dramatique, nos organisations demandent aux autorités Bahreïnies de cesser immédiatement ces exécutions et d’abolir enfin la peine de mort.

Aujourd’hui, une nouvelle condamnation à la peine capitale a confirmé l’accélération en cours.

« Moosa Abdulla vient tout juste d’être condamné à mort, après qu’Ali Arab, Ahmed Al Malaly et Maher Al Kkhabaz aient été condamnés à la peine capitale plus tôt dans la semaine. 22 bahraïnis attendent aujourd’hui leur exécution, ce qui marque un record historique dans l’histoire du Bahreïn » dénonce Maytham Al Salman, conseiller spécial au BCHR ».

Le 25 décembre 2017, une cours militaire bahreïnie condamnait 6 personnes à la peine de mort, sur les charges de « formation d’une cellule terroriste » et « complot visant à assassiner un haut gradé militaire ».

Les victimes de ce procès furent soumis à la torture, la privation de sommeil, des chocs électriques, et mises à l’isolement en prison. Certaines furent en outre victimes de disparitions forcées. Ainsi, Sayed Alawi Hussein Alawi, ingénieur en communication, et Sayed Fadhel Abbas, disparurent pendant presque une année, alors que Mohammed Al-Shebabi et Mohammed Al Motaghawi le furent plusieurs mois. En outre, certains avocats ou familles des accusés furent menacés de représailles s’ils révélaient les mauvais traitements subis aux médias internationaux et organisations de défense des droits humains. Tous les accusés se virent refuser le droit de rencontrer leurs avocats avant les procès.

« Nous nous opposons systématiquement à la peine de mort, quelles que puissent être les circonstances ou les crimes commis » déclare Florence Bellivier, respondable du dossier « peine de mort » et Secrétaire Générale adjointe de la FIDH. « L’application croissante de la peine capitale au Bahreïn est très inquiétante. Elle révèle non seulement des pratiques discriminatoires et inhumaines, mais s’ajoute, pour ses victimes, aux violations du droit à des procès justes et équitables et est aujourd’hui utilisée pour des motifs politiques ».

Le fait que les accusés furent jugées devant des cours militaires, et non civiles, est significatif. En effet, ces cours ont été condamnées en 2011 par la Bahrain Independent Commission of Inquiry (BICI), au motif qu’elles avaient accepté des aveux extorqués sous la torture et s’étaient montrées incapables d’organiser des procès justes et équitables. La BICI recommanda alors la cessation des poursuites de civils devant les cours militaires, ce qui fut accepté par les autorités.

Pourtant, le Bahreïn a modifié sa constitution le 3 avril 2017 pour permettre aux Cours militaires de juger des civils. Cet amendement fut jugé catastrophique par les organisations bahreïnies de défense des droits humains.

« Les poursuites judiciaires contre les dissidents pacifiques devant les Cours militaires vont probablement se multiplier si la communauté internationale demeure silencieuse » affirme Maytham Al Salman. « Mohammed Al Mitqawi, un militant pacifique qui a travaillé avec les organisations de défense des droits de l’homme et rapporta des violations des droits de l’homme à la Bahrain Independent Commission of Inquiry, est aujourd’hui dans l’attente de son exécution ».

Le 15 janvier 2017, les autorités bahreïnies ont exécuté Ali Al-Singace (21 ans), Abbas-Al Samea (27 ans) et Sami Mushaima (42ans) dans des conditions telles qu’elles furent qualifiées d’ « exécutions extrajudiciaires » par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires : le Dr Agnès Callamard.

La FIDH et le BCHR condamnent fermement cette vague de condamnations à mort et d’exécutions. Nos organisations demandent en outre au gouvernement bahreïni d’abolir immédiatement la peine capitale et d’adhérer enfin au Protocole des Nations Unies abolissant la peine de mort.

Par ailleurs, nos organisations demandent aux autorités bahreïnies d’abroger l’amendement constitutionnel du 3 avril 2017 et restaurer dans sa version d’origine l’article 105 de la constitution bahreïnie, afin de s’assurer que les civils ne puissent plus être jugés par des cours militaires. Elles demandent en outre aux autorités d’ouvrir une enquête indépendante pour toute plainte de violations des droits, et particulièrement lorsqu’elles concernent des cas de torture et mauvais traitements. Enfin, elles lui demandent de bien vouloir adopter les principes de bases adoptés par les Nations Unies en 1985 sur l’indépendance de la Justice.

Contact Presse :

Samuel HANRYON
shanryon@fidh.org
Twitter : @Sam_hanryon
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