Le Parquet refuse de poursuivre le Général Aussaresses pour crimes contre l’humanité

17/05/2001
Communiqué

Le Procureur de la République a annoncé aujourd’hui son intention de ne pas donner suite à la plainte déposée le 7 mai dernier par la FIDH contre le Général Aussaresses pour crimes contre l’humanité.

La FIDH s’étonne que le Parquet n’ait pas souhaité ouvrir une information alors même qu’elle a apporté dans sa plainte initiale suffisamment d’éléments démontrant que les exactions décrites par le Général Aussaresses étaient constitutives de crimes contre l’humanité.

Elle note en revanche la décision positive prise par le Parquet d’ouvrir une enquête préliminaire à la suite de la plainte de la Ligue des droits de l’Homme pour " apologie de crimes de guerre ".

Pour le Parquet, les faits revendiqués par le Général Aussaresses, et plus généralement ceux commis à l’occasion du conflit algérien sont constitutifs de " crimes de guerre " et ne répondent pas aux critères constitutifs de crimes contre l’humanité.

La FIDH a pris connaissance avec une vive déception des arguments développés par le Parquet. Il ressort en effet de l’ouvrage du Général Aussaresses, mais plus généralement des ouvrages d’historiens spécialistes de la guerre d’Algérie ainsi que des interviews accordées par certains de ses supérieurs de l’époque, que la pratique des arrestations massives et arbitraires, des disparitions, de la torture et des exécutions sommaires avait été institutionnalisée.

On peut citer à ce propos l’interview accordée le 22 novembre 2000 par le Général Massu au journal le Monde. A la question de savoir si les pratiques de torture étaient couramment utilisées, le Général répond dans les termes suivants : " Mais j’ai dit et reconnu que la torture avait été généralisée en Algérie ! Elle a ensuite été institutionnalisée avec la création du CCI (centre de coordination interarmées) et des DOP (dispositifs opérationnels de protection), et institutionnaliser la torture, je pense que c’est pire que tout ! "

Cette institutionnalisation atteste du caractère généralisé et concerté des exactions commises pour des motifs politiques par l’armée française sur l’ensemble du territoire algérien à l’encontre non seulement des combattants, mais aussi des populations civiles.

Le caractère systématique, généralisé et institutionnalisé, participant d’un plan concerté des crimes commis en Algérie à l’encontre des populations civiles ressort donc clairement. Ils entrent ainsi dans le cadre de la définition du crime contre l’humanité telle que précisée par l’article 6 de la Charte du Tribunal International du 8 août 1945, par son application ultérieure en jurisprudence, ou par la rédaction de l’article 212-1 du Code pénal français.

La FIDH annonce son intention de déposer une plainte avec constitution de partie civile dans les tous prochains jours du même chef de crimes contre l’humanité auprès du doyen des juges d’instruction de Paris.

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