Algérie : Mohamed Smaïn grâcié et libéré

Nouvelles informations

DZA 002 / 1211 / OBS 142.2

Libération

Algérie

9 juillet 2012

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations sur la situation suivante en Algérie.

Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé de sources fiables de la libération de M. Mohamed Smaïn, défenseur des droits de l’Homme qui n’a jamais cessé de se battre aux côtés des familles de victimes du conflit civil des années 90, et ancien responsable de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) à Relizane, une ville située à l’ouest de l’Algérie, près d’Oran.

Selon les informations reçues, le 6 juillet 2012, M. Mohamed Smaïn a été libéré après avoir bénéficié d’une grâce présidentielle. L’Observatoire rappelle que celui-ci purgeait une peine de deux mois depuis le 19 juin 2012.

L’Observatoire salue la libération de M. Mohamed Smaïn et remercie toutes les personnes, organisations et institutions qui sont intervenues en sa faveur. L’Observatoire rappelle que la condamnation de ce dernier s’est inscrit dans le cadre d’un harcèlement judiciaire, en ce qu’il ne semble viser qu’à sanctionner ses activités de défense des droits de l’Homme, et en appelle aux autorités algériennes pour qu’un terme soit mis à tout harcèlement - y compris judiciaire - ou répression à son encontre et celle de tous les défenseurs des droits de l’Homme en Algérie.

Rappel des faits :

Le 3 février 2001, M. Mohammed Smaïn, alors responsable de la LADDH à Relizane, a alerté la presse algérienne de la découverte et l’exhumation de charniers par les services de gendarmerie et la milice de M. Hadj Fergane, ancien maire de Relizane. Suite à ces révélations, M. Fergane a porté plainte contre M. Smaïn, conjointement avec neuf ex-membres de sa milice dite “de légitime défense”.

Le 5 janvier 2002, M. Smaïn a été condamné par le Tribunal de Relizane à deux mois de prison ferme, 5 000 dinars d’amende et 10 000 dinars de dommages et intérêts à verser à chacun des dix plaignants pour “diffamation”, “outrage” et “dénonciation de crimes imaginaires”. M. Smaïn a fait appel de cette condamnation et la Cour de Relizane l’a condamné le 24 février 2002 à une année de prison ferme, soit une peine six fois plus longue que celle prononcée en première instance, et à 210 000 dinars d’amende. M. Smaïn s’ést pourvu en cassation contre cette décision et la Cour suprême a renvoyé l’affaire devant la Cour de Relizane au motif que les règles du procès équitable n’ont pas été respectées.

Le 26 octobre 2007, la Cour d’appel de Relizane a relaxé M. Smaïn des faits de diffamation et d’outrage mais l’a condamné à deux mois de prison ferme, 50 000 dinars d’amende et 10 000 dinars de dommages et intérêts à verser à chacun des dix plaignants pour “dénonciation de crimes imaginaires” et "dénonciation calomnieuse", à la suite d’une audience à laquelle l’Observatoire a mandaté un avocat français qui a plaidé aux côtés des avocats algériens de M. Smaïn.

Le 29 octobre 2007, M. Smaïn a fait appel de cette décision auprès de la Cour suprême.

Le 14 décembre 2011, M. Mohamed Smaïn a été notifié par les services de police d’un jugement rendu le 27 octobre 2011 par la Cour suprême d’Alger, confirmant le jugement de la Cour d’appel de Relizane qui avait été rendu à son encontre le 26 octobre 2007, le condamnant pour “dénonciation calomnieuse" et "dénonciation de crimes imaginaires” à deux mois de prison ferme, 50 000 dinars algériens d’amende et 10 000 dinars algériens de dédommagement en faveur de chacun des dix plaignants.

En mars 2012, M. Mohamed Smaïn a introduit une demande de grâce pour des raisons de santé en vertu de l’article 16, paragraphe 8 du Code portant organisation de l’administration pénitentiaire auprès du Ministère de la justice.

Le 19 juin 2012, M. Mohamed Smaïn a été arrêté par des éléments des brigades mobiles de la police judiciaire de la Sûreté de la Wilaya de Relizane, sans mandat d’amener ni d’arrêt. Cette arrestation a fait suite au défaut de présentation de M. Smaïn suite à deux convocations du Parquet général de Relizane pour se soumette à une contre-expertise médicale. Or d’après M. Smaïn, lesdites convocations ne lui ont jamais été transmises. Ce même jour, M. Smaïn a été écroué pour servir sa peine de deux mois de prison.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités algériennes en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Mohamed Smaïn, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme algériens ;

ii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de M. Mohamed Smaïn, ainsi que de tous les défenseurs des droits de l’Homme algériens, afin qu’ils puissent mener leurs activités de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à :

 son article 1 qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international »,

 et son article 12.2, qui dispose que « l’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration » ;

iv. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par l’Algérie.

Adresses :

· M. Abdelaziz Bouteflika, Président de la République, Présidence, El-Mouradia, Alger, Algérie, Tél : 00 213 21 69 15 15 ; Fax : +213 21 69 15 95. E-mail : President@el-mouradia.dz

· M. Farouk Ksentini, Président de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, Avenue Franklin Roosevelt, Allée du Peuple, 16000 Alger, Tél : +00 213 (0) 21230311 / 230214

· M. Abdelaziz Ziari, Président de l’Assemblée populaire nationale, 18 boulevard Zirouf Youcef, 16000 Alger, Tél : 00 213 021 73 86 00 / 10

· M. Daho Ould Kablia, Ministre de l’Intérieur, Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Locales, de l’Environnement et de la Réforme Administrative, Rue du Docteur Saâdane, Alger ; Tél : 00 213 (0) 21 73 23 40 / 00 213 (0) 21 73 23 48 / 00 213 (0) 21 73 12 00 00 213 ; Fax : (00 213 0) 21 92 12 43

· M. Tayeb Belaiz, Ministre de la Justice, Ministère de la Justice, 8 Place de Bir-Hakem. El-Biar, Alger, Algérie. Tél : 00 213 (0) 21 92 16 08 ; Fax : 00 213 (0) 21 74 76 64 / + 213 21 92 17 01 / 29 56

· Procureur général de la Wilaya de Relizane, Fax : + 213 469 149 993

· S.E. Idriss Jazaïry, Ambassadeur, Représentant permanent de l’Algérie auprès de l’ONU à Genève, Route de Lausanne 308, CH-1293, Bellevue, Suisse, E-mail : mission.algerie@mission-algerie.ch, Fax : +4122 / 774.30.49

· Ambassadeur de l’Algérie auprès du Royaume de Belgique, Avenue Molière 207, 1050 Bruxelles, Fax : 0032 343 51 68, E-mail : Iinfo@algerian-embassy.be

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques d’Algérie dans vos pays respectifs.

***

Paris-Genève, le 9 juillet 2012

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :

· E-mail : Appeals@fidh-omct.org

· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80

· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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