L’Ukraine sur le point de ratifier le Statut de Rome et de devenir le 125e État partie à la Cour pénale internationale

28/08/2024
Déclaration
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Roman PILIPEY / AFP
  • La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et ses organisations membres en Ukraine, le Center for Civil Liberties et le Kharkiv Human Rights Protection Group, se réjouissent que l’Ukraine s’oriente vers une ratification du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).
  • Les organisations demandent à l’Ukraine de s’assurer d’harmoniser sa législation nationale en conformité avec le Statut de Rome. Elles s’opposent notamment à l’inclusion d’une déclaration au titre de l’article 124, qui limiterait la compétence de la CPI sur des crimes de guerre qui auraient été commis par des ressortissant·es ukrainien·nes.

Paris, Kiev, le 28 août 2024. À l’occasion de la célébration de l’indépendance de l’Ukraine, le 24 août, le Président, Volodymyr Zelensky a promulgué le projet de loi sur la ratification du Statut de Rome de la Cour pénale internationale ainsi que ses amendements, suite à son adoption par le Parlement ukrainien le 21 août. Cette étape décisive ouvre la voie à l’Ukraine pour rejoindre officiellement la Cour pénale internationale en tant que 125e État partie. À l’heure où le système de justice international fait face à des défis majeurs, cette loi vient renforcer le système mondial de lutte contre l’impunité des auteur·es de crimes internationaux.

Le projet de ratification de l’Ukraine constitue le point culminant d’une décennie d’actions de plaidoyer menées par des organisations de défense des droits humains, dont la FIDH et ses membres. En septembre, le Parlement ukrainien, le Verkhovna Rada, examinera la loi qui intégrera les crimes relevant du Statut de Rome en vue de son adoption au niveau national.

Oleksandra Matviichouk, vice-présidente de la FIDH et présidente du Center for Civil Liberties déclare : « ce pas vers la ratification du Statut de Rome réaffirme l’engagement de l’Ukraine dans son combat contre l’impunité et offre de nouvelles voies aux victimes de crimes internationaux en quête de justice. Nous encourageons à présent le législateur ukrainien à faire en sorte que tous les crimes relevant de la compétence de la CPI puissent être poursuivis au niveau national ».

Malgré cette avancée, la nouvelle loi contient une déclaration invoquant la Disposition transitoire prévue par l’article 124 du Statut de Rome. Cette disposition permet à l’Ukraine de limiter la compétence de la Cour en matière de crimes de guerre commis par ses ressortissants ou bien sur son territoire, pour une période de sept ans. En invoquant la restriction de nationalité, l’Ukraine protégerait en réalité ses ressortissant·es de poursuites pour de tels crimes.

« Nous nous réjouissons de la ratification par l’Ukraine du Statut de Rome, qui permettra de renforcer l’état de droit au niveau mondial », a déclaré Danya Chaikel, représentante de la FIDH auprès de la CPI, à La Haye. « Nous sommes cependant très inquiet·es que cette déclaration puisse rendre possible une justice sélective et qu’elle entrave la capacité de la Cour à enquêter sur tous les crimes et tous les suspect·es, limitant potentiellement l’accès de certaines victimes à la justice. Nous exhortons les autorités ukrainiennes à faire en sorte que tous les crimes et tou·tes leurs auteur·es, sans exception, soient soumis·es à l’obligation de rendre des comptes. »

Après avoir signé le Statut de Rome en 2000, l’Ukraine a soumis deux déclarations, l’une en 2014 puis l’autre en 2015, dans lesquelles le pays accepte la compétence de la CPI en matière de crimes internationaux perpétrés sur son territoire depuis novembre 2013. L’Ukraine deviendra un État partie à part entière 60 jours après avoir soumis son instrument de ratification du Statut de Rome auprès du Secrétaire général des Nations unies. Cette avancée historique permettra de renforcer la coopération de l’Ukraine avec la Cour et sa pleine participation au processus de décision, dont l’Assemblée des États parties au Statut de Rome.

Nous encourageons l’Ukraine à intégrer toutes les dispositions du Statut de Rome dans sa législation nationale : la capacité de l’Ukraine à poursuivre les crimes internationaux, tels que les crimes contre l’humanité, se verrait ainsi renforcée. Jusque-là, celle-ci ne relevait pas de la compétence nationale.

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