Association médicale d’Ankara : Manifestations du 1er juin sur la Place Kizilay et à Guvenpark

Déclaration de l’ASSOCIATION MEDICALE D’ANKARA

Les habitants d’Ankara ont apporté leur appui aux protestations qui ont débuté à Istanbul contre la construction d’une artère commerciale, synonyme de la destruction du Parc Gezi de la Place Taksim, en envahissant la Place Kizilay et Guvenpark aux premières heures de la matinée du 1er juin. L’Association médicale turque et l’Association médicale d’Ankara ont aussi participé avec des médecins et étudiants de la Faculté de Médecine d’Ankara à une marche solidaire qui s’est ébranlée de Demirtepe à 15h30 pour rejoindre la Place Kizilay.

Des milliers de citadins d’Ankara ont aussi convergé de toutes les directions vers la Place Kizilay en criant “à bas le Gouvernement”, “ Tayyip, démission”, “Unissons-nous contre le fascisme”, et en manifestant.

Les forces de police ont utilisé des doses massives de gaz lacrymogène pour disperser la foule. De nombreuses personnes ont été blessées, certaines grièvement et d’autres plus légèrement. Quelques-unes de ces blessures engagent même le pronostic vital de la victime.

Selon les rapports émanant du bureau de crise mis en place par le Conseil de l’ordre des médecins d’Ankara, les listes de personnes blessées par les actes de force excessive commis par les policiers anti-émeute ont été dressées comme suit :

 Hôpital Diskapi Yildirim Beyazit : 12 blessés, un traumatisme crânien

 Hôpital Numune : 30 blessés, un traumatisme crânien d’une extrême gravité (Ethem Sarisuluk)

 Hôpital Ibni Sina : 25 blessés, deux hémorragies cérébrales dont l’une avec hématome subdural et l’autre montrant une lésion due au gaz lacrymogène dans la boîte crânienne

 Hôpital Ankara : 7 blessés

 Hôpital Hacettepe : 25 blessés dont une fracture crânienne frontale avec hématome subdural, une fracture maxillaire (mâchoire supérieure), la perte d’un œil, un policier légèrement blessé après une collision avec un véhicule TOMA.

 Hôpital Bayindir Kavaklidere : 2 blessés, un traumatisme crânien

 Hôpital Bayindir Sogutozu : une fracture du pelvis due à l’impact direct d’une bombe de gaz lacrymogène sur cette partie du corps.

 Hôpital Cag : 70 blessés, plusieurs brûlures et hématomes résultant de l’utilisation de gaz lacrymogène, 4 personnes avec fractures osseuses, 4 fractures du crâne dont l’une ouverte (Dilan Ece, étudiant à la Faculté de médecine de l’Université d’Ankara)

 Hôpital Medicana : 30 policiers blessés, un manifestant blessé

 Hôpital Akay : 105 blessés. Plus de 100 cas de personnes blessées ont été signalés par les salles des urgences et bureaux de crise établis par un certain nombre de partis et d’associations politiques. Un lieutenant garde du corps du service présidentiel a été transporté inconscient aux urgences du GATA, l’examen médical pratiqué révélant deux fractures osseuses. Salle des urgences installée près du bureau de crise : 7 blessés, un traumatisme crânien grave.

Le nombre total de personnes blessées décompté avant la tombée de la nuit à Ankara s’est établi au moins à 414 dont 15, grièvement.

Toutes les blessures mentionnées ci-dessus résultent de tirs de bombes de gaz lacrymogène, de brûlures et hématomes causés par les bombes, de collisions avec des véhicules TOMA, de jets de pierres lancées par les policiers et de chutes de personnes tentant de s’enfuir pour échapper au gaz lacrymogène.

Force est de constater qu’aujourd’hui une manifestation démocratique et pacifique sans violence est exposée à l’intervention excessive et armée des forces de police.
Selon les témoignages recueillis, les policiers dégoupillaient les bombes à gaz lacrymogène pour tirer contre les manifestants comme avec des fusils en visant directement la tête, les utilisant ainsi effectivement comme projectiles.
Aujourd’hui Ankara a subi la terreur que lui ont imposée les forces de police, le ministère de l’Intérieur et le gouvernement.

Viser la tête en lançant des bombes de gaz lacrymogène constitue une tentative de meurtre au premier degré. C’est un crime. Qui en a donné l’ordre ? Il y a nécessairement un responsable.

En raison de la diffusion du gaz dans l’atmosphère, l’air à Kizilay et dans sa vicinité est devenu rapidement irrespirable, emplissant les immeubles commerciaux et résidentiels situés à proximité. Il existe dans tous ces immeubles une proportion non négligeable de personnes souffrant d’asthme et de cardiopathies. La vie de dizaines de milliers de personnes a été mise en danger. Qui a donné l’ordre de déclencher cette attaque ? Il y a nécessairement un responsable qui doit répondre de ces actes.
Aujourd’hui, les rues d’Ankara sont exposées à ce climat de terreur policière. Il y a nécessairement un responsable qui doit répondre de l’instauration de cette terreur.
Note de la rédaction : Le communiqué de presse diffusé le 1er juin par l’Association médicale d’Ankara signale que “des tentatives ont été faites pour déplacer les blessés qui avaient été admis à l’hôpital afin de les conduire en prison”. Pourtant, le 2 juin, l’hôpital déclarait qu’il n’y avait eu aucune tentative de ce genre et que les patients avaient tous été soignés conformément à la même éthique professionnelle.

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