FIDH demande aux autorités turques de prendre davantage de mesures pour éradiquer la torture

09/01/2003
Communiqué
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La Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH) a envoyé une mission d’enquête en Turquie du 25 décembre 2002 au 6 janvier 2003, afin de collecter des informations sur la pratique de la torture dans le pays, et d’examiner la mise en œuvre concrète des réformes juridiques récemment adoptées par la Turquie dans le cadre de sa candidature à l’Union Européenne.

La délégation de la FIDH, composée de Mme Elsa Le Pennec, chercheuse, et de Mme Catherine Teule, Secrétaire Générale de la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) a rencontré de nombreuses personnes et organisations, à la fois gouvernementales (Secrétaire adjoint du Ministère de l’Intérieur, Commission parlementaire des droits de l’Homme) et non gouvernementales (en particulier la Turkish Foundation for Human Rights TIHV et l’Association pour les droits de l’Homme IHD) dans différentes régions du pays (Ankara-Diyarbakir-Izmir-Istanbul).

La pratique de la torture et des mauvais traitements par la police et les gendarmes, lors d’une arrestation ou de la garde à vue loin de diminuer demeure répandue et systématique. La FIDH est particulièrement préoccupée par l’utilisation reportée de méthodes de torture plus " sophistiquée ", décelables seulement par des examens médicaux très poussés et rarement disponibles. Les prisonniers politiques ainsi que les prisonniers de droit commun, femmes, hommes et mineurs, sont victimes de torture dans le pays. La situation des minorités ethniques, en particulier des Roms et des Kurdes, est particulièrement préoccupante.

La FIDH a reçu de nombreuses allégations concernant des cas de détention illégales et de torture pratiquées par la police et les gendarmes dans le Sud Est de la Turquie. Malgré la levée de l’état d’urgence le 30 novembre 2002, la délégation tient à exprimer son inquiétude face aux nombreuses allégations d’arrestations arbitraires, de détention au secret et de cas de torture pendant la garde à vue.

Les centres de détention du pays restent dangereusement coupés du monde extérieur. Les avocats défenseurs des droits de l’Homme n’ont pas accès à leurs clients, et font l’objet de menaces de la part du personnel pénitentiaire ; ils sont soumis à des fouilles systématiques et humiliantes dans les prisons de type F et E (cellules d’isolement) ; leurs dossiers leur sont confisqués, en violation flagrante du Code de procédure pénale turc (CUMUK). La torture continuera tant que le droit d’accès des avocats à leurs clients ne sera pas respecté pour tous les détenus et mis en œuvre dans les plus brefs délais.

Les autorités torques intimident, persécutent et intentent des procès contre les défenseurs, les journalistes, les avocats, les médecins et tous ceux qui critiquent la façon dont le gouvernement gère la question des prisons, ou qui condamnent la pratique de la torture et la politique de l’Etat qui contribue au climat d’impunité dans le pays.

Les changements législatifs récents adoptés par la Turquie (Février et août 2002) pourraient constituer un premier pas dans l’établissement de l’Etat de droit, à la lumière des normes européennes et des conventions internationales ratifiées par la Turquie. Néanmoins, la FIDH appelle les autorités turques à prendre des mesures supplémentaires pour mettre définitivement fin à la torture et aux mauvais traitements, et ce de façon prioritaire. La FIDH demande également aux autorités turques d’assurer un contrôle adéquat des prisons et des postes de police, via un contrôle par des autorités indépendantes sans lien avec les autorités. Les autorités doivent également faire en sorte que des enquêtes efficaces et en profondeur soient menées rapidement sur tous les cas d’allégations de torture.

Le rapport sera disponible en février.

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