APPEL AU PRESIDENT SEZER POUR UN PREMIER PAS VERS LA RECONCILIATION NATIONALE

14/12/2000
Appel urgent

Le 8 décembre, le Parlement turc adoptait une loi accordant à certains détenus une dispense de peine, conditionnelle, plafonnée à dix ans. Une loi d’amnistie, aux vertus avant tout réconciliatrices, avait été promise depuis plus d’un an. Le texte qui vient d’être adopté n’en est pas une, loin s’en faut.

Celui-ci est aujourd’hui entre les mains du Président Sezer, qui doit décider de le ratifier ou non, d’ici le 23 décembre.

Depuis plus d’un an, les parlementaires turcs promettaient une loi d’amnistie et les attentes de la société civile turque comme de la communauté internationale étaient grandes. Parce que ce texte de loi devait être le premier signe d’ouverture, après que les armes se soient enfin tues dans le Sud Est et un an après la décision du Conseil européen d’Helsinki accordant à la Turquie le statut de pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne.

La FIDH déplore que loi adoptée par le Parlement turc le 8 décembre, si elle ne bénéficie pas aux délinquants économiques et financiers, ni aux rares policiers poursuivis pour les actes de torture dont ils se sont rendus coupables, ce qu’il faut saluer, ne traduise en revanche aucune réelle volonté de la Turquie de satisfaire aux critères de Copenhague, notamment en favorisant une plus grande liberté d’expression, question à propos de laquelle la Turquie admet pourtant elle même que des progrès s’imposent .

Ceux poursuivis et condamnés sur le fondement de l’article 312 alinéa 2 du Code Pénal turc sont en effet exclus du bénéfice de cette loi d’élargissement. Cet article, depuis l’aménagement de la loi anti-terreur, en 1995, est celui en vertu duquel des intellectuels, au nombre desquels Esber Yagmurdereli, avocat et écrivain, des journalistes et des militants des droits de l’Homme ont été embastillés en Turquie, pour avoir simplement exprimé des idées divergentes de celles du pouvoir en place. Les détenus d’opinion devaient être les premiers bénéficiaires d’une loi qui, sans avoir les vertus d’une loi d’amnistie, se voulait une mesure de clémence et d’apaisement.

La FIDH considère la loi actuelle comme inacceptable et forme le vœu que le Président Sezer, européen convaincu, qui a fait montre depuis son élection de son attachement au droit et aux libertés fondamentales, donne un signal fort aux parlementaires turcs et les invite à revoir un texte, et à y apporter les aménagements nécessaires à sa mise en conformité avec les exigences démocratiques et les conventions internationales ratifiées par la Turquie, dans lesquelles la liberté d’expression est un droit fondamental.
La FIDH invite également le Président Sezer à souligner auprès des élus de Turquie l’importance d’une amnistie générale, seule façon de tourner la page d’un passé meurtrier, et d’écrire celle de l’ère européenne

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