À la fin Octobre, le gouvernement russe a lancé une vaste opération appelée Migrant 2014 afin de sévir contre les immigrés en situation irrégulière en Russie. La FIDH et ADC Memorial ont signalé 7000 arrestations durant cette opération. Que sont devenus ces immigrés et leur famille ? Où sont-ils actuellement ?
Lorsque nous avons signalé ces 7000 arrestations, l’opération Migrant 2014 venait de démarrer. Selon les chiffres officiels publiés par la police de Moscou et par le service fédéral de l’immigration, à la date du 4 Novembre, fin de l’opération, 50 000 immigrés avaient été arrêtés par la police. Un peu moins de 2000 personnes ont été expulsées, et des centaines ont été placées en détention. Au même moment, le service fédéral de l’immigration de Mosou a effectué de multiples contrôles qui ont permis d’expulser 1 500 personnes. 3000 autres personnes n’ont plus le droit de revenir en Russie. Le montant total des pénalités imposées à ces immigrés a atteint presque 50 000 000 de roubles ( environ 1 million d’euros).
La répression à l’encontre des immigrés dans la seule ville de Moscou au cours de cette semaine a entrainé plus de 3 500 expulsions et des dizaines de milliers de sanctions administratives.
En ce qui concerne le lieu où se trouvent les immigrés qui ont été arrêtés, on peut supposer que beaucoup d’entre eux ont dû quitter le pays, souvent avec l’interdiction de revenir pendant une longue période. D’autres ont pu continuer à vivre et à travailler en Russie, mais cela leur a coûté très cher.
Que révèle cette opération sur la politique du gouvernement russe en matière d’immigration ? Quel est l’impact de cette politique sur les autres pays de la région ?
La politique du gouvernement russe en matière d’immigration est controversée. D’une part il entretient les liens étroits avec les principales entreprises qui emploient des travailleurs immigrés dans les secteurs du bâtiment, des services communaux et de la vente. Ce système permet à la Russie de bénéficier de main d’œuvre à bas prix sans avoir à payer de prestations sociales. D’autre part, ce sont les personnes qui profitent le plus du travail de ces immigrés qui ont organisé ces opérations contre eux et qui utilisent cette réthorique xénophobe dans les médias gouvernementaux pour flatter le sentiment nationaliste de la population. Les immigrés sont devenus des boucs émissaires pour les énormes problèmes politiques et économiques de la Russie, bien que le pays ne puisse pas fonctionner sans le travail des immigrés.
Le gouvernement russe mène une stratégie complexe dans la région en matière d’immigration. Par exemple, la Russie autorise les immigrés Tadjiks à travailler en Russie en échange du soutien militaire et géopolitique du Tadjikistan. Le Tadjikistan à son tour bénéficie de l’argent envoyé par les travailleurs immigrés à leur famille.
Quels sont les principaux problèmes pour les immigrés en Russie ?
Les immigrés en Russie sont confrontés à une multitude de problèmes par exemple la discrimination généralisée et la xénophobie, par ailleurs ils sont stigmatisés à cause de leur situation illégale, et ils risquent d’être placés en détention et expulsés, surtout s’ils sont originaires du Caucase et de l’Asie Centrale. Ceux qui n’ont pas de travail sont interdit de séjour en Russie au-delà de trois mois, ce qui de fait met pratiquement tous les enfants des immigrés dans une situation illégale.
Les travailleurs immigrés reçoivent un salaire plus bas pour le même travail que celui des ressortissants russes et pâtissent de l’absence de sécurité sociale en cas de maladie, blessure ou décès.
Les conditions de détention sont également très problématiques. Il n’y a pas de contrôle judiciaire concernant la durée de détention des immigrés accusés d’avoir enfreint les lois sur l’immigration, la période d’incarcération pouvant se prolonger jusqu’à deux ans pour des raisons purement administratives.
Ces problèmes sont aggravés par le manque de soutien des pays d’origine des immigrés. Dans certains cas, comme l’Ouzbékistan, les immigrés font l’objet d’une répression de la part de leur gouvernement parce qu’ils travaillent à l’étranger.