L’adoption de nouveaux amendements dans le cadre de la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme sanctionne un peu plus l’action des défenseurs des droits de l’Homme

12/07/2007
Communiqué

Genève-Paris, le 12 juillet 2007. L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), exprime sa plus vive préoccupation suite à l’adoption d’amendements qui renforcent les mesures de la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme en Russie et, en retour, sanctionnent un peu plus l’action des défenseurs des droits de l’Homme.

Le 11 juillet 2007, le Conseil de la Fédération (la Chambre Haute du Parlement russe) a voté des amendements au Code pénal, au Code administratif et à la Loi fédérale « Sur les médias de masse » qui renforcent les mesures de la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme. Ce vote intervient après l’adoption par la Douma, le 6 juillet 2007, en troisième lecture des amendements à la Loi fédérale « Sur la lutte contre les activités extrémiste s ».

Désormais, ces amendements permettent notamment aux services de sécurité de procéder aux écoutes téléphoniques de toute personne accusée d’avoir commis un crime, indépendamment de la nature et de la gravité d’accusation. En outre, les amendements apportés au Code pénal élargissent la définition de crime extrémiste aux « actes criminels commis pour des raisons de haine politique ou idéologique ou de haine envers un groupe social ». Les médias se voient également interdire la diffusion de toute information sur les organisations dont l’activité est considérée comme « extrémiste ». Il est à craindre qu’une utilisation abusive de cette législation permettrait de considérer comme « extrémisme » toute critique envers les autorités, et de qualifier les manifestations d’opposition de « désordre de masse », activité passible jusqu’à 12 ans d’emprisonnement.

L’Observatoire est d’autant plus préoccupé par l’adoption de ces nouveaux amendements que le pouvoir n’a cessé de multiplier les tentatives visant à accroître le nombre d’incriminations juridiques en vue de sanctionner les voix dissidentes. Ainsi, certaines dispositions de la Loi « Sur la lutte contre les activités extrémistes », entrée en vigueur en juillet 2002, sont régulièrement utilisées afin d’entraver l’activité des ONG. De surcroît, des amendements à cette Loi, adoptés par la Douma le 14 juillet 2006 et ratifiés par le président Poutine le 27 juillet 2006, élargissaient déjà la définition de l’acte extrémiste à la diffamation publique à l’encontre des « fonctionnaires d’Etat de la Fédération de Russie ou des sujets de la Fédération, concernant l’exercice de leurs fonctions ou liée à cet exercice ». Alors que la Loi préalablement en vigueur était déjà largement utilisée pour sanctionner les défenseurs, le caractère très vague de cette définition laisse craindre une interprétation abusive de ces nouveaux amendements, dont les défenseurs des droits de l’Homme et les journalistes indépendants risquent d’être les premières victimes.

L’Observatoire prie les autorités russes de mettre un terme immédiat à toute forme de harcèlement à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme et de réviser leur législation afin que cette dernière soit conforme aux normes internationales et régionales en matière de libertés d’association et d’expression.

L’Observatoire demande plus généralement aux autorités russes de se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, notamment à son article premier qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international » et à son article 12.2 qui prévoit que « l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la [...] Déclaration ».

Pour plus d’informations, merci de contacter : OMCT : Delphine Reculeau : + 41 22 809 49 39 FIDH : Gaël Grilhot : + 33 1 43 55 25 18

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