Le 5 avril 2022, la Première chambre de la Cour d’appel à Moscou a confirmé la dissolution du HRC Memorial, organisation membre de la FIDH en Russie, au motif qu’elle aurait porté atteinte à la loi relative aux agents étrangers. Les avocats de HRC Memorial envisagent de former un pourvoi en cassation à l’encontre de cette décision.
HRC Memorial est une division de Memorial International, une organisation internationale de défense des droits civils fondée à Moscou en 1989, avec des antennes régionales présentes dans les principales villes de Russie. HRC Memorial œuvre, entre autres, à défendre et à veiller au respect des droits humains et des libertés fondamentales des citoyen·nes et à diffuser des informations fiables sur les violations des droits humains.
Le 8 novembre 2021, le Bureau du Procureur de Moscou a saisi le tribunal municipal, en vue de demander la dissolution du HRC Memorial au motif que ce dernier n’avait pas respecté les dispositions de la loi relative aux agents étrangers et pour « apologie de terrorisme et d’extrémisme ». Le 29 décembre 2021, HRC Memorial était mis en liquidation par le tribunal municipal moscovite sur accusation de violation de la loi relative aux agents étrangers. Cette condamnation a été prononcée juste un jour après que la Cour suprême de la Fédération de Russie a ordonné la liquidation de Memorial International pour les mêmes motifs. Les organisations ont toutes deux fait appel de ces décisions, et le 29 décembre 2021, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a exhorté la Russie à « suspendre » l’exécution des décisions de dissoudre les deux ONG Memorial International et HRC Memorial en vertu de l’article 39 de son règlement, mais la demande est restée lettre morte. Les autorités russes sont passées outre l’ordonnance de la CEDH.
La dissolution de ces deux organisations a été prononcée à la suite de deux procès à caractère politique dans lesquels aucune preuve solide n’avait été produite concernant les charges retenues contre ces dernières afin de justifier leur liquidation. Le motif officiel ayant conduit à la décision des tribunaux était l’absence de la mention « agent étranger » sur certains des documents publiés par les organisations sur les réseaux sociaux, tel que l’exige la loi russe relative aux agents étrangers. Les deux ONG avaient pourtant respecté cette disposition en ajoutant cette mention à la plupart de leurs documents. Les véritables raisons expliquant la dissolution sont d’ordre politique : durant les procès, les procureurs ont accusé Memorial International et HRC Memorial de « dénaturer la mémoire historique, notamment celle de la Grande guerre patriotique » et de « donner une fausse image de l’URSS, l’assimilant à un État terroriste ».
L’Observatoire rappelle que depuis 2013 les autorités russes ont qualifié d’« agents étrangers » certaines organisations membres du mouvement Memorial, telles que Memorial International et HRC Memorial. Dans ce contexte, le mouvement Memorial a été victime de multiples actes de harcèlement et a rencontré de nombreux obstacles dans ses activités, notamment des amendes, des attaques et des perquisitions de leurs locaux dans tout le pays. Les deux organisations ont versé des millions de roubles à la suite de sanctions pour violations présumées de la loi relative aux agents étrangers, jugée contraire aux droits national et international.
L’Observatoire condamne fermement la confirmation en appel de la dissolution du HRC Memorial, qui semble n’avoir d’autre but que celui de sanctionner l’organisation pour ses activités légitimes de défense des droits humains et du respect des droits à la liberté d’association, de réunion et d’expression.
L’Observatoire exhorte les autorités russes à abroger sans plus attendre cette décision et à mettre fin à tout acte de harcèlement à l’encontre du HRC Memorial, Memorial International, ainsi que toutes les organisations de défense des droits humains dans le pays.
L’Observatoire pour la protection des Défenseurs des droits humains (l’Observatoire) a été fondé en 1997 par l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et la FIDH. Ce programme a pour vocation d’empêcher et de remédier à des situations de répression à l’encontre des défenseur·es des droits humains. L’OMCT et la FIDH sont tous deux membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme des défenseur·es des droits humains de l’Union européenne qui a été mis en place par la société civile internationale.