Cour pénale internationale : Un projet de loi en-deçà du droit international

Suite à la présentation, ce 26 juillet en conseil des ministres, du projet de loi portant adaptation du Code pénal français à l’institution de la Cour pénale internationale (CPI), la Coalition française pour la Cour pénale internationale (CFCPI) regrette une occasion manquée de mettre la législation française en harmonie complète avec le droit international.

La CFCPI se réjouit néanmoins qu’un régime permettant de poursuivre les crimes de guerre en France soit enfin adopté. Elle appelle donc le gouvernement français à retirer la déclaration qu’il avait précédemment faite en vertu de l’article 124 du Statut de la CPI et qui empêche la Cour de connaître des crimes commis par des ressortissants français ou sur le territoire français.

Cependant alors que la France a vocation à être exemplaire notamment vis-à-vis d’autres Etats appelés à harmoniser leur droit avec le Statut de la CPI, le texte qui doit être soumis au Parlement ne tient pas compte des recommandations de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (avis du 29 juin 2006). Celui-ci s’avère incohérent et insuffisant pour permettre à la justice française de poursuivre et juger efficacement le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.

Il est pourtant essentiel d’assurer l’intégrité du droit international pénal en harmonisant notre Code pénal avec le Statut de la CPI. Cela implique d’adopter les incriminations résultant du droit international au lieu de formuler de nouvelles incriminations spécifiques à la France. En prévoyant une définition plus restrictive du génocide et du crime contre l’humanité qui exige de prouver l’existence d’un « plan concerté », la France rend la poursuite de ces crimes plus difficile.

En outre, la France se singulariserait dangereusement en déclarant prescrits au bout de 10 à 30 ans les crimes de guerre qui, selon le Statut de la Cour, sont imprescriptibles, ou encore en prévoyant des cas d’exonération de responsabilité pénale contraires au droit international (ainsi des crimes de guerre pourraient-ils être commis sous couvert d’opération de légitime défense par la France).

Enfin, la CFCPI regrette que le projet de loi ne mette pas en place pour les crimes les plus graves, touchant l’ensemble de la communauté internationale un mécanisme de compétence universelle permettant aux tribunaux français de juger un criminel étranger présent en France, alors même que ce mécanisme existe ailleurs en Europe et même en France pour les actes de torture et de terrorisme. Cette position est d’autant plus intenable et incohérente qu’il est aujourd’hui possible de poursuivre, sur le fondement des lois françaises d’adaptation des Statuts des tribunaux ad hoc pour l’ex Yougoslavie et le Rwanda, les crimes commis sur leurs territoires.

Ainsi le projet de loi, s’il était adopté en l’état, ouvrirait des espaces d’impunité allant à l’encontre des objectifs de la communauté internationale, auxquels la France a pourtant solennellement souscrit.

Contacts presse :

Amnesty International France : Marion Grassi / Tel : 01 53 38 65 41 spresse[at]amnesty.asso.fr

FIDH : Karine Appy / Tel : 01 43 55 14 12 kappy[at]fidh.org

FIACAT : Nathalie Jeannin / Tel : 01 42 80 01 60 fiacat[at]fiacat.org [1]

Sont membres de la Coalition :

Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT), Action Contre la Faim, Agir ensemble pour les droits de l’Homme, Amnesty International Section Française, Association pour les victimes de la répression en Exil (AVRE), Avocats sans frontières, Barreau de Paris, Barreau des Hauts de Seine, Centre Nord Sud du Conseil de l’Europe, CIMADE, Comité d’aide aux Réfugiés, Compagnons de la Fraternité Edmond Michelet, Confédération Nationale des Avocats, DIH - Mouvement de Protestation Civique, ELENA - réseau d’avocats sur le droit d’asile, Ensemble contre la Peine de Mort (ECPM), Fédération Internationale de l’ACAT (FIACAT), Fédération Internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), Fédération nationale des déportés et internés, résistants et patriotes, Fédération Nationale des Unions de Jeunes Avocats (FNUJA), Fondation Terre des Homme Lausanne, France Libertés, France terre d’Asile , Handicap international, Juristes sans Frontières, Justice et Paix France, Ligue des Droits de l’Homme et du Citoyen, Magistrats Européens pour la Démocratie et les Libertés , Médecins du Monde, Médecins sans Frontières, MRAP, O.I.D.B.B., Organisation Française de la Communauté Baha’ie, Reporters sans frontières, Ruptures, Solidarité avec les mères de la place de Mai (SOLMA), SOS Attentats, Survie, Syndicat de la Magistrature, Union Chrétienne des Déportés et Internés, Union pour l’Europe Fédérale, UNSA-Education.

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