Le 17 mars se tiendra une audience historique pour la lutte contre l’impunité. La Cour de cassation se réunira en assemblée plénière afin de se prononcer sur l’interprétation de la loi de compétence universelle dans deux affaires. Elles concernent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis en Syrie. Dans ces deux procédures, qui visent un ancien soldat de l’armée syrienne et l’ancien porte-parole d’un groupe armé d’obédience salafiste ayant sévi dans la Ghouta orientale, les parties civiles sont suspendues à l’arrêt qui sera rendu afin de savoir si la justice française est, ou non, compétente pour juger les crimes graves commis en Syrie depuis 2011 à l’encontre des populations civiles.
Les conséquences de cet arrêt iront bien au-delà puisque la décision rendue pourrait avoir un impact sur la moitié des enquêtes en cours devant le pôle spécialisé pour lutter contre les crimes contre l’humanité du tribunal judiciaire de Paris, et notamment sur des enquêtes qui concernent des crimes commis en Ukraine, en Libye, en Irak, ou encore au Sri Lanka. Autant de situations où des crimes internationaux sont perpétrés en totale impunité, et où la justice française constitue bien souvent le dernier espoir pour que les responsables présumés, appréhendés en France, ne restent pas impunis. Autant dire que l’avenir de la compétence universelle se jouera, en grande partie, le 17 mars.
Rappelons-le, ce mécanisme, qui permet à un juge, en l’occurrence français, de poursuivre des présumés responsables étrangers de crimes, commis à l’étranger contre des victimes étrangères, trouve sa justification dans le fait que les crimes pour lesquels cette compétence existe – dont le crime de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre – sont si graves qu’ils appellent une réponse exceptionnelle.
Un outil indispensable et complémentaire
La compétence universelle, découverte à l’occasion de l’affaire Pinochet, en 1998, lorsqu’un juge espagnol, saisi par des victimes chiliennes, avait demandé à la justice anglaise l’arrestation de l’ancien dictateur chilien à Londres, puis son extradition vers l’Espagne pour y être jugé, a depuis prospéré dans de nombreux pays européens. Elle est devenue, au fil des années, un outil indispensable et complémentaire à d’autres mécanismes de justice pénale internationale, dans le combat contre l’impunité.
A l’heure où tout le monde s’accorde à dire que la guerre en Ukraine trouve l’une de ses principales causes dans l’impunité persistante dont ont bénéficié Vladimir Poutine et son armée pour les crimes commis en Tchétchénie, en Crimée ou encore en Syrie, nous réalisons une fois encore, à l’aune de ce conflit qui vient frapper aux portes de l’Europe, à quel point la lutte contre l’impunité est un indispensable combat à mener pour prévenir la répétition de ces crimes internationaux.
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