Le Tribunal constitutionnel espagnol écarte les obstacles à l’application de la Compétence Universelle

06/10/2005
Communiqué

La décision du Tribunal Constitutionnel représente un pas considérable dans la lutte contre l’impunité des crimes contre l’humanité et une avancée extraordinaire de la justice internationale.

La Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme se félicite de la décision prise le 5 octobre 2005, par le Tribunal Constitutionnel espagnol établissant les conditions désormais nécessaires pour que la justice espagnole puisse se déclarer compétente pour juger de crimes contre l’Humanité et de génocide commis hors d’Espagne.

Dans un arrêt courageux, la plus haute instance judiciaire casse à la fois la décision de la Audiencia Nacional et du Tribunal Suprême Espagnol qui, cherchant à limiter la compétence universelle, avait conditionné l’application de la compétence universelle à l’existence cumulative de victimes de nationalités espagnoles et d’un intérêt national.

Le Tribunal Constitutionnel rappelle que le principe de compétence universelle est fondée exclusivement sur les caractéristiques particulières des crimes contre l’Humanité et du génocide, qui par leur nature, blessent non seulement les victimes de ces crimes mais également la Communauté Internationale dans son ensemble. Par conséquent, pour ces crimes, la justice espagnole est compétente, quelle que soit la nationalité des victimes, ce principe primant par ailleurs « sur l’existence ou non d’intérêts nationaux ». Au surplus, la justice internationale ne prime que sous réserve d’ineffectivité de la justice nationale, des indices sérieux et raisonnables de l’inactivité judiciaire pouvant suffire pour l’activation de la compétence universelle.

Cette décision a été prise suite au recours présenté en 1999 par le Prix Nobel de la Paix Rigoberta Menchú. Mme Menchú face à l’impunité massive et systématique des crimes commis dans son pays, le Guatemala avait demandé que la justice espagnole enquête sur le crime de génocide, perpétrés au Guatemala de 1978 à 1986. Durant cette période, environ 200 000 personnes, essentiellement des indigènes mayas ont été exécutées.

Le Tribunal Constitutionnel a estimé que la sentence du Tribunal Suprême du 25 février 2003 violait le droit de Mme Menchú « à la tutelle judiciaire effective inscrite dans la loi organique du Pouvoir Judiciaire », notamment l’article 23.4 sur les compétences universelles de la justice espagnole.

Le Tribunal Constitutionnel a également annulé une décision de l’Audience Nationale de 2000 qui avait refusé la plainte de Mme Menchú sous prétexte que « la preuve de rejet effectif de la plainte par les tribunaux guatémaltèques » n’avait pas été fournie. Le Tribunal Constitutionnel considère en effet que « des indices sérieux et raisonnables de l’inactivité judiciaire devraient suffire pour l’activation de la compétence universelle ».

Après la Cour d’arbitrage belge, une très haute instance judiciaire espagnole rejette l’application de critères restrictifs limitant l’application de la compétence universelle.

Lire la suite