La FIDH introduit un recours contre la Belgique devant le Comité européen des droits sociaux pour violation du droit au logement des gens du voyage

Les populations concernées par le recours

Le recours vise à dénoncer les violations de certains droits commises par l’Etat belge à l’encontre de la population dite des « Gens du voyage ». On vise par là des populations de culture Rom (ou Tsiganes), ainsi que certaines communautés qui ne sont pas de culture ou d’origine Rom (appelées aussi « Voyageurs »), qui ont toutes en commun de vivre, par tradition, en caravane. Leur nombre en Belgique oscillerait, d’après les estimations des associations de terrain, entre 5.000 et 10.000 personnes. A ceux-là, s’ajoutent 3.000 à 5.000 personnes qui traversent le pays pendant les mois d’été, en provenance des pays avoisinants (France, Pays-Bas, Angleterre…).
En revanche, ce recours ne concerne pas la situation des Roms qui sont totalement sédentarisés, au sens où ils vivent de manière permanente dans des logements « en dur » et ne souhaitent pas habiter en caravane. Tel est le cas, en particulier, des Roms qui ont émigré des pays d’Europe de l’Est depuis la fin de la guerre froide.

L’objet du recours :
les violations de la Charte sociale commises par l’Etat belge
En adhérant à la Charte sociale européenne, l’Etat belge s’est notamment engagé :
 à promouvoir la protection de la vie de famille, notamment en faisant en sorte d’assurer l’accès à des « logements adaptés aux besoins des familles » (article 16)
 à combattre la pauvreté et l’exclusion sociale (article 30)
 à garantir la jouissance des droits reconnus dans la Charte sans discrimination fondée notamment sur l’appartenance à une minorité (article E).

La FIDH soutient que l’Etat belge ne respecte pas ces trois engagements en ce qui concerne les gens du voyage.
En effet, le droit et les politiques du logement en vigueur en Belgique ne tiennent pas adéquatement compte des besoins des personnes habitant en caravane par tradition et, par certains aspects, pénalisent ce mode de vie. Conséquence pratique : les gens du voyage rencontrent d’extrêmes difficultés à trouver des terrains où il leur soit simplement permis de résider ou de séjourner. Cette situation les maintient dans la plus grande précarité.
Cette conclusion s’appuie sur les constats suivants :
Le nombre de terrains publics prévus par les autorités pour permettre à des gens du voyage d’y résider ou d’y séjourner - en y louant un emplacement - est clairement insuffisant. En Wallonie, en particulier, il n’existe qu’un seul terrain prévu à cet effet sur l’ensemble du territoire wallon. En Flandre, par contre, le nombre de terrains est plus élevé mais reste insuffisant.

Les gens du voyage qui tentent d’habiter sur des terrains privés qu’ils ont achetés ou loués, se voient presque systématiquement refuser le permis d’urbanisme requis.
Les gens du voyage qui ne parviennent pas à trouver des terrains (publics ou privés) où on les autorise à séjourner sont fréquemment victimes d’expulsion. Et contrairement aux personnes habitant dans des logements classiques, ils ne bénéficient d’aucune protection en cas d’expulsion : ils peuvent être expulsés sans préavis, à toute heure du jour et de la nuit, en toute saison.
Les codes du logement wallon et bruxellois ne reconnaissent pas la caravane comme un logement. En conséquence, une caravane est d’office considérée comme un logement insalubre. Autre conséquence, les gens habitant en caravane ne peuvent se prévaloir du droit au logement reconnu dans la Constitution belge.
Certaines communes refusent les demandes de domiciliation (c’est-à-dire d’inscription dans les registres de population) émanant de gens du voyage qui habitent pourtant sur leur territoire. Ces pratiques illégales sont sources de graves difficultés pour ceux qui en sont victimes : une personne non domiciliée n’est pas en règle du point de vue administratif. Cette situation l’empêche, par exemple, d’accéder à la formation professionnelle, de bénéficier d’une aide à l’emploi ou d’exercer son droit de vote.
La Charte sociale européenne
La Charte sociale européenne est un Traité international, conclu dans le cadre du Conseil de l’Europe, qui garantit des droits économiques et sociaux. Cette Charte a été conclue en 1961 et révisée en 1996. Elle a été ratifiée par la Belgique.
Le Comité européen des droits sociaux
Le Comité européen des droits sociaux est une instance du Conseil de l’Europe. Il est chargé de contrôler le respect de la Charte sociale européenne.
Depuis 1998, il a le pouvoir de recevoir des plaintes – appelées réclamations collectives – dénonçant la violation, par un Etat, des engagements qu’il a pris en adhérant à la Charte sociale européenne.

Ces plaintes peuvent être introduites par des ONGs internationales, comme la FIDH, par des syndicats ou par des organisations représentatives des employeurs.
Pour plus d’informations sur la Charte sociale et le Comité, voyez le site du Conseil de l’Europe : http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/socialcharter/default_fr.asp

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