Migrants sit on rocks and stare at the sea in Lampedusa island on October 26, 2013. There are currently three navy vessels on patrol, along with six coast guard patrol boats and six border guard patrol boats, as well as helicopters and planes from each of the three agencies patrolling the area as part of the new 'Mare Nostrum' surveillance and rescue operation, launched after more than 400 migrants drowned in two disasters earlier this month. Nearly 800 refugees were rescued off Sicily in several operations as European leaders grapple with the issue of illegal immigration at a European Union summit.

Trois migrants éthiopiens portent plainte contre plusieurs pays de l'Otan après leur naufrage.

AFP PHOTO /Filippo MONTEFORTE

La marine belge coupable de crime de guerre? Trois Éthiopiens ayant survécu au naufrage de leur embarcation après avoir quitté la Libye en guerre en mars 2011 à bord d'un canot, ont déposé plainte mardi 26 novembre à Bruxelles pour faire établir la responsabilité de la Belgique et d'autres pays de l'Otan dans ce drame ayant coûté la vie à 63 personnes.

Publicité

Agés aujourd'hui de 15, 21 et 25 ans, les trois jeunes hommes, travailleurs migrants dans la Libye de Mouammar Kadhafi, font partie des neuf rescapés sur les 72 personnes qui avaient pris place dans un zodiac de dix mètres pour fuir le conflit.

L'embarcation de fortune, partie de Tripoli dans la nuit du 26 au 27 mars 2011, devait en principe rallier l'île italienne de Lampedusa en une vingtaine d'heures mais s'est retrouvée à cours de carburant dès le lendemain. Le bateau pneumatique se trouvait alors à mi-chemin, dans une zone placée depuis un mois sous surveillance par des pays de l'Otan, chargés de faire respecter un embargo décrété par les Nations unies.

Survolés par des hélicoptères mais jamais secourus

Pris de panique, les migrants ont contacté par téléphone satellitaire, dans la soirée du 27 mars, un prêtre italien d'origine érythréenne, Mussie Zerai, qui a lui-même averti les gardes-côtes italiens, selon le texte de la plainte. Ceux-ci ont alors relayé un signal "d'alerte maximale", qui sera répété toutes les quatre heures pendant dix jours, destinés aux "forces militaires italiennes, françaises, belges, espagnoles, britanniques, canadiennes et américaines qui se trouvaient à proximité de l'embarcation à la dérive", a expliqué le père Zerai lors d'une conférence de presse à Bruxelles.

Alors que les passagers, parmi lesquels se trouvaient 20 femmes et deux bébés, mouraient les uns après les autres, ils ont été survolés "quatre ou cinq fois" par un hélicoptère, qui leur a largué quelques vivres, et par un avion, qui les a pris en photo, ont expliqué des survivants, cités par la Fédération internationale des Ligues des Droits de l'Homme (FIDH). Un navire militaire s'est même approché à "une dizaine de mètres" de l'embarcation, selon le témoignage d'un survivant. Mais aucun bâtiment n'est venu à leur secours et le zodiac a continué à dériver avant finalement d'accoster le 10 avril sur la côte libyenne, avec seulement 11 personnes en vie, dont deux mourront peu après. D'après la description des rescapés, le navire qui s'était approché pourrait être le Narcisse, un chasseur de mines belge placé sous commandement de l'Otan.

Une plainte pour crime de guerre

C'est la raison pour laquelle les trois jeunes Éthiopiens, qui vivent actuellement aux Pays-Bas et en Australie, ont introduit une plainte avec constitution de partie civile mardi devant un juge d'instruction bruxellois. "Déposée contre X pour crime de guerre et non-assistance à personnes en danger, elle vise en fait les hauts responsables de la marine belge et le commandant du bateau", qui ont omis d'intervenir, a expliqué l'avocate des plaignants, Véronique van der Plancke.

Des plaintes similaires ont été déposées depuis 2012 en France, en Espagne et en Italie, mais elles n'ont jusqu'ici pas abouti à des actes concrets. Des demandes d'information ont aussi été adressées aux Etats-Unis, au Canada, au Royaume Uni et à l'Otan, mais elles sont là aussi restées globalement lettre morte, selon Katie Booth, une responsable de la FIDH. "Les survivants ne demandent pas une indemnité mais que justice soit faite. Pour que de tels drames ne se reproduisent plus et ils se produisent encore, il faut que les responsabilités des uns et des autres soient clarifiées et que l'Union européenne revoie sa politique d'asile et d'immigration", a-t-elle estimé.

Publicité