Un an de mobilisation populaire pour l’indépendance du pouvoir judiciaire et l’Etat de droit

07/03/2008
Communiqué

Genève-Paris, le 7 mars 2008. Conclusions préliminaires d’une mission d’enquête de l’Observatoire pour la Protection des Défenseurs des Droits de l’Homme (un programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme - FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture - OMCT) sur les atteintes à l’indépendance du pouvoir judiciaire, aux droits fondamentaux et sur la situation des défenseurs des droits de l’Homme au Pakistan.

Le 9 mars 2008 marque l’anniversaire d’un mouvement historique sans précédent de mobilisation populaire contre les atteintes faites par le pouvoir exécutif au pouvoir judiciaire au Pakistan.

Le 9 mars 2007 le président de la Cour suprême, Iftikhar Mohammad Chaudhry, était démis de ses fonctions par le Président Pervez Musharraf, notamment pour avoir demandé au pouvoir exécutif de déférer des personnes disparues et de produire les éléments à charge les concernant. La suspension arbitraire et contraire à la Constitution du haut magistrat suscitait un mouvement de protestation mené par les juges, les avocats et la société civile réclamant à l’unisson le respect de l’indépendance de la magistrature, garante des libertés individuelles et des droits fondamentaux.

Sous la pression de la rue, le chef de la plus haute juridiction du pays était restauré en juillet 2007. Mais le 3 novembre 2007, refusant de nouveau de prêter serment sur l’Ordonnance provisoire constitutionnelle (Provisional Constitutional Order - PCO) décrétée par le Président Musharraf et modifiant la Constitution, il était arrêté et assigné à résidence. A ce jour, le Chief Justice Chaudhry ainsi que sa famille sont toujours maintenus illégalement en résidence surveillée. 59 autres magistrats ont été démis de leurs fonctions pour avoir également refusé de prêter allégeance au PCO.

L’état d’urgence, les arrestations sommaires et arbitraires qui se sont multipliées depuis le 3 novembre 2007, la politique répressive menée par Pervez Musharraf n’ont pas réussi à intimider le peuple pakistanais. Celui-ci, en désavouant le pouvoir en place lors des élections législatives du 18 février 2008, a manifesté sa quête de démocratie, son attachement aux droits fondamentaux et à l’état de droit.

La mission effectuée par l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme du 24 février au 3 mars 2008 confirme que la situation des droits de l’Homme et des défenseurs de ces droits dans le pays s’est considérablement détériorée ces dernières années : systématisation des disparitions forcées, généralisation des attaques contre la population civile au cours de rassemblements populaires, ou dans le cadre d’opérations militaires, répression des mouvements revendiquant la reconnaissance de leurs identités, en particulier au Balouchistan, détérioration de la condition de la femme, discrimination des minorités religieuses, restrictions à la liberté de la presse, persécutions, arrestations sommaires et arbitraires des défenseurs des droits de l’homme, figurent parmi les violations les plus flagrantes relevées par la mission.

Nombre de ces atteintes sont commises sous couvert de la lutte contre le terrorisme, avec le soutien actif des Etats-Unis. L’immixtion de cette puissance étrangère au Pakistan contribue de façon significative à la détérioration de la situation des droits fondamentaux dans la région.

Au regard de cette situation, l’Observatoire demande :
 la libération immédiate du Chief Justice Chaudhry et de sa famille ;
 le retour au sein de leurs juridictions des juges démis de leurs fonctions ;
 de garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de tous les défenseurs des droits de l’Homme pakistanais et de mettre un terme à toute forme de harcèlement à leur encontre ;
 le respect de l’indépendance de la magistrature, garante des libertés individuelles et des droits fondamentaux.

L’Observatoire demande enfin aux institutions issues des élections du 18 février 2008 d’œuvrer à l’instauration d’un Etat de droit au Pakistan, notamment par :
 la protection des droits fondamentaux ;
 le respect de la mission des défenseurs des droits de l’homme, en conformité avec la Déclaration des Nations unies de 1998 sur les défenseurs ;
 la non discrimination, en particulier fondée sur le sexe ou la religion ;
 la liberté d’expression.

Pour plus d’informations, prière de contacter :
OMCT : Delphine Reculeau, + 00 41 22 809 49 39
FIDH : Gael Grilhot, + 00 33 1 43 55 25 18

Lire la suite