Maldives : la révocation arbitraire de deux juges menace l’indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs

19/05/2025
Déclaration
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Handout / Mihaaru / AFP

La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et son organisation membre, le Maldivian Democracy Network (MDN), font part de leur inquiétude concernant la récente décision du Parlement de révoquer deux juges de la Cour suprême, vraisemblablement dans le but d’empêcher la révision juridique d’un amendement clé de la Constitution maldivienne adopté en novembre dernier. Cette action représente une menace sérieuse pour l’indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs aux Maldives et crée un dangereux précédent dans un pays où la démocratie et l’état de droit sont menacés.

19 mai 2025. Le 11 mai 2025, le Judiciary Committee of the Majlis, le Parlement maldivien, a voté la révocation de deux juges de la Cour suprême, Azmiralda Zahir et Mahaz Ali, à la suite d’une enquête expéditive de la Judicial Service Commission (JSC), un organe prévu par la constitution et chargé de superviser le pouvoir judiciaire. Cette enquête ainsi que les actions du Judiciary Committee sont préoccupantes, car elles ne respectent pas les règles de procédure, notamment le refus du JSC de considérer les preuves fournies pour la défense des juges, le refus du Comité judiciaire d’accorder aux juges un droit de réponse, et le secret des décisions. En effet, la décision du Comité judiciaire a été prise à huis clos, malgré la demande des juges d’une audience publique.

Les deux juges avaient été suspendu·es le 26 février 2025 par le JSC. Un autre juge, Husnu Al Suood, avait lui aussi été suspendu le même jour avant d’abandonner ses fonctions en signe de protestation le 4 mars. La suspension a été décidée à la suite d’une réunion extraordinaire du JSC, en l’absence des membres représentant le pouvoir judiciaire. Le JSC a déclaré que cette décision avait été prise en vertu de la section 25(p) du Judicial Service Commission Act, une disposition légale entrant fondamentalement en contradiction avec le principe du respect des procédures de droit.

La suspension puis la révocation de ces trois juges de la Cour suprême interviennent dans le cadre des travaux prévus de révision du sixième amendement de la Constitution. Promulgué en novembre 2024, cet amendement disposant que les parlementaires qui changeraient d’affiliation politique seront démis de leurs fonctions a été proposé et voté par le Parlement avant d’être ratifié par le président moins de 36 heures plus tard. L’ancien parlementaire Ali Hussain a ensuite demandé à ce que cet amendement soit examiné par la Cour suprême, et les audiences préliminaires ont été tenues le 17 février 2025. Les trois juges ont été suspendu·es quelques minutes avant le début d’une audience devant surseoir à l’application de cet amendement.

La FIDH et le MDN rappellent au gouvernement et aux membres du Parlement des Maldives que la Constitution protège les juges des révocations injustes, conformément aux normes internationales. Or, ces garde-fous constitutionnels ont été ouvertement ignorés par le JSC et le Parlement. De tels agissements doivent être fermement dénoncés par les partenaires internationaux des Maldives, dont l’Union européenne, qui doivent exhorter le gouvernement des Maldives à respecter l’état de droit et à garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire en annulant ces révocations.

La FIDH et le MDN appellent aussi le Parlement des Maldives à amender la section 25(p) du Judicial Service Commission Act afin de garantir le droit à une procédure équitable et le droit à la présomption d’innocence dans les enquêtes visant des membres du pouvoir judiciaire.

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