Trois opposants au gouvernement arrêtés arbitrairement et détenus incommunicado

06/06/2016
Communiqué
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(Paris) Les autorités laotiennes doivent relâcher immédiatement et sans condition les trois individus qui ont été arrêtés arbitrairement et sont détenus incommunicado pour avoir critiqué le gouvernement, ont indiqué aujourd’hui la FIDH et son organisation membre, le Mouvement Lao pour les Droits de l’Homme (MLDH).

"La répression qu’exerce systématiquement le gouvernement sur tout forme pacifique de dissidence témoigne de l’immense fossé qu’il existe entre les promesses faites par Vientiane à la communauté internationale et les actions violentes qu’elle mène dans le pays. Il est temps pour les gouvernements étrangers et les donateurs de lever leur voix contre les violations des droits de l’Homme et d’exiger de Vientiane qu’elle change ses pratiques."

Karim Lahidji, Président de la FIDH

Ms. Lodkham Thammavong, 30 ans, et MM. Somphone Phimmasone, 29 ans et Soukan Chaithad, 32 ans, ont été arrêtés en mars 2016, après leur retour de Thaïlande, le 18 février 2016. Ces trois personnes sont rentrées au Laos pour demander le renouvellement de leur passeport afin de pouvoir retourner en Thaïlande et obtenir les documents nécessaires pour travailler légalement.

Le 5 mars 2016, Lodkham et Somphone, qui travaillaient à Bangkok, respectivement comme employée de maison et agent de sécurité, ont été arrêtés par la police, au domicile de la famille de Lodkham, à Ban Vang Tay Village situé dans le district de Nong Bok, dans la province de Khammuan. Ils ont d’abord été emprisonnés dans la prison provinciale de Khammuan, dans la ville de Tha Khaek, puis ont tous les deux été transférés, début mai 2016, dans une prison inconnue à Vientiane. Soukan, qui travaillait à Bangkok comme chauffeur livreur, aurait été arrêté, quant à lui, le 22 mars 2016 au siège du Ministère de la Sécurité Publique (‘’Ko Po So“), dans la ville de Savannakhet, où il s’est rendu pour demander son passeport.

Le 25 mai 2016, la chaine de télévision nationale a diffusé le placement en garde à vue de Lodkham, Somphone, et Soukan dans le Bureau Central de Police à Vientiane. Les journaux ont annoncé qu’ils avaient été arrêtés pour avoir mis en danger la sécurité nationale en ternissant la réputation du gouvernement sur les réseaux sociaux pour. Il n’est impossible de savoir de quand date la vidéo montrant Somphone, Lodkham et Soukan et le sort de ces personnes reste inconnu.

L’arrestation de Lodkham, Somphone et Soukan est liée à leurs critiques répétées à l’encontre du gouvernement lao alors qu’ils travaillaient en Thaïlande. Ils ont posté de nombreux messages sur Facebook dénonçant la corruption, la déforestation et les violations aux droits de l’homme. Le 2 décembre 2015, Lodkham, Somphone et Soukan ont participé à la manifestation contre leur gouvernement qui s’est tenue devant l’ambassade du Laos à Bangkok, regroupant trentaine de personnes.

"Il est extrêmement préoccupant de savoir que Lodkham, Somphone et Soukan purgeront vraisemblablement plusieurs années enfermés dans les prisons terrifiantes du Laos pour avoir dénoncé la situation effroyable des droits de l’Homme et l’absence de bonne gouvernance dans le pays. Les autorités doivent révéler le sort réservé à ces personnes et les relâcher immédiatement et sans condition."

Vanida Thephsouvanh, Présidente du MLDH

L’arrestation arbitraire de dissidents pacifiques n’est pas un phénomène nouveau dans l’histoire récente du Laos. Le 26 octobre 1999, la police a arrêté cinq membres du Mouvement Etudiant Lao pour la Démocratie (MELD) à Vientiane, Ms.Thongpaseuth Keuakoun, Sengaloun Phengphanh, Bouavanh Chanhmanivong, Khamphouvieng Sisa-at, et M. Keochaypour avoir préparé des manifestations pacifiques appelant à la démocratie, à la justice sociale et au respect des droits de l’Homme. Ces cinq personnes ont été condamnées à 20 ans de prison pour avoir « troubler l’ordre public et avoir menacé la sécurité nationale ». Deux d’entre eux, Thongpaseuth et Sengaloun, sont toujours détenus en isolement dans la prison de Samkhe à Vientiane. Khamphouvieng est mort en septembre 2001 dans la prison de Samkhe, suite à la privation de nourriture et l’exposition prolongée à la chaleur. A ce jour, le sort de Bouavanh et Keochay demeure inconnu bien que le gouvernement Lao affirme avoir relâché Keochay après qu’il ait purgé sa peine en 2002 et l’avoir transféré « à des tuteurs chargés de l’éduquer plus avant pour qu’il devienne un bon citoyen. »

Reste inconnu également, le sort des neuf autres activistes – deux femmes, Kingkeo et Somchit, et sept hommes, Soubinh, Souane, Sinpasong, Khamsone, Nou, Somkhit, et Sourigna – qui ont été emprisonnés en novembre 2009 pour avoir planifié de participer à des manifestations pro-démocratiques à Vientiane.

Parmi les cas cites ci-dessus, beaucoup constituent des cas de disparitions forcées. L’Article 2 de la Convention International pour la Protection de toutes les Personnes contre les Disparitions Forcées (ICPPED) définit les disparitions forcées comme « l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi. » Malgré la signature de de l’ICPPED le 29 septembre 2008, la convention n’a toujours pas été ratifiée par le Laos.

La FIDH et le MLDH réitèrent leur appel et demandent au gouvernement Lao de procéder à des investigations rapides, approfondies et impartiales sur tous les cas de disparitions forcées et, de traduire en justice les responsables de ces crimes. Les deux organisations exhortent le gouvernement lao a accéléré leurs investigations sur la disparition forcée du leader proéminent de la société civile Sombath Somphone, qui a été vu pour la dernière fois à un poste de contrôle de police dans une rue animée de Vientiane, le soir du 15 décembre 2012.

Le 23 juin 2015, lors de son second Examen Périodique Universel (EPU), le Laos a rejeté l’ensemble des huit recommandations appelant à examiner toutes les allégations de disparitions forcées dans le pays et les qualifiant comme « contraires à la vérité ». Le gouvernement reconnait la disparition de Sombath, mais n’a accepté que quatre des dix recommandations appelant à investiguer sur sa disparition.

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