le Tribunal de Première Instance sanctionne les dérives de la lutte contre le terrorisme

Le tribunal de première instance des Communautés européennes a annulé, le 23 octobre 2008, la décision du Conseil de l’Union européenne maintenant l’Organisation des Moudjahidines du Peuple d’Iran (OMPI) sur la liste des organisations terroristes.

« La FIDH se félicite du contrôle juridictionnel exercé par le Tribunal sur les décisions du Conseil de l’Union européenne. Les décisions rendues dans cette affaire témoignent de l’importance d’un tel contrôle, qui permet de remédier à certaines dérives de la lutte contre le terrorisme en Europe », a déclaré Souhayr Belhassen, Présidente de la FIDH.

Dans son arrêt, le Tribunal a tout d’abord reconnu que le Conseil, dans le cadre d’une nouvelle procédure d’information des organisations visées par les listes de sanction, respectait les droits de la défense et son obligation de motivation des sanctions.

Sur le fond, le tribunal juge en revanche que le Conseil n’a pas retenu d’éléments suffisamment probants pour justifier les sanctions. Cette motivation n’expose pas en effet les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles le Conseil a considéré qu’il fallait maintenir l’OMPI sur la liste.

La FIDH rappelle à cette occasion qu’en juin 2003, une instruction a été ouverte contre l’OMPI en France. Tout en se refusant de porter un jugement sur le fond du dossier, la FIDH s’inquiète de la durée de la procédure d’instruction dans ce dossier. Elle considère par ailleurs, à l’instar de la Ligue des droits de l’Homme et du citoyen (France) que, si la section anti-terroriste a des preuves dans ce dossier, elle doit les communiquer aux avocats des parties.

Rappel :

Par une décision du 2 mai 2002, le Conseil de l’UE avait inclus l’OMPI dans la liste des personnes et entités dont les fonds doivent être gelés dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. L’OMPI a introduit un recours devant le Tribunal de première instance des communautés contre ces décisions. Dans un arrêt rendu le 12 décembre 2006, le Tribunal a annulé la décision ordonnant le gel de fonds de l’OMPI aux motifs que cette décision n’était pas motivée, qu’elle avait été adoptée dans le cadre d’une procédure au cours de laquelle les droits de la défense n’avaient pas été respectés et que le Tribunal lui-même n’était pas en mesure de procéder au contrôle juridictionnel de la légalité de cette décision.

Depuis l’arrêt de décembre 2006, le Conseil envoie aux organisations concernées une notification et une motivation des raisons justifiant leur présence sur la liste des groupes terroristes, ainsi qu’un certain nombre de documents du dossier. L’OMPI a ainsi été mise en mesure de faire valoir utilement son point de vue au sujet des éléments retenus à sa charge.

Après plusieurs échanges de lettres entre le Conseil et l’OMPI, le 28 juin 2007, le Conseil a décidé de maintenir l’OMPI sur la liste. Le 20 décembre 2007, puis le 15 juillet 2008, cette décision a été renouvelée.

En parallèle, au Royaume-Uni, le 30 novembre 2007, la Proscribed Organisations Appeal Commission (POAC) a fait droit à un recours contre la décision du Home Secretary refusant de lever la proscription de l’OMPI en tant qu’organisme impliqué dans le terrorisme. Elle lui a ordonné de retirer l’organisation de la liste des organisations proscrites. La demande du Home Secretary visant à être autorisé à introduire un pourvoi devant la Court of Appeal contre la décision de la POAC a été rejetée le 7 mai 2008. Le 24 juin 2008, le Parlement du Royaume-Uni a par conséquent retiré l’OMPI de la liste nationale des organisations proscrites.

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