Cessez d’utiliser des méthodes répressives ; ouvrez la porte à l’aide humanitaire pour les victimes du tremblement de terre en Iran !

28/08/2012
Communiqué
en fa fr

Shirin Ebadi & Karim Lahidji :

Cessez d’utiliser des méthodes répressives ; ouvrez la porte à l’aide humanitaire pour les victimes du tremblement de terre en Iran !

Samedi, 25 août 2012,

Shirin Ebadi, prix Nobel de la paix, et Karim Lahidji, vice-président de la FIDH et président de la LDDHI, ont annoncé dans un communiqué conjoint : “Deux semaines après le tremblement de terre dans l’Azerbaïdjan iranien, les autorités de la République Islamique d’Iran continuent de mener une politique du silence et du secret. Elles n’ont pas rendu publics les véritables chiffres des pertes humaines, la liste des villages et des logements démolies ou encore celle des dégâts financiers. De plus, elles n’ont pas su fournir l’aide d’urgence requise pour la population. La situation n’a fait qu’empirer depuis que les autorités ont envoyé les Gardiens de la révolution islamique dans la zone sinistrée, établissant ainsi le règne de la terreur et de l’intimidation en arrêtant de nombreux activistes civiques et des bénévoles, et en essayant de perturber le travail de personnes dédiées à aider nos compatriotes victimes du séisme.”

Deux semaines se sont écoulées depuis le tremblement de terre dans l’Azerbaïdjan iranien au nord-ouest de l’Iran. Des centaines de personnes ont perdu la vie, de nombreux villages ont été totalement détruis et des dizaines d’autres ont été gravement endommagés. Les autorités refusent de publier les statistiques précises du nombre de victimes, ne se rapportant qu’à une estimation de 252 à 318 décès. Des sources officieuses ont toutefois estimé les pertes humaines à 1500-1600 personnes, voire plusieurs milliers.

Depuis le tremblement de terre, les autorités ont essayé d’imposer des restrictions sur l’aide aux victimes apportée par des bénévoles locaux et les organisations non gouvernementales, et ont été incapables de subvenir à leurs besoins. De plus, en déployant les Gardiens de la révolution et en confisquant l’aide collectée par les particuliers, elles ont perturbé le flux de l’aide humanitaire aux victimes du séisme. Le gouvernement bloque les comptes bancaires de personnes privées ouverts pour aider les victimes. Des assistants sociaux spécialisés dans l’aide à l’enfance, ainsi que les psychologues qui se sont rendus dans la région sinistrée pour aider la population ont été forcés de partir suite aux menaces provenant des services de sécurité et des services de renseignement de la capitale provinciale Tabriz, ainsi que de la ville d’Ahar. Les Gardiens de la révolution ont fouillé les camions et d’autres véhicules et confisqué une partie des dons privés.

Les victimes du tremblement de terre ont un besoin urgent en nourriture, médicaments, assistance médicale et soins psychiatriques. Le manque de personnel médical et d’infirmières accroît les possibilités de propagations de maladies infectieuses, notamment le choléra. Les sinistrés des régions affectées par le tremblement de terre se sont plaints de la mauvaise distribution de l’aide alimentaire par les Gardiens de la révolution, qui auraient stocké l’aide reçue. De même, les représentants du Croissant Rouge ont fait face à des obstacles de la part des Gardiens de la révolution dans le cadre de leurs fonctions. Certaines victimes témoignent du favoritisme affiché de la part des fonctionnaires d’État envers certaines familles lors de la distribution de l’aide.

Par le passé, la corruption généralisée des autorités et leur incapacité à fournir de l’assistance, allant même jusqu’à détourner l’aide fournie par les ONG et les organismes internationaux, ont fait perdre la confiance du public qui n’a pas oublié. Lors des tremblements de terre du Rudbar (nord ; 1990), Ardebil (nord-ouest ; 1996), Bam (sud ; 2003) et également auparavant à Tabas (est ; 1978) et Bo’een Zahra (130 km à l’ouest de Téhéran ; 1962), la plupart des groupes ’patriotes’, civiques et sociaux ainsi que les activistes politiques qui bénéficiaient de la confiance du public, se sont empressés de porter secours aux victimes.

Cette fois ne fait nulle exception. Les activistes civiques et autres compatriotes se sont empressés de venir en aide aux victimes du séisme. Toutefois,les autorités essayent de garder le monopole de l’aide aux sinistrés et n’hésitent pas à déployer les forces de sécurité et l’armée pour arriver à leurs fins. Ces derniers jours, les Gardiens de la révolution ont utilisé la force et des véhicules anti-émeutes pour arrêter de nombreux bénévoles ainsi que des activistes sociaux et civiques qui se sont rendus dans la zone pour aider les populations immédiatement après le séisme. Bien que certains détenus ont été libérés vendredi 24 août, un nombre encore important de personnes restent détenues. Certains ont été condamnés à de longues peines de prison par le passé pour leurs activités pacifiques dans le secteur social et celui des droits humains. Parmi eux, M Navid Khandhani (dont la condamnation à 12 ans a été maintenue après appel), M Vahed Kholousi (condamné à 5 ans de prison), et M. Esmaeil Salmanpour (condamné à 1 an de prison) encourent le risque d’être envoyés en prison pour y servir leur peine. Le bloggeur Hossain Ronaghi-Maleki sert une peine de 15 ans de prison, alors qu’il avait été libéré sous caution pour raisons médicales. Il vient d’être transféré à la prison de Tabriz.

Les autorités de la République Islamique d’Iran doivent :

 immédiatement libérer et sans condition tous les bénévoles humanitaires et autres activistes sociaux/civiques encore détenus.

 reconnaître qu’ils ne jouissent pas de la confiance du peuple dans cette situation, et cela en arrêtant d’utiliser les formes variées de pression et de répression telles que les Gardiens de la révolution, et permettre aux activistes civiques et sociaux de venir en aide aux victimes du séisme.

Shirin Ebadi, Prix Nobel de la Paix

Karim Lahidji, vice-président de la Fédération Internationale des ligues des Droits de l’Homme (FIDH) et président de la Ligue Iranienne de Défense des Droits de l’Homme (LDDHI)

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