Inde : des organisations de droits humains appellent à la libération de Khurram Parvez après un an de détention arbitraire

24/11/2022
Déclaration
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Sameena Mir / Creative Commons

21 novembre 2022 - Les organisations soussignées demandent la libération immédiate et inconditionnelle du défenseur des droits humains cachemiri Khurram Parvez, qui a été arrêté il y a un an, le 22 novembre 2021, pour des accusations de terrorisme et d’autres accusations à motivation politique.

Khurram Parvez, coordinateur de la Coalition de la société civile du Jammu-Cachemire (Jammu Kashmir Coalition of Civil Society - JKCCS) et président de la Fédération asiatique contre les disparitions involontaires (Asian Federation Against Involuntary Disappearances - AFAD), est depuis plus de 20 ans une figure éminente du plaidoyer, de la documentation et des enquêtes sur les questions relatives aux droits humains, notamment dans la région du Jammu-et-Cachemire.

Le 22 novembre 2021, l’organisme antiterroriste indien, l’Agence nationale d’investigation (National Investigation Agency - NIA), a effectué une descente au domicile et au bureau de M. Parvez pendant environ 14 heures, saisissant son ordinateur portable, son téléphone portable et des livres, ainsi que ceux de membres de sa famille. Il a ensuite été convoqué pour un interrogatoire au bureau de la NIA où il a été arrêté sur la base d’un rapport de première information déposé par la NIA le 6 novembre 2021. La note d’arrestation indiquait que M. Parvez était inculpé en vertu du Code pénal indien et de la loi sur la prévention des activités illégales (Unlawful Activities Prevention Act - UAPA), la loi antiterroriste abusive de l’Inde, qui complique la libération sous caution. Plus précisément, il a été accusé de "conspiration criminelle", "d’avoir mené ou tenté de mener une guerre, ou d’avoir encouragé la conduite d’une guerre, contre le gouvernement indien", de "punition pour conspiration visant à mener une guerre contre le gouvernement indien", de "collecte de fonds pour des activités terroristes", de "punition pour conspiration", de "recrutement d’une ou plusieurs personnes pour la commission d’un acte terroriste", d’"infraction relative à l’appartenance à une organisation terroriste" et d’"infraction de collecte de fonds pour des organisations terroristes". En mai 2020, des experts de l’Organisation des nations unies (ONU) ont fait part de leurs inquiétudes concernant diverses dispositions de l’UAPA qui ne sont pas conformes au droit et aux normes internationales en matière de droits humains.

Les autorités indiennes ont ciblé à plusieurs reprises Khurram Parvez pour son travail en faveur des droits humains, dans le but de le réduire au silence et d’intimider les autres défenseurs des droits humains. Au fil des années, la NIA et d’autres organismes chargés de l’application des lois l’ont accusé de "mener des activités sécessionnistes et séparatistes" dans la région et ont effectué des descentes à son domicile et dans ses bureaux. En 2016, les autorités lui ont interdit de se rendre en Suisse pour assister à la session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, puis l’ont emprisonné pendant 76 jours en vertu de la loi sur la sécurité publique du Jammu-et-Cachemire (Public Safety Act - PSA). En décembre 2021, des experts de l’ONU ont exhorté les autorités indiennes à cesser de cibler M. Parvez.

Le 13 mai 2022, après 173 jours de détention, la NIA a déposé un acte d’accusation préliminaire devant le tribunal spécial de la NIA à New Delhi contre M. Parvez et a déclaré qu’elle allait poursuivre l’enquête sur cette affaire. Selon le communiqué de presse publié par l’agence le 13 mai 2022, la NIA accuse M. Parvez de "diriger un réseau de travailleurs au sol de [l’organisation militante armée basée au Pakistan] Lashkar-e-Taiba (LeT) pour faire avancer les activités du LeT et commettre des attaques terroristes en Inde". Depuis lors, sa détention a été prolongée au moins cinq fois par le tribunal spécial de la NIA à New Delhi en vertu de la section 43D(2)(b) de l’UAPA, qui permet de prolonger la période de détention jusqu’à 180 jours si l’organisme d’enquête n’est pas en mesure de terminer les investigations sur une affaire dans un délai de 90 jours.

Cela fait maintenant un an que M. Parvez est en détention. Sa détention arbitraire s’inscrit dans une longue liste de violations des droits humains commises par les autorités indiennes à l’encontre de défenseurs des droits humains, d’organisations de la société civile, de journalistes et de militants au Jammu-et-Cachemire. Au lieu de faire en sorte que les responsables de ces violations rendent des comptes, les autorités ont ciblé et arrêté ceux qui ont dénoncé ces violations et demandé justice. Les autorités indiennes ont également réprimé la liberté des médias et coupé l’accès à Internet pour étouffer les manifestations pacifiques et restreindre l’accès à l’information. Cela a eu un effet délétère, restreignant encore davantage l’espace civique dans une région qui fait déjà face à une répression croissante de la dissidence depuis que le Parlement indien a révoqué le statut autonome spécial du Jammu-et-Cachemire en août 2019.

Les autorités indiennes doivent libérer M. Parvez immédiatement et sans condition, et toutes les charges retenues contre lui doivent être abandonnées, car elles constituent des représailles pour son action pacifique en faveur des droits humains. Les défenseurs des droits humains doivent être protégés, et non persécutés. Les autorités indiennes doivent cesser de criminaliser le travail des défenseurs des droits humains et mettre fin à toutes les tentatives visant à les réduire au silence et à les intimider, ainsi que les autres voix critiques du gouvernement. Les autorités indiennes doivent plutôt s’attacher en priorité à mettre fin à l’impunité pour les violations des droits humains que les défenseurs des droits humains ont courageusement documentées et dénoncées, en particulier dans l’État de Jammu-et-Cachemire, et veiller à ce que ces derniers puissent travailler dans un environnement sûr et favorable sans crainte de représailles.

Contacts presse :

Pour Amnesty International : press@amnesty.org
Pour CIVICUS : media@civicus.org
Pour FORUM-ASIA : communication@forum-asia.org
Pour Human Rights Watch : Hrwpress@hrw.org
Pour la FIDH : rlopoukhine@fidh.org
Pour Stichting the London Story : advocacy@thelondonstory.org
Pour l’OMCT : ij@omct.org

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