Ces pratiques, menées depuis des années, ont conduit à des expropriations forcées et des déplacements de population qui relèvent de crimes contre l’humanité. Ces nouvelles preuves ont été compilées par l’avocat Richard J. Rogers, partenaire de Global Diligence et ont été soumises au nom des victimes, avec le soutien de la FIDH.
« Ces éléments apportent une nouvelle fois la preuve que ces pratiques d’accaparement de terre peuvent être considérées comme crimes contre l’humanité. Il est donc urgent que la Procureure de la CPI agisse en ouvrant une enquête préliminaire » a déclaré Karim Lahidji, président de la FIDH.,
La frénésie d’accaparement des terres s’est accélérée en 2014, faisant plus de 60 000 nouvelles victimes au premier trimestre de 2015. On estime qu’aujourd’hui, ce sont plus de 830 000 personnes qui ont été victimes de ces pratiques d’accaparement des terres depuis l’an 2000.
Un très grand nombre de victimes a été exproprié de force et évincé de leur foyer, sans compensation adéquate, ou ont souffert d’autres formes de persécution. Un très grand nombre d’entre elles vivent aujourd’hui dans des conditions épouvantables, dans des camps de réinstallation, où le manque de nourriture et les maladies sont monnaie courante.
L’année dernière, à travers le monde, 40 organisations de la société civile travaillant sur les questions liées à la terre avaient demandé à la CPI de se saisir du dossier. Elles déclaraient alors « nous avons le devoir de protéger les victimes d’accaparement de terres et d’expropriations forcées qui n’ont aucune chance d’obtenir justice dans leur propre pays ». Plus de 7000 Cambodgiens ont également exprimé leur souhait, à travers une pétition, de voir la Procureure de la CPI enquêter sur ces accusations.
« Cette communication offre à la Procureure de la CPI une occasion unique de confirmer le rôle crucial du droit pénal international dans la protection des populations contre les expropriations forcées en temps de paix » a déclaré Richard J. Rogers, avocat des victimes.
Cette communication démontre par ailleurs comment les crimes liés aux activités d’accaparement des terres ont un impact disproportionné sur les femmes qui doivent assumer une responsabilité double : celle d’élever leurs enfants et celle de contribuer aux revenus de la famille. La perte de terres entraîne, pour les femmes, une plus grande exposition à la violence, à l’exploitation et au chômage. Les femmes ayant manifesté contre ces pratiques d’accaparement des terres ont été brutalement réprimées et emprisonnées sans jugement.
« La violence dont sont victimes les femmes et les nombreuses épreuves qu’elles doivent affronter ont des effets dramatiques sur leur vie, tant au niveau privé qu’au niveau public » a ajouté Karim Lahidji. « Du jour au lendemain, les femmes se retrouvent sans moyen de subsister, au sein de communautés où les tensions sont grandissantes et courent le risque de représailles de la part des autorités dès qu’elles dénoncent de telles pratiques ».
Une première communication avait été déposée par nos organisations au bureau de la Procureure de la CPI en octobre 2014. Elle apportait la preuve que de hauts dirigeants du gouvernement cambodgien, des forces de sécurité et des hommes d’affaires proches du gouvernement avaient organisé des attaques contre la population civile, avec le double objectif de s’enrichir et de conserver le pouvoir, quel qu’en soit le prix.
Contexte :
Le Cambodge a ratifié les Statuts de la CPI le 11 mars 2002, reconnaissant ainsi la juridiction de la CPI sur les crimes commis sur son territoire ou par ses citoyens à compter du 1er juillet 2002.
Cette Communication Supplémentaire a été transmise au procureur de la CPI par Maître Richard J. Rogers, avocat associé du Cabinet Global Diligence LLP, au nom des victimes et avec le soutien de la FIDH. Elle apporte des éléments supplémentaires à ceux figurant dans la première Communication qui avait été transmise le 7 octobre 2014.
Après analyse de ces communications, et conformément à l’Article 15 des Statuts de la CPI, il revient au Procureur de la CPI de décider de l’ouverture d’une enquête préliminaire pour crimes contre l’humanité.
Les défenseurs des droits de l’Homme investis sur les questions de droit foncier sont de plus en plus la cible de mesures de répression, comme l’indique le rapport annuel de l’Observatoire pour la protection des droits de l’Homme.