Le Vénézuela : un pays en crise exponentielle et dans l’oubli

02/07/2020
Communiqué
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(Caracas, París) — La FIDH ainsi que PROVEA, l’organisation qui au Vénézuela en est membre, publient aujourd’hui un document de position lançant l’alerte quant à l’aggravation de la crise humanitaire dans le pays avec l’arrivée du Covid-19, parmi tant d’autres raisons. La situation du Vénézuela demeure extrêmement négligée et invisible, paradoxalement en conséquence de la pandémie mondiale elle-même. L’appui de la communauté internationale s’avère maintenant indispensable, non seulement comme moyen de dépasser la crise humanitaire mais aussi la crise politique.

La FIDH et PROVEA, aux côtés de la société civile vénézuelienne, estiment que la gravité de la crise humanitaire qui sévit au Vénézuela et le fait que les droits les plus essentiels de tous les vénézuéliens ne soient pas assurés méritent davantage, et non pas moins, de communication, de transparence et de coopération internationale pour travailler dans le sens d’un soulagement et d’une prompte solution. C’est pourquoi elles lancent un appel au gouvernement dans le but qu’il revoit sa décision d’expulser l’ambassadrice de l’Union européenne au Vénézuela.

La pandémie due au Covid-19 est arrivée au Vénézuela dans un contexte caractérisé par des aspects fondamentaux : l’existence d’une urgence humanitaire complexe aggravée par les sanctions économiques imposées par les États-Unis, ce qui a conduit a une migration forcée massive de la population, et un gouvernement exerçant de fait le pouvoir de façon autoritaire, en restreignant les libertés et en accroissant les contrôles sociaux et la répression.

Le document de position ci-joint (ES) attire l’attention sur la gravité de cette crise, sur son intensification sous l’effet de la pandémie, sur les mesures de quarantaine mises en œuvre et comment ces mesures-là ont été utilisées par le gouvernement de Nicolás Maduro pour accentuer le contrôle social et politique à l’égard de la population vénézuélienne.

Les conséquences de la crise économique sont dévastatrices. Pénurie de denrées de base, inflation croissante et perte du pouvoir d’achat associé aux salaires entre autres avantages socio-économiques de millions de travailleurs. Actuellement le salaire minimum au Vénézuela équivaut à moins de 5 dollars, c’est-à-dire moins de 20 cents de dollar par jour, bien en dessous du seuil de pauvreté. En février 2020, le Programme alimentaire mondial a indiqué que plus de neuf millions de vénézuéliens ne pouvaient pas accéder aux aliments, bien que disponibles dans le pays, à cause de l’hyperinflation. Soixante pourcent de la population a été contrainte de couper les portions de nourriture. Une personne sur trois a du mal à mettre de la nouriture sur sa table et à consommer les minimas nutritionnels nécessaires. Quatre foyers sur dix pâtissent des coupures de courant et d’eau. Quatre foyers sur dix éprouvent des interruptions quotidiennes d’électricité et 72% ont un approvisionnement irrégulier en gaz.

Se greffant sur tout ceci, la stigmatisation a augmenté au même titre que les attaques et la criminalisation des défenseurs des droits humains, y compris de journalistes, depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire le 13 mars dernier, en suivant un modèle de persécution et de harcèlement à l’encontre des personnes qui sont critiques envers le gouvernement.

La désinstitutionalisation de l’État vénézuélien, la corruption, l’endettement et la diminution des ressources se sont traduits par une crise des services publics sans précédents dans l’histoire du Vénézuela.

Qui plus est, les mesures de confinement dans d’autres pays ont elles aussi touché le monde du travail et les vénézuéliens migrants. Si bien que nombreux d’entre eux entreprennent le chemin du retour dans une situation de vulnérabilité élevée et constituent la population qui présente un risque accru de contagion au COVID-19, tandis que les familles qui comptaient sur les envois de fonds pour faire face à leurs dépenses courantes assistent au recul ou même à la disparition de leurs revenus.

Une crise économique et sociale d’une telle ampleur, il faut le dire clirement, a pu se prolonger autant d’années compte tenu du caractère autoritaire et irresponsable du gouvernement de Nicolás Maduro.

Dans un tel contexte complexe, le document que nous publions aujourd’hui demande à la communauté internationale de déployer plusieurs actions dont : maintenir les efforts diplomatiques pour promouvoir une issue négociée, pacifique, démocratique et constitutionnelle pour la crise politique vénézuélienne et faire en sorte que l’Union européenne soutienne et réactive les initiatives du Groupe international de contact (GIC) afin de répondre urgemment aux régressions que se produisent et qui empêchent la tenue d’élections libres et transparentes.

Aussi elles prient instamment le gouvernement de fait à fournir pour la gestion de la pandémie des informations techniques, véridiques et de façon transparente, émanant du débat avec les parties prenantes scientifiques et les personnels de santé spécialisés, tout en s’abstenant de poursuivre les dirigeants syndicaux, les journalistes et les défenseurs des droits de l’Homme qui rapportent d’une manière indépendante la situation du pays.

L’urgence humanitaire complexe du Vénézuela ne fait que s’accentuer sous l’effet du Covid-19 (ES)
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