Perou : toute adhésion à l’OCDE doit être conditionnée au respect de l’état de droit et des droits humains

25/03/2025
Communiqué
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Klebher Vasquez / ANADOLU / Anadolu via AFP
  • La Fédération Internationale pour les Droits Humains (FIDH) ainsi que ses organisations membres au Pérou ont présenté une note de plaidoyer auprès de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), détaillant les problèmes en matière de gouvernance, de corruption et de droits humains qui font obstacle au Pérou dans son parcours vers l’OCDE.
  • Le Pérou est plongé dans une profonde crise politique et institutionnelle qui dure depuis 2016 et persiste jusqu’à aujourd’hui. Les organisations signataires dénoncent un contexte national marqué par un recul en matière de droits du travail et de protection de l’environnement.
  • En mars 2025, l’adoption de la loi anti-ONG, constitue un des exemples de dérive contre l’état de droit, la société civile et la coopération internationale.

Paris et Lima, 25 mars 2025. La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), en collaboration avec ses organisations membres au Pérou, la Asociación Pro Derechos Humanos (Aprodeh) et Perú Equidad, ainsi que la Plateforme de la société civile sur les entreprises et les droits humains au Pérou et OCDE Watch, ont présenté une note de plaidoyer (voir pièce jointe) à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), afin d’exposer leurs préoccupations et de lui demander de conditionner l’entrée du Pérou à l’OCDE au respect significatif, rapide et opportun de chacune des recommandations formulées.

« Le processus d’adhésion à l’OCDE représente une opportunité unique pour renforcer les institutions démocratiques péruviennes et garantir le respect des droits humains, du travail et de l’environnement. Dans un contexte de recul démocratique mondial, il est essentiel que l’OCDE maintienne fermement ces valeurs et principes », a déclaré Gloria Cano, Directrice de l’Asociación Pro Derechos Humanos (Aprodeh) et secrétaire générale de la FIDH.

Le Pérou est plongé dans une profonde crise politique et institutionnelle qui dure depuis 2016 et persiste encore aujourd’hui. Cette crise est également le résultat de schémas structurels de discrimination, de racisme et d’exclusion sociale touchant de larges secteurs vulnérables de la population. Ces schémas se sont reflétés dans la violence et la répression institutionnelle suite à la prise de pouvoir par la coalition dirigeante – dirigée par Dina Boluarte – en décembre 2022. La répression et l’usage de la force policière ont fait 67 mort·es dans les premiers mois du gouvernement. La FIDH et Aprodeh ont demandé à la CPI d’ouvrir une enquête pour crimes contre l’humanité concernant 49 de ces meurtres.

En outre, la situation des droits du travail au Pérou reste critique : des secteurs stratégiques tels que l’exploitation minière et l’agro-exportation ont été particulièrement touchés, avec des travailleur·ses confronté·es à des conditions d’exploitation extrêmes, à l’absence de sécurité sociale et à des obstacles systématiques à la négociation collective. De même, la détérioration de l’environnement au Pérou représente un autre défi majeur, le déversement de pétrole sur le littoral péruvien en 2022, rapporté par la FIDH et ses organisations membres, étant un exemple du manque d’engagement de l’État en matière de justice environnementale et de l’impunité des entreprises responsables.

Le Pérou se trouve dans une zone grise entre démocratie et autoritarisme, loin de l’idéal démocratique prôné par l’OCDE. L’OCDE promeut des valeurs et priorités essentielles telles que la préservation des libertés individuelles, la démocratie, l’état de droit, la protection des droits humains, l’égalité entre les genres et la durabilité environnementale.

Dans ce contexte, Enrique Fernández Maldonado, coordinateur de Pérou Equidad, affirme qu’ « il est essentiel que l’État péruvien démontre par des actions normatives et politiques qu’il adhère aux principes de l’OCDE. Cependant, à ce jour, ces actions sont loin de garantir une gouvernance publique transparente, ni le respect effectif des droits fondamentaux. »

Actuellement, le Pérou s’éloigne considérablement des critères minimaux exigés par l’OCDE. Le démantèlement des contre-pouvoirs, l’attaque contre le pouvoir judiciaire ou l’adoption de la loi anti-ONG, sont des véritables coups portés à la société civile et à la coopération internationale.

Face à cette situation, les organisations appellent les Comités techniques de l’OCDE et les États membres à prendre en compte ces carences et à conditionner l’admission du Pérou jusqu’à ce que des réformes substantielles soient mises en place pour garantir l’alignement avec les valeurs et principes de l’OCDE.

Les organisations signataires poursuivront leur travail de surveillance et d’alerte et remercient les États membres et l’OCDE pour leur ouverture à ce que d’autres voix soient entendues.

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