À Guerrero au Mexique, des autorités inefficaces et discriminatoires face au phénomène grave de disparitions de femmes et de jeunes filles

IDHEAS

Le Mexique et l’État de Guerrero, font face à une explosion de la violence basée sur le genre, crise qui est intrinsèquement liée à la perpétuation d’une culture patriarcale et sexiste. Entre 2018 et 2022, 17 000 femmes ont été victimes de féminicides. Actuellement 26 952 femmes sont portées disparues dans le pays.

Genève, Suisse / Mexico, Mexique. 11 septembre 2023. La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), Litigio estratégico en derechos humanos (Idheas) et l’Equipo mexicano de antropología forense (Emaf), présentent un rapport au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, avec l’assistance technique de Justice rapid response (JRR).

Le rapport, rédigé dans le cadre du groupe de travail précédant la 88e session du Comité, est basé sur une mission d’enquête menée dans l’État du Guerrero. Il dénonce la violation de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Cedef) par l’État mexicain en ce qui concerne les disparitions de femmes et de jeunes filles dans cet État.

La situation dans l’État de Guerrero illustre la gravité des crimes commis contre les femmes et les filles

Dans un contexte de crime organisé et de guerre contre le trafic de drogues dans le pays, l’État de Guerrero affiche des taux alarmants de violences basées sur le genre. Actuellement, au Guerrero, 712 femmes sont portées disparues. En 2022, le Guerrero a enregistré un nombre record de 123 plaintes déposées pour violence basée sur le genre, 106 viols et 554 plaintes pour violence conjugale.

Cependant, le phénomène des disparitions de filles et de femmes au Guerrero manque de visibilité aux niveaux régional, national et international, ce qui se traduit par une situation d’impunité presque totale.

« Il est crucial de rappeler que la disparition des filles et des femmes est enracinée dans un contexte d’extrême violence et d’insécurité, lié à la montée en puissance des groupes criminels organisés et au système patriarcal », déclare Diana Palencia, directrice de l’Idheas.

Les informations recueillies au cours de la mission mettent en lumière l’ampleur du phénomène de disparition des femmes au Guerrero. Cette gravité se traduit par un taux élevé de disparition, une diversité des zones géographiques où elles se produisent et une diversité des causes de disparition (traite, prostitution forcée et exploitation, entre autres).

Impunité, désinformation et inefficacité des institutions

Les éléments recueillis pendant la mission démontrent l’impunité qui règne dans la région. En plus de 60 ans, il n’y a pas eu une seule condamnation pour la disparition d’une fille ou d’une femme au Guerrero, uniquement un mandat d’arrêt pour la disparition d’une femme.

Dans de nombreux cas, les autorités agissent de manière discriminatoire à l’égard des victimes, en tenant des propos sexistes auprès de leur famille et en les rendant responsables des crimes commis à leur égard.

« Au Guerrero, il règne une double situation de violence, les femmes disparaissent en raison de leur genre et, de plus, sont stigmatisées et revictimisées par les autorités qui manquent de formation sur les droits des victimes et les questions de genre. Cela perpétue une situation de sexisme et d’impunité presque totale », explique Jimena Reyes, directrice de la FIDH pour les Amériques.

Un autre élément qui entrave la quête de justice dans les cas de disparitions au Guerrero et dans tout le pays est la crise des investigations médico-légales. Les pratiques et procédures employées sont contraires aux normes nationales et internationales en matière d’exhumation, de récupération, de conservation, d’identification des corps. La notification faite aux familles des victimes et la remise des dépouilles sont elles aussi prises en défaut.

Issa Hernández Herrera, responsable du programme de la société civile, Justice Rapid Response, assure « nous continuerons à soutenir les organisations de la société civile, qui contribuent au bon fonctionnement de la justice internationale et promeuvent les droits des victimes et de leurs familles ».

Violations de la Cedef

Le rapport soumis au comité CEDEF démontre, entre autres, que l’État mexicain ne met pas en place des mesures suffisantes pour prévenir et sanctionner les violences basées sur le genre, y compris les disparitions et la traite des femmes et des filles, et pour renverser une culture patriarcale et sexiste dans le pays. Les autorités se rendent également coupables de discriminations et violent le droit au recours et l’accès à la justice.

Le rapport complet est disponible en anglais ci-dessous :

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