En vertu du Code de procédure pénale du Honduras, la sentence en question aurait dû être prononcée dans les cinq jours qui ont suivi le jugement oral. Or, près d’un an après, cela n’est toujours pas le cas. Cette situation constitue une violation du droit à un procès équitable, instruit dans un délai raisonnable, ainsi que du droit à contester ladite résolution dans les délais prévus par la loi.
La décision historique a confirmé que David Castillo avait joué un rôle décisif comme coauteur de l’assassinat de la leader lenca et qu’il faisait partie d’une structure de pouvoir à laquelle appartient également l’entreprise Desarrollos Energéticos S.A. (DESA) et ses dirigeant·es. Bien qu’une enquête ait été ouverte il y a plus de cinq ans, aucune procédure, ni poursuite à l’encontre des acteurs clés de cette structure n’a été engagée. Par ailleurs, durant le procès, des témoignages ont été produits concernant différents délits annexes, mais cela n’a donné lieu à aucune enquête. La sentence devrait favoriser l’ouverture d’une enquête approfondie à l’encontre de tou·tes les auteur·es des crimes afin qu’ils soient jugés en bonne et due forme.
Des pourvois ont été portés en cassation par les auteur·es direct·es de l’assassinat de Berta Cáceres en 2019 ayant fait l’objet d’une condamnation – parmi lesquels figurent un ex-militaire, des cadres moyens de l’entreprise hydroélectrique DESA et des tueurs en série –. La Mission rappelle que cet appel n’a pas encore été tranché par la Chambre pénale de la Cour suprême de justice. L’affaire reste donc à ce jour sans caractère définitif.
Cette insécurité juridique compromet le respect d’une procédure régulière, le droit à obtenir réparation à hauteur des préjudices et la garantie de non-répétition des faits pour les victimes, qui se retrouvent dans une situation de vulnérabilité et sans pouvoir obtenir justice.
La Mission souligne que le respect des principes et des normes garantissant un procès équitable est essentiel, afin que le procès contribue de manière crédible et durable à l’obtention de la vérité et de la justice pour le meurtre de Berta Cáceres, mais également afin de permettre le renforcement du système judiciaire comme instrument de défense des droits humains de la population hondurienne. Dans cette perspective, la Mission a relevé tout au long du procès différentes circonstances qui révèlent les faiblesses structurelles du système et constituent des obstacles et des difficultés d’accès à la justice pour la population. Cela inclut :
– l’absence de règlement rapide des recours ;
– l’absence d’enquête sur l’auteur moral à l’origine des faits ;
– la limitation des droits des victimes.
L’assassinat de Berta Cáceres est un traumatisme pour sa famille, le COPINH et les communautés autochtones de Río Blanco, mais également pour le pays tout entier et la communauté internationale. Les enseignements tirés durant ces cinq ans de procédures judiciaires doivent servir pour protéger les défenseur·es des droits humains, les droits des peuples autochtones et des communautés œuvrant pour la défense de leurs territoires.
L’État du Honduras doit garantir une justice totale et d’avancer sur la voie d’une société basée sur le respect des droits des peuples autochtones et des droits humains. L’engagement de poursuites, l’instruction du procès et la condamnation des responsables direct·es et moraux·les du crime est une obligation et une nécessité pour l’État afin de garantir la justice, l’établissement des faits, ainsi que des faits similaires ne se répéteront pas. Las organisations expertes de la Mission d’observation dans l’affaire Berta Cáceres continueront à réclamer justice pour la mémoire de Berta.