Haïti : Quels lendemains pour une transition manquée

07/11/2005
Rapport

Paris, Port-au-Prince, le 8 novembre 2005 - A un mois de la tenue annoncée du premier « round » des élections générales en Haïti, la FIDH publie un rapport d’enquête sur les deux ans d’administration du gouvernement de transition et de présence de la Mission des Nations unies en Haïti (MINUSTAH) à partir de faits recueillis entre août 2004 et août 2005.

Le gouvernement de transition n’a pas été en mesure de répondre aux multiples défis posés par une société haïtienne meurtrie par des décennies de graves et systématiques violations des droits de l’Homme, appauvrie, fracturée socialement et au sein de laquelle tous les services de l’État sont en situation de total délabrement.

Au terme de deux ans de transition, le pays semble toujours à la dérive et au bord du chaos social : l’insécurité reste généralisée, l’impunité est patente, la corruption est généralisée, 60 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, la décentralisation est restée lettre morte, la tenue des élections dans les délais initiaux pose des problèmes structurels qui seront difficiles à surmonter pour aboutir à des élections libres et pluralistes, d’autant qu’elles vont se dérouler dans un contexte d’insécurité majeure ; on a vu aussi que la mise
sur pied d’une réflexion nationale pour un nouveau contrat social reste dans une large mesure une coquille vide, tout comme la question du désarmement qui dans les faits demeure extrêmement limité. Enfin, la professionnalisation de la police, les enquêtes sur les violations des droits de l’Homme passées et présentes, et le respect des droits fondamentaux ne progressent pas malgré les efforts affichés.

En effet, les violations des droits de l’Homme continuent d’être le fait d’une police dont les membres responsables de violations des droits de l’Homme n’ont pas été mis à pied mais aussi et surtout résultent des acteurs multiformes à l’origine d’une insécurité galopante ; les groupes de Chimères sont toujours actifs tout comme les anciens militaires et les groupes mafieux en quête de pouvoir. La FIDH considère, en outre, que la lutte contre l’impunité est très largement insuffisante et ne répond pas aux espoirs et aux besoins de justice du peuple haïtien comme en témoignent la présentation en septembre 2005 d’un projet de décret d’amnistie générale ou la libération de Louis Jodel Chamblain en août 2005.

La FIDH estime qu’un certain nombre d’obligations de l’État ne sont pas remplies : garantir le droit à la vie, à l’intégrité physique et morale, à ne pas être privé abusivement de sa liber té, à un procès juste et équitable, à la santé, à un logement décent, au travail, à un niveau de vie suffisant. Les violations des droits des femmes persistent.

Quant aux interventions de la communauté internationale, elles n’ont pas empêché la situation politique, économique et sociale de se dégrader. Le bilan de la mission de la MINUSTAH --- rétablir la sécurité et préparer les élections --- n’est pas probant même si les blocages et l’état de déliquescence des structures étatiques (notamment la police et l’administration de la justice) ne peuvent être sous-estimés dans ce bilan négatif. Dans ce contexte la tenue des élections reste un défi posé aux Haïtiens et à la communauté internationale.

La FIDH publie en conclusion du rapport un certain nombre de recommandations au gouvernement haïtien et à la communauté internationale afin que soient engagées les réformes nécessaires à l’établissement de l’État de droit et au respect des libertés publiques et individuelles en Haïti.

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