Haïti : Pour une reconstruction basée sur les droits de l’Homme

29/03/2010
Communiqué

Conclusions préliminaires d’une mission d’enquête de la FIDH en vue de la Conférence des donateurs du 31 mars 2010

La Fédération Internationale des ligues des Droits de l’Homme (FIDH) qui s’est rendue en Haïti du 17 au 28 Mars 2010, et les organisations haïtiennes de défense des droits humains qui en sont membres, le Centre Œcuménique des Droits Humains (CEDH), le Comité des Avocats pour le Respect des Libertés Individuelles (CARLI) et le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), souhaitent, suite à cette mission, et à la veille de la Conférence des donateurs, souligner les aspects suivants :

La FIDH et ses organisations membres sont conscientes de toutes les difficultés qu’éprouvent, tant les autorités haïtiennes, que les organisations inter gouvernementales présentes sur place qui ont, elles aussi, été durement frappées par le séisme. Néanmoins, un réel effort de communication et d’information à la population de la part des autorités nationales est nécessaire.

Au moment où des décisions d’engagements financiers considérables vont être prises, tout doit être fait pour éviter que ne se répétent les déceptions et les frutrations du passé devant des promesses non tenues. Pour que les moyens offerts puissent constituer des leviers de changement, la FIDH et ses membres haïtiens, attachés à la défense, au respect et à la promotion de la dignité et des droits humains, demandent avec urgence et insistance :

1.Que des mesures, et donc des moyens correspondants, soient prises pour mettre fin aux conditions de vie indigne des personnes déplacées vivant dans des camps. Selon l’OCHA, le nombre de personnes déplacées suite au tremblement de terre s’élèverait à 1,9 millions. Leurs droits fondamentaux doivent être au centre des politiques de relogement et/ou de relocalisation. Les organisations appellent à ce que les indicateurs proposés par le Rapporteur spécial sur les personnes déplacées et l’Expert indépendant sur Haïti constituent une feuille de route pour guider les efforts dans ce domaine [1].

2.Que l’objectif à court et moyen terme soit d’assurer la sécurité humaine des personnes sinistrées :
sécurité contre toute forme de violence. Les populations les plus vulnérables (femmes, enfants, personnes âgées) doivent être particulièrement protégées.
sécurité psychologique pour les milliers de personnes traumatisées.
A cette fin, les projets de reconstruction devront s’attacher, notamment, à une reprise rapide du fonctionnement de la justice qui devra, entre autres, établir dans les plus brefs délais des actes de décès. Le processus de reconstruction doit être encadré par les règles d’un État de Droit ;

3.Que le plan de reconstruction prévoie une réforme rapide et adéquate du cadastre [2], qui contribuera à une reprise rapide et durable des activités économiques du pays et est nécessaire pour l’accomplissement des droits économiques, sociaux et culturels de la population haïtienne. Cette mesure renforcera la sécurité alimentaire qui ne doit plus exclusivement dépendre de l’extérieur mais reposer sur des moyens accrus accordés aux paysans haïtiens.

4.Que la reconstruction implique, à tous les niveaux, la population haïtienne, y compris sa force de travail.

5.Que, conformément aux recommandations de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), les dettes d’Haïti, qui s’élèvent à plus d’un milliard envers les créanciers multilatéraux, soient annulées [3] . Dans le cas contraire, tel que l’annonce la CNUCED, Haïti serait rapidement plongée dans une crise financière en raison du poids de sa dette extérieure.

6.Que les orientations et les mécanismes de mise en œuvre des plans de reconstruction et de développement soient élaborés dans la transparence et en concertation avec l’ensemble des forces vives de la nation, incluant les différents secteurs sociaux et les organisations de défense des droits humains haïtiennes. En dépit des consultations annoncées dans le cadre de la Conférence Internationale des donateurs [4], les organisations haïtiennes de défense des droits humains déplorent n’avoir pas été consultées sur le plan de reconstruction qui sera présenté lors de la Conférence des donateurs qui se tiendra à New York le 31 mars prochain.

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