Coronavirus : les États d’Amérique Latine doivent apporter une réponse adéquate et proportionnée à la crise sanitaire

20/03/2020
Communiqué
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Le 11 mars, l’Organisation mondiale de la santé a déclaré que le coronavirus Covid-19 était désormais considéré comme une pandémie. La FIDH en appelle à la responsabilité des chefs d’État pour assurer la sécurité sanitaire de leurs populations.

Face à la fragilité du système de santé dans certains pays d’Amérique latine, la FIDH considère qu’il est essentiel que les gouvernements prennent les mesures nécessaires et efficaces pour préserver le droit à la santé en accordant une plus grande attention aux populations les plus vulnérables.

La FIDH rappelle que des mesures limitant les libertés individuelles peuvent être prises temporairement pour lutter contre la pandémie à la seule condition qu’elles soient justifiées et qu’elles s’exercent que dans la stricte mesure nécessaire. Elles ne doivent pas mettre en danger les populations vulnérables et ne doivent pas se poursuivre après la crise.

L’Amérique latine en est au début de l’épidémie, pourtant la FIDH est déjà particulièrement inquiète des premières mesures prises par certains pays de la zone.

Au Nicaragua, nous regrettons profondément que le gouvernement ignore ostensiblement les recommandations de l’OMS sur la distanciation sociale en encourageant les rassemblements publics. Par exemple, le samedi 14 mars, le gouvernement nicaraguayen a appelé à une marche « Amour au temps du Covid 19, marchons comme un peuple qui a la foi et l’espérance » (en référence au roman de Gabriel Garcia Marquez L’amour au temps du choléra) et actuellement, bien que reconnaissant l’existence d’un cas, il continue d’appeler à des manifestations, dont un "Desfile de celebración del 40 aniversario de la Gran Cruzada Nacional de Alfabetización" le 23 mars.

Au Brésil, la FIDH est préoccupée par le fait que le gouvernement de Jair Bolsonaro minimise et n’ait pas pris les mesures concrètes nécessaires pour combattre le virus. En outre, il y a eu des révoltes dans les prisons de l’État de São Paulo, provoquées par la restriction des sorties temporaires due au Covid-19. Le pays a la troisième plus grande population carcérale du monde avec plus de 758 000 personnes privées de liberté. Nous invitons au gouvernement brésilien à prendre des mesures qui puissent préserver la santé des Brésiliens.

Au Honduras, malgré les dispositions du décret exécutif PCM 021 de 2020 autorisant le déplacement pour acheter de la nourriture et l’ouverture des magasins de premières nécessités, un grand nombre de supermarchés ont été fermés, ainsi que des banques, des stations-service et l’accès aux transports publics. Dans ces conditions : où trouver de quoi se nourrir ? Selon les informations recueillies par la FIDH, le quartier populaire El Carrizal à Tegucigalpa, où tous les commerces d’alimentation ont été fermés, a été particulièrement touché par ces mesures. Cette situation conduit à une précarité inacceptable pour la population la plus défavorisée qui n’a aucun moyen d’accéder à la nourriture. Le même décret impose en effet aux forces de l’ordre d’arrêter toute personne circulant en dehors des exceptions établies.

Toujours au Honduras, la FIDH exprime son inquiétude quant à la loi dite « d’accélération économique contre le Coronavirus » votée le 13 mars par le Congrès national qui accorde la possibilité de dépenser jusqu’à 420 millions de dollars sans appel d’offre pour lutter contre le Coronavirus. Cela s’inscrit dans le contexte de graves scandales de corruption impliquant des membres des pouvoirs exécutif et législatif : des mécanismes de contrôle et de suivi pour vérifier comment ces ressources seront dépensées, sont nécessaires.

Au Venezuela, l’agent de santé Julio Molino, a été arrêté le 18 mars à Maturín pour avoir réalisé une vidéo dans laquelle il demandait le respect de la loi sur la prévention et les conditions de travail (dite loi Lopcymat) au Venezuela. La FIDH appelle à sa libération et rappelle que les médecins, les infirmières et les autres membres des centres de santé doivent disposer des conditions et des instruments nécessaires à leur travail et ne pas être intimidés.
En Amérique latine, une grande partie de la population travaille dans le secteur informel et le fait de rester chez elle signifie une suppression immédiate de ses revenus. Les gouvernements imposant des mesures de confinement doivent s’occuper rapidement de ces populations et ne pas les laisser dans le dénuement.

Enfin, nous appelons la communauté internationale à soutenir les pays d’Amérique latine dont les systèmes de santé publique et de sécurité sociale sont fragiles et à veiller à ce que les droits humains soient au cœur des plans d’urgence et ne soient pas utilisés pour réprimer les populations latino-américaines.

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