Chili : décision historique en faveur des victimes de la dictature de Pinochet

Karinna Fernández

La décision de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) représente une victoire dans la lutte contre l’impunité des oppresseur·es partisan·es de Pinochet. Cette avancée majeure servira également d’exemple régional et international en matière de réparation pour les victimes des régimes autoritaires et de sanction des coupables.

San José, 26 septembre 2024. Dans un arrêt historique, la CIDH a condamné l’État du Chili dans l’affaire Vega González et al. c. Chili. L’arrêt porte sur 14 procédures pénales concernant des exécutions et des disparitions forcées, constitutives de crimes contre l’humanité, perpétrées pendant la dictature chilienne.

L’arrêt condamne l’application par la Cour suprême de justice du Chili du recours à la « prescription graduelle », par laquelle il a été décidé d’atténuer les peines prononcées à l’encontre des responsables de crimes contre l’humanité, ce qui a ouvert la voie à une réduction des peines et a permis la mise en liberté de nombre de ces responsables.

34 ans après la fin de la dictature civile et militaire de Pinochet, ce jugement est un symbole et un exemple de la lutte pour la justice, non seulement pour les cinq personnes assassinées de manière extrajudiciaire et les 44 disparu⋅es pendant les années de répression et de persécution, mais aussi pour leurs familles. Les groupes représentés dans cet arrêt sont l’Agrupación de familiares de detenidos desaparecidos, l’Agrupación de familiares de ejecutados políticos et l’Agrupación de familiares de detenidos de Parral.

En effet, la Cour a ordonné à l’État chilien de revoir et/ou d’annuler les réductions de peines résultant de l’application non conventionnelle de la demi-prescription, dans les affaires examinées dans cet arrêt. Cela signifie que les peines des responsables de ces crimes doivent être augmentées et que par conséquent ils·elles doivent être arrêté·es.

L’État, dans un délai raisonnable, doit également adapter son système juridique interne afin que la figure de la demi-prescription ou de la prescription graduelle de la peine ne soit en aucun cas applicable aux crimes contre l’humanité et aux violations graves des droits humains. L’État est tenu d’appliquer le contrôle de conventionnalité jusqu’à ce que cette modification soit effectuée.

Enfin, la Cour a également reconnu la souffrance des victimes face à l’impunité des membres du régime de Pinochet qui, après avoir été condamnés pour crimes contre l’humanité, ont reçu des peines disproportionnellement légères.

Karinna Fernández, avocate représentante de l’affaire, se félicite de la reconnaissance par la CIDH des victimes en quête de justice et l’importance de la proportionnalité de la peine par rapport aux graves violations des droits humains.

Jimena Reyes, responsable du bureau Amériques de la FIDH, souligne que c’était un honneur d’accompagner les proches des personnes disparues et exécutées pendant la dictature d’Augusto Pinochet. Pendant 50 ans, ils⋅elles se sont battu⋅es sans relâche pour que la vérité soit connue sur ces crimes horribles et pour que les responsables soient puni⋅es. Ce jugement est un pas de plus vers la garantie de la non-répétition de la violence représentée par la dictature. Elle félicite également les avocates Karinna Fernández et Magdalena Garcés qui depuis 25 ans représentent ces victimes devant les tribunaux chiliens et le système interaméricain.

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