Procès des commanditaires de l’assassinat de João Canuto de Oliveira Les Sans-terre et leurs défenseurs dans l’Etat du Pará

Le 23 mai 2003, deux propriétaires terriens ont été déclarés
coupables de l’assassinat en 1985 de João Canuto de Oliveira,
président du syndicat des travailleurs ruraux de Rio Maria, dans
l’Etat du Pará, et condamnés à 19 ans et 10 mois de prison, par le
tribunal de jury de Bélem.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de
l’Homme, programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT, le Centro de
Justiça Global (Brésil) et le Barreau des Hauts de Seine (France),
avaient mandaté des observateurs au procès, et publient ce jour un
rapport de mission d’observation judiciaire intitulé " Procès des
commanditaires de l’assassinat de João Canuto de Oliveira - Les Sans-
terre et leurs défenseurs dans l’Etat du Pará ".

La tenue de ce procès, considérée comme une étape sans précédent dans
la lutte contre l’impunité au Brésil, avait été saluée par de
nombreux observateurs et avait été accompagnée d’une très forte
mobilisation populaire, notamment à l’initiative de la Commission
pastorale de la terre. Dans un Etat où les assassinats de
responsables syndicaux et de paysans sont récurrents - plus de 400
morts dans la région depuis 1985, dont deux fils de João Canuto et
d’autres responsables syndicaux -, et restent pour la plupart
impunis, ce procès et la décision rendue sont en effet une victoire.

Toutefois, en vertu de la Loi Fleury (1973), selon laquelle un
condamné primaire peut être laissé en liberté pendant les délais de
recours, les condamnés ont été laissés en liberté. Cette décision du
juge n’était pas obligatoire. Il apparaît d’ailleurs que la justice a
fait preuve de partialité dans des cas similaires, favorisant
l’impunité à l’égard de puissants propriétaires terriens. Alors que
des témoins de l’affaire sont menacés et que les procédures de
recours sont généralement extrêmement longues, cette décision fait
planer un doute sur la volonté des autorités brésiliennes de rendre
cette décision effective.

Le 12 novembre 2003, le dossier a été remis à la Juge d’appel du
tribunal du Pará, Albania Lobato Bemerguy, qui doit depuis
transmettre son rapport au Tribunal de Bélem. Force est de constater
que, dix mois après le procès, les condamnés sont toujours en
liberté.

Par ailleurs, la violence vis-à-vis des travailleurs ruraux dans le
Sud et Sud-Est du Pará continue : le 7 février 2004, le syndicaliste
Ribamar Francisco dos Santos, coordinateur de la politique agraire du
Syndicat des Travailleurs Ruraux (Sindicato de Trabalhadores Rurais -
STR) de Rondón do Pará, 47 ans, marié, père de 3 enfants, fut
assassiné. Presque deux mois après l’assassinat, la police n’a
toujours pas identifié les responsables du crime.

Depuis l’assassinat de Ribar dos Santos, plusieurs autres
syndicalistes du STR recoivent de multiples menaces de mort.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de
l’Homme, le Centro de Justiça Global et le Barreau des Hauts de Seine
demandent aux plus hautes autorités
brésiliennes de veiller à ce que les recours des condamnés soient
jugés dans les plus brefs délais, dans le plein respect des principes
d’égalité et d’impartialité, afin que
ceux-ci exécutent leur peine de façon effective. Une telle décision
constituera une preuve véritable de l’engagement du Brésil en faveur
de la lutte contre l’impunité.

Nos organisations demandent également aux autorités brésiliennes de
prendre les mesures nécessaires afin de garantir l’intégrité physique
et la sécurité des témoins à
charge mentionnés dans le rapport, ainsi que, plus généralement, de
se conformer aux principaux instruments régionaux et internationaux
relatifs aux droits de l’Homme
ratifiés par le Brésil.

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