Vers un recul de l’impunité ?

12/08/2003
Rapport

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme se félicite que la voix des victimes de la dictature militaire en Argentine (de 1976 à 1983) et des ONG de droit de l’Homme commence enfin à être entendue en Argentine.

Vendredi 25 juillet, le Président de la République d’Argentine, Nestor Kirchner a abrogé un décret de l’ancien président, Fernando de la Rua, portant refus automatique de toute demande d’extradition de criminels se rapportant à la période de la dictature militaire.

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme se félicite que la voix des victimes de la dictature militaire en Argentine (de 1976 à 1983) et des ONG de droit de l’Homme commence enfin à être entendue en Argentine.

Vendredi 25 juillet, le Président de la République d’Argentine, Nestor Kirchner a abrogé un décret de l’ancien président, Fernando de la Rua, portant refus automatique de toute demande d’extradition de criminels se rapportant à la période de la dictature militaire.

Grâce à cette abrogation le gouvernement français a pu demander officiellement le vendredi 8 août dernier, au Ministère des affaires étrangères argentin l’extradition de l’ancien tortionnaire argentin, Alfredo Astiz, condamné en France par contumace en 1990 à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’assassinat de deux religieuses françaises, Alice Domon et Léonie Duquet.

Le même jour, le juge argentin Rodolfo Canicoba Corral a autorisé la détention provisoire d’un civil et de 45 ex-militaires, dont certains anciens dirigeants de la junte, sollicitée par le juge espagnol Garzón, dans le cadre de procédures diligentées en Espagne à l’encontre de ces derniers pour tortures, terrorisme et génocide sur des citoyens espagnols, pendant la dictature. Dans les 40 jours après sa demande de détention provisoire, l’Espagne devrait solliciter l’extradition des 46 tortionnaires argentins.

La FIDH souligne qu’il est indispensable que les 43 personnes arrêtées (3 sont toujours en liberté), depuis le 25 juillet 2003, demeurent détenues ou assignées à résidence, jusqu’à l’acceptation de la demande officielle espagnole d’extradition. En effet, le risque de fuites et de disparitions en cas de libération provisoire, ne doit pas être sous estimé.

La FIDH se félicite par ailleurs que le gouvernement argentin ait décidé de déposer, dans les prochains jours, auprès du secrétariat général des Nations Unies, les instruments de la ratification du traité onusien, signé par l’Argentine en 1970, et relatif à l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité. Le traité entrera ainsi en vigueur 90 jours après cette démarche. La FIDH approuve également le projet de loi que le gouvernement a présenté au Congrès lundi 11 août qui a pour objet de donner une valeur constitutionnelle à ce traité onusien.

La FIDH se félicite de l’évolution actuelle de la politique gouvernementale argentine vis à vis des tortionnaires de la dictature militaire, démontrant la volonté du gouvernement de lutter contre l’impunité. Comme la FIDH l’a souvent souligné, notamment dans son dernier rapport sur l’Argentine de juillet 2002 , une société si profondément blessée par des années de dictature ne peut ni guérir ni se réconcilier dans un climat d’impunité, et ce même dans le contexte d’un retour à la démocratie.

La FIDH considère que les criminels doivent prioritairement être jugés, dans le pays où les crimes ont été commis, en l’espèce en Argentine plutôt qu’ailleurs et ce, à condition que les garanties d’un procès effectif et équitable existent.

Malgré les dernières avancées, la FIDH estime que ces garanties ne sont pas encore satisfaites

Le Congrès argentin doit se réunir dans les prochains jours afin de discuter du statut des lois d’amnisties dites « Ley de Punto Final » et « d’Obediencia Debida », la FIDH l’exhorte à voter l’abrogation complète et rétroactive de ces lois.

Le lundi 4 août, la Cour suprême a annoncé qu’elle statuerait en priorité sur le recours relatif à la constitutionnalité des lois d’amnistie.

La FIDH rappelle que la Cour interaméricaine des droits de l’Homme a déclaré, le 2 octobre 1992 que ces lois constituaient une violation à la Convention américaine des droits de l’Homme (CIDH), à laquelle l’Argentine est partie. La FIDH invite donc la Cour suprême à rétablir la conformité de la législation argentine avec la CIDH et suivant l’avis du Procureur Général de la Nation argentine déclarera anticonstitutionnelles les lois d’amnisties.

La FIDH demande au gouvernement argentin de continuer de prendre les mesures nécessaires pour que des procès effectifs et équitables permettent le jugement, en Argentine, des tortionnaires de la dictature militaire.

Dans cette attente, la FIDH exhorte le gouvernement argentin à répondre favorablement aux demandes d’extraditions actuelles et à venir.

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