38ème Congrès de la FIDH
23-27 mai 2013
Istanbul (Turquie)
Présentée par la Ligue Togolaises des Droits de l’Homme
Vu les incendies survenus en Janvier 2013 au Togo, notamment aux grands marchés de Lomé et de Kara ;
Considérant les importants manquements à la procédure judiciaire ouverte dans ce dossier, le grand nombre d’inculpations et d’arrestations ayant principalement visé des membres de partis politiques de l’opposition ;
Considérant les actes de tortures et autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants que disent avoir subi certains détenus, et qui auraient été à l’origine du décès du détenu Etienne YAKANOU, militant du parti politique de l’opposition Alliance Nationale pour le Changement (ANC) ;
Considérant que l’état de santé de la plupart des détenus s’est considérablement dégradé pour cause de mauvaises conditions de détention ;
Considérant que la plupart des inculpés sont détenus dans des centres autres que la prison civile de Lomé et qui échappent au contrôle du parquet, ce qui constitue une détention au secret qui expose les prévenus à toutes sortes de maltraitances ;
Plus généralement, vu le Rapport diligenté par la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) sur les allégations de torture et autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants faites par les accusés lors du procès dans l’affaire de tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat togolais ;
Considérant que l’exemplarité de la sanction est de nature à prévenir la répétition des violations des droits de l’Homme et qu’une lutte efficace contre l’impunité inclut nécessairement des poursuites pénales contres les auteurs de tels crimes ;
Considérant en outre qu’une procédure introduite par les victimes d’actes de torture et autres formes de traitements cruels, inhumains et dégradants est pendante devant la Cour de Justice de la CEDEAO, en vue de les restaurer dans leurs droits ;
Considérant que dans la logique de mettre un terme à l’impunité grandissante au Togo, le gouvernement a créé, le 25 Février 2009, la Commission Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR) avec pour mission de faire la lumière sur les violations massives des Droits de l’Homme, ainsi que les violences à caractère politique au Togo de 1958 à 2005 ;
Considérant que le 03 Avril 2013, la CVJR a transmis au président togolais, Monsieur Faure GNASSINGBE, le Rapport final de sa mission ;
Vu l’implication de la FIDH ainsi que de son association membre au Togo, la Ligue Togolaise des Droits l’Homme (LTDH) dans la lutte contre la torture et dans le processus de vérité, justice et réconciliation ;
La FIDH réunie en son 38ème congrès mondial à Istanbul (Turquie) :
– Condamne la pratique persistante de la torture et autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants au Togo ;
– Exhorte les autorités togolaises à prendre toutes les mesures nécessaires pour la poursuite effective en justice de tous les auteurs de crimes de torture et autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
– Appelle les autorités togolaises à respecter l’indépendance de la justice, le droit à un procès équitable, et la présomption d’innocence des personnes accusées dans les procédures judiciaires en cours, conformément notamment au principe selon lequel la détention demeure l’exception ;
– Appelle les autorités togolaises à respecter les conventions régionales et internationales de défense des droits de l’Homme auxquelles le Togo est partie, et en particulier la Convention internationale contre la torture et autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants, et à inviter le Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et le Rapporteur spécial sur la torture de la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples à se rendre au Togo ;
– Demande aux autorités togolaises de libérerer les victimes de la torture encore en détention dans l’affaire de tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat ;
– Demande aux autorités togolaises de publier le Rapport des Experts français sur les incendies de janvier 2013 et de libérer les personnes arbitrairement détenues dans le cadre de cette affaire ;
– Demande la mise en place d’une commission d’enquête internationale chargée d’établir les responsabilités dans l’affaire des incendies.
– Demande aux autorités togolaises de mettre en oeuvre l’intégralité des recommandations des rapports de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) et de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR) afin de mettre un terme à la pratique de la torture, de lutter efficacement contre l’impunité, prendre des mesures de réparations en faveur des victimes, et adopter les réformes constitutionnelles et institutionnelles adéquates afin de renforcer l’état de droit et concrétiser la réconciliation nationale au Togo ;