Résolution d’urgence sur le Tchad

07/03/2004
Rapport

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme, réunie en son 35ème Congrès à Quito les 5 et 6 mars 2004, exprime sa vive préoccupation quant à la situation des droits de l’Homme au Tchad.

1. Sur la peine de mort

Considérant que plusieurs condamnés attendent encore dans le couloir de la mort.

Considérant qu’en novembre 2003, le gouvernement fédéral du Tchad a rétabli l’exécution de la peine de mort après 12 ans de non-application.
Plusieurs personnes accusées de meurtre ont été condamnées à la peine capitale par la Cour criminelle siégeant en session extraordinaire. Elles ont été exécutées à N’djamena et en province à la suite de parodies de justice, en violation des droits de la défense reconnus par les instruments internationaux de protection des droits humains.
Le Président de la République du Tchad, M. Idris Deby, a réaffirmé sa ferme détermination à poursuivre les exécutions.

Considérant que le Tchad a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et son premier Protocole additionnel, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants

Le Congres :

 Rappelle au gouvernement tchadien que la peine de mort constitue un châtiment cruel, inhumain et dégradant et, contrairement à ce que prétendent les autorités nationales, son application ne fait pas régresser la criminalité ;
 Rappelle au gouvernement tchadien que seul le traitement efficace des problèmes sociaux, économiques et politiques peut permettre de baisser la criminalité ;
 Estime que la réforme du système judiciaire inefficace et corrompu recommandée par les Etats généraux de la Justice contribuera à lutter contre la criminalité ;
 Demande au gouvernement tchadien d’œuvrer en faveur de l’abolition de la peine de mort.

2. Sur la protection des défenseurs des droits de l’Homme

Considérant que le 23 février 2004, Dobian Assingar, président de la LTDH et vice-président de la FIDH, a été victime d’une tentative d’assassinat. Un homme se réclamant Officier de l’armée tchadienne s’est introduit dans son bureau a l’Office national de développement rural dans le but de l’abattre. L’assaillant s’est finalement enfui. Cette tentative d’assassinat fait suite aux prises de positions du président de la LTDH, notamment en faveur de la transparence au sein du Collège de contrôle et de surveillance des revenus pétroliers où il représente les associations de droits de l’Homme, et son opposition à la volonté du chef de l’Etat et de son parti, le MPS, de modifier les dispositions de la Constitution relatives au nombre et à la durée du mandat présidentielle.

Considérant que depuis plusieurs années, les membres d’association de défense de droits de l’Homme, notamment ceux de la LTDH et de l’Association Tchadienne pour la Protection des Droits de l’Homme subissent menaces et intimidations. Le Congres rappelle qu’en 1992 le vice-président de la LTDH, Joseph Behidi, a été froidement assassiné d’une balle dans la tête. Si un enquête judiciaire a abouti à l’identification des auteurs de ce crime et des circonstances de l’assassinat, les magistrats en charge de cette affaire n’ont toujours pas engagé des poursuites, malgré une note présidentielle datant de 1998 demandant au Parquet général l’ouverture du dossier.

Le Congres demande aux autorités tchadiennes :

 De se conformer à la Déclaration des Nations unies de 1998 sur les défenseurs des droits de l’Homme ;
 D’affirmer solennellement l’importance des activités des associations de défense des droits de l’Homme dans la contribution à l’Etat de droit ;
 D’assurer l’intégrité physique et morale de ces citoyens, conformément aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
 De procéder systématiquement à des enquêtes impartiales sur tous les actes de violence perpétrés contre les défenseurs des droits de l’Homme, afin d’identifier leurs auteurs, de les poursuivre en justice et de les juger conformément aux dispositions internationales relatives au droit à un procès équitable ;
 De condamner publiquement les tentatives répétées d’assassinat sur la personne de Dobian Assingar ;
 De permettre l’ouverture du dossier judiciaire concernant l’assassinat de Joseph Behidi

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