Les massacres continuent

17/03/1998
Communiqué

La Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH) est vivement préoccupée par la recrudescence des exécutions sommaires au Tchad ces derniers jours. Selon des informations concordantes, les populations des deux Logones (Sud du Tchad) continuent de vivre un véritable calvaire depuis les événements sanglants du 30 octobre 1997 intervenus à Moundou, et quelques jours à peine après les opérations de "ratissage" effectuées à Sahr.

L’insécurité est totale dans la région, et des dizaines de personnes ont été exécutées.Cette résurgence de l’insécurité est le fait de la reprise des hostilités entre les Forces Armées pour la République Fédérale (FARF) et les forces gouvernementales qui, sous prétexte de rechercher les forces rebelles, parcourent les villes et les villages de la région en semant la terreur et la désolation.A titre d’exemple, le sous-préfet de Benoye a demandé le 11 mars dernier au Chef de Canton de Goré de réunir tous les chefs de village afin de recevoir des tickets d’impôt. En lieu et place du préfet, ce sont les militaires qui se sont présentés avec deux véhicules et ont emmené tous les chefs de villages présents à leur bord pour les fusiller à Nama, au bord du fleuve Logone.

16 personnes ont ainsi été exécutées.De nombreux autres cas d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions et de mauvais traitements ou tortures nous ont été signalés depuis le 2 mars dernier dans la même région.Les principales organisations de défense des droits de l’Homme au Tchad se sont réunies au sein d’un collectif et ont appelé à l’organisation de 48 heures de journées "ville morte", afin de protester contre les violations massives des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dans la région les 17 et 18 mars.

La FIDH, extrêmement inquiète de la recrudescence des actes de violences dans la région, insiste pour que les auteurs des exactions soient poursuivis et jugés, conformément aux instruments internationaux de défense des droits de l’Homme.
La FIDH insiste en outre pour que des mesures soient prises afin d’empêcher les membres des forces de sécurité de commettre de nouvelles violations des droits de l’Homme contre des civils non armés.En 1996, la Commission des Droits de l’Homme de l’ONU avait décidé d’accorder un sursis aux autorités tchadiennes afin qu’elles prennent des mesures concrètes pour faire cesser les violations des droits de l’Homme et poursuivre le processus électoral.
Ce même sursis a de nouveau été accordé lors de la 53ème session de la Commission. Aujourd’hui, il apparait clairement que la situation s’est encore aggravée, et bien pire, que les violations graves, flagrantes et systématiques des libertés fondamentales engagent à plus d’un titre la responsabilité des autorités tchadiennes au plus haut niveau.

La FIDH appelle donc la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies à nommer en procédure publique un rapporteur spécial sur la situation des droits de l’Homme au Tchad, chargé de lui faire rapport lors de sa 55ème session.

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