Le Comité sur les travailleurs migrants des Nations unies demande au Sénégal de respecter et de protéger les droits des travailleurs migrants

28/12/2010
Communiqué

A l’issue de l’examen du rapport soumis par le Sénégal, le Comité onusien sur les travailleurs migrants (“le Comité”) s’est dit préoccupé par la situation des migrants dans ce pays, notamment celle des travailleurs migrants irréguliers, de ceux travaillant dans le secteur informel et de ceux en transit, ainsi que par l’insuffisance de la protection accordée aux ressortissants sénégalais se trouvant hors du pays.

Le Comité, réuni les 24 et 25 novembre 2010 à Genève, s’est prononcé sur l’examen du premier Rapport Périodique soumis par le Sénégal sur la mise en oeuvre de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (CTM). En vue de cet examen, 14 organisations de la société civile ont présenté un rapport alternatifau Comité. De nombreuses préoccupations soulevées dans ce rapport sont reflétées dans les observations finales du Comité.

En ce qui concernant les ressortissants sénégalais travaillant à l’étranger, le Comité constate avec préoccupation que le Sénégal n’a pas pris suffisamment de mesures pour protéger les droits de ces travailleurs migrants, « malgré le nombre considérable d’expulsions et de refoulements de travailleurs migrants sénégalais depuis l’Europe et certains pays de l’Afrique du Nord. » Le Comité appelle le Sénégal notamment à veiller à ce que les autorités consulaires fournissent une protection et une assistance, y compris juridique, à ses ressortissants se trouvant dans les pays d’accueil.

Soulignant le rôle important des organisations de la société civile en matière de protection des droits des travailleurs migrants, le Comité encourage le Sénégal à consulter la société civile avant la négociation des accords bilatéraux relatifs au recrutement de migrants sénégalais, et à prendre les mesures nécessaires pour que ces accords soient pleinement compatibles avec la Convention.

Quant aux migrants au Sénégal, le Comité a souligné la situation de grande précarité des travailleurs migrants en situation irrégulière et a recommandé la mise en place d’une procédure de régularisation accessible et rapide.

Le Comité s’inquiète également du fait que, contrairement aux dispositions de la CTM, des travailleurs migrants en situation irrégulière sont placés en détention avec des personnes accusées ou reconnues coupables de crimes et que les mineurs ne sont pas séparés des adultes. Le Comité rappelle au Sénégal que la détention de travailleurs migrants en situation irrégulière doit être une mesure de dernier ressort.

Le Comité déplore que le Sénégal n’a pas adopté de mesures concrètes pour mettre un terme au trafic des enfants venus des pays limitrophes à des fins de mendicité et appelle au renforcement des mesures de protection des enfants dont l’un ou les deux parents ont migré.

Enfin, le Comité a noté avec préoccupation l’absence de données statistiques fournies par le Sénégal concernant les migrations économiques vers le Sénégal et sur les expatriés sénégalais. Le Comité a vivement encouragé le Sénégal à créer une base de données, à surveiller la mise en œuvre de chacun des droits énoncés dans la Convention, et à collecter les données relatives à l’exercice effectif de chacun de ces droits.

Le Rapport alternatif présenté par 14 organisations de la société civile basées au Sénégal et en Europe expose de nombreuses violations des droits des migrants au Sénégal ainsi que ceux des sénégalais travaillant à l’étranger. Le rapport critique la collaboration du gouvernement du Sénégal avec la politique européenne d’externalisation de ses frontières, qui voit augmenter les abus et les décès des migrants en transit. Le rapport dénonce également la facilitation par le Sénégal d’expulsions massives à travers la delivrance de titres d’expulsion, la criminalisation de la migration, notamment par l’adoption de la loi 2005-06 qui interdit la migration clandestine, et le manque de transparence et de consultation dans l’élaboration des politiques migratoires sénégalaises.

Enfin, les organisations signataires du rapport alternatif exhortent le gouvernement sénégalais à remplir ses obligations en vertu de la CTM, et lancent un appel pour que le Sénégal – en cas de violation des droits de ses ressortissants à l’étranger – soutienne le droit des victimes à la justice, notamment en exigeant des enquêtes et en soutenant les efforts de la société civile. Cet appel a été réiteré suite à la mort le 14 décembre 2010 de M. Seydou Gadiaga, migrant sénégalais, après son arrestation par la police à Brescia, en Italie. Les organisations de la société civile demandent aux autorités sénégalaises compétentes de s’assurer que lumière soit faite sur les circonstances de sa mort.

Le rapport alternatif de la société a été rédigé par :
 RADDHO (Afrique/Sénégal) ;
 WARIPNET (Afrique de l’Ouest/Sénégal)
 PARI/CARITAS - Sénégal ;
 ONG ANAFA(Sénégal) ;
 RADI (Afrique / Sénégal) ;
 CAEDHU)(Sénégal) ;
 LSDH (Sénégal)
avec le soutien de :
 JSF-JWB Migrants (Afrique / Europe) ;
 FIDH (International) ;
 Réseau Panafricain pour la Défense des Droits des Migrant-es – Section Diaspora Europe (International / Europe) ;
 CEAR (Espagne), MRI (International / Suisse) ;
 OSIWA (Afrique de l’Ouest, Sénégal.)

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Pour le texte des Observation Finales (3 décembre 2010) sur le Sénégal du Comité sur les Travailleures Migrants des NU (Document no. CMW/C/SEN/CO/1), voir :
http://www2.ohchr.org/english/bodies/cmw/cmws13.htm

Pour télécharger le rapport alternatif, Les droits des travailleurs migrants au Sénégal, présenté par les organisations de la société civile au Comité le 22 novembre 2010), voir :
http://www.jsf-jwb-migrants.org/FRA/documents_fr.html

Pour le texte de la Convention internationale pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, voir :
http://www2.ohchr.org/french/law/cmw.htm

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