Libération de M. Evariste Nsabayezu et poursuite de la détention de M. Daniel Uwimana, membres de la LIPRODHOR

25/11/2014
Appel urgent

L’Observatoire a été informé de la libération de M. Evariste Nsabayezu, vice-président du Conseil d’Administration « légitime » de la Ligue Rwandaise pour la Promotion et la Défense des Droits de l’Homme (LIPRODHOR), et de la poursuite de la détention de M. Daniel Uwimana, membre de la LIPRODHOR et chef de l’antenne de Kayonza, tous deux arrêtés le 21 novembre 2014, en amont de la réunion extraordinaire de l’Assemblée générale de la LIPRODHOR, qui devait se tenir le 23 novembre 2014.

Nouvelles informations
RWA 001 / 1114 / OBS 090.1
Arrestation / Harcèlement /
Entraves à la liberté de réunion
Rwanda
25 novembre 2014

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante au Rwanda.

Nouvelles informations :

Selon les informations reçues, le 24 novembre en fin d’après-midi, M. Evariste Nsabayezu a été libéré du poste de police de Kicukiro, après avoir été interrogé pour « faux et usages de faux en écriture ». Lors de son interrogatoire, M. Nsabayezu a également dû répondre de la légitimité de la réunion de l’Assemblée générale du 23 novembre. Aucune charge n’a été retenue à son encontre, mais des enquêtes seraient en cours suite à une plainte déposée par le conseil d’administration « illégitime » de la LIPRODHOR pour des faits de « faux et usages de faux allégués » par certains de ses membres, en lien avec la convocation de l’Assemblée générale du 23 novembre.

Par ailleurs, le 24 novembre au soir, M. Uwimana aurait dû être relaxé après avoir été interrogé sur la base de motifs analogues. Sa libération devait intervenir aujourd’hui, mais contre toute attente, la police de Remera Kigali l’a finalement transféré au tribunal de district de Nyarugenge. M. Uwimana avait été arrêté à son domicile le 21 novembre par douze policiers et trois inspecteurs de police judiciaire, détenu dans une station de police du district de Rubavu, avant d’être transféré au Criminal Investigation Department.

Plusieurs autres défenseurs des droits de l’Homme restent à ce jour menacés.

Peu après l’arrestation de MM. Uwimana et Nsabayezu, le 22 novembre, le Maire du District de Nyarugenge/Ville de Kigali avait publié un communiqué « A qui de droit », interdisant l’Assemblée générale qui devait se tenir le lendemain, sur base d’une lettre adressée au Maire par M. Aloys Munyangaju, président actuel « illégitime » du conseil d’administration de la LIPRODHOR, demandant « l’annulation d’une réunion qu’il n’avait pas convoquée ». Le jour de l’événement, plusieurs policiers se trouvaient dans la salle réservée pour l’occasion, afin de dissuader les participants.

L’Observatoire dénonce vivement le harcèlement de MM. Uwimana et Nsabayezu, qui ne vise qu’à sanctionner leurs activités de défense des droits de l’Homme, et notamment leur implication dans l’organisation de l’Assemblée générale de la LIPRODHOR prévue pour le 23 novembre. L’Observatoire appelle à la fin de toute forme de harcèlement contre les représentants de la société civile indépendante au Rwanda, et à la libération immédiate et inconditionnelle de M. Uwimana.

Rappel des faits :

Suite à l’annonce de la convocation, par le tiers des membres « effectifs » de la LIPRODHOR, de la réunion de l’Assemblée générale du 23 novembre 2014, et suite à l’envoi d’invitations à plus de 200 membres de la Ligue, les menaces contre certains membres « légitimes » se sont accentuées. Ces actes d’intimidation, qui se matérialisent par des menaces téléphoniques ou des convocations policières, visent manifestement à intimider toute personne ayant été impliquée dans l’organisation de cette Assemblée générale1.

Depuis la prise de contrôle illégitime et illégale de l’organisation en juillet 2013, les membres légitimes du Conseil d’administration de la LIPRODHOR ont initié une action en justice afin de faire reconnaître la nullité des décisions prises lors d’une précédente Assemblée générale extraordinaire, convoquée illégalement le 21 juillet 2013, qui ont conduit à leur destitution et à l’élection d’un nouveau conseil d’administration « illégitime », reconnu trois jours plus tard par le Rwanda Governance Board (RGB), l’institution publique supervisant les organisations non gouvernementales nationales. Le 8 août 2014, en pleines vacances judiciaires et au terme de reports incessants constatés par un observateur international mandaté par la FIDH et l’OMCT depuis mars 2014, le juge du Tribunal de grande instance de Nyarugenge a rendu une décision inattendue, dans laquelle il a estimé que l’action en justice intentée contre les membres « illégitimes » du conseil d’administration de la LIPRODHOR était infondée. Les avocats des membres « légitimes » de la LIPRODHOR ont fait appel de la décision du 8 août 2014. La mise en état en appel pour fixer l’audience sur le fond qui était prévue le 6 novembre 2014 a été remise au 27 novembre 2014 suite à l’absence des intimés. Aucun verdict en appel n’a à ce jour été rendu.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités rwandaises en leur demandant de :

Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de MM. Daniel Uwimana et Evariste Nsabayezu, et de tous les défenseurs des droits de l’Homme impliqués dans la préparation de l’Assemblée générale de la LIPRODHOR du 23 novembre 2014 ;

Libérer M. Daniel Uwimana de manière immédiate et inconditionnelle, en ce que sa détention ne vise qu’à sanctionner ses activités de défense des droits de l’Homme ;

Mettre un terme à toute forme de harcèlement et d’entraves à l’encontre des membres « légitimes » de la LIPRODHOR, ainsi que de tous les défenseurs des droits de l’Homme au Rwanda ;

Autoriser la tenue sans entraves de l’Assemblée générale de la LIPRODHOR par ses membres « légitimes », dans le respect du droit à la liberté de réunion ;

Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement :

à son article 1 qui prévoit que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international »,
à son article 5 b) et c) qui prévoit qu’« afin de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales, chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, aux niveaux national et international, de se réunir et de se rassembler pacifiquement et de former des organisations, associations ou groupes non gouvernementaux, de s’y affilier et d’y participer » ;
à son article 6(b), selon lequel « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales »,
à son article 12.2 qui dispose que « l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration » ;

Se conformer aux dispositions de la Charte africaine sur la démocratie, les élections et la gouvernance, signée par le Rwanda, dont les articles 3(7) et 12(3) disposent respectivement que les citoyens ont un droit de participation effective dans les affaires publiques et que l’État a le devoir de « créer les conditions légales propices à l’épanouissement des organisations de la société civile ».

Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Rwanda.

Adresses utiles :

M. Paul Kagame, Président de la République de Rwanda, Urugwiro Village, P.O. Box 15, Kigali, RWANDA
M. Anastase Murekezi, Premier Ministre, P.O Box 1334 Kigali , RWANDA, Email : webinfos@primature.gov.rw, Tel : + 250 252 586 902, Fax :+ 250 252 584 648
M. Sheik Mussa Harerimana, Ministre de la sécurité intérieure (MININTER), P.O. Box 446 Kigali, RWANDA, Email : info@mininter.gov.rw, Tel/Fax. + 250 252 58 78 81
M. Stephens Kanuuma Nuwagaba, Conseiller du Ministre de l’administration locale (MINALOC), Email : minister@minaloc.gov.rw, Tel :+250788478003
M. Johnston Busingye, Ministre de la justice (MINIJUST), P.O. Box 160 Kigali, RWANDA, Email : mjust@minijust.gov.rw, Tel : +250 252 586398, Fax : +250 252 586509 
M. le Directeur Général de Rwanda Governance Board, PO BOX 6819, Kigali, RWANDA, Email : info@rgb.rw, Tel : + 250 255 112 023
Mme la Présidente de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH), BP 269 Kigali, RWANDA, Email : cndh@rwanda1.com, Tel : + 250 5042 71, Fax : + 250 504 270
M. Eugène-Richard GASANA, Ambassadeur, Représentation Permanente de la République du Rwanda aux Nations Unies, 124 East 39th Street, New York, NY 10016, USA, Email :ergasana@minaffet.gov.rw, Tel : +1 212 679 9010/9023, Fax : +1 212 679 9133
M. Michel Ryan, Ambassadeur, Délégation de l’Union Européenne au Rwanda, S.E. M. L’Ambassadeur 1807 Umuganda Boulevard, Aurore Building, 515 Kacyru Kigali, RWANDA, Email : Delegation-rwanda@eeas.europa.eu, Tel : +250 252 58 57 38/39/40/41, Fax :+250 252 58 57 34/36

Paris-Genève, le 25 novembre 2014

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

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