RDC : Christopher Ngoyi Mutamba injustement détenu et poursuivi

06/03/2015
Appel urgent
RDC
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Paris-Genève, le 6 mars 2015 – Le procès contre le défenseur des droits de l’Homme, Christopher Ngoyi Mutamba, président national de l’ONG « Synergie Congo Culture et Développement » et coordonnateur de la plateforme « Société civile de la République Démocratique du Congo », s’est ouvert avant-hier, sans notification préalable du prévenu qui, risque une lourde peine de prison. L’Observatoire craint que ce défenseur ne soit poursuivi en raison de son opposition à la réforme de la loi électorale ainsi que de son travail de documentation des violences commises à l’occasion des manifestations des 19 et 20 janvier derniers et appelle instamment la justice congolaise à garantir son droit à un procès équitable, en application des standards internationaux.

Le 4 mars 2015, le procès intenté contre M. Christopher Ngoyi Mutamba pour « propagation de faux bruits », « incitation à la désobéissance à la loi et à la révolte », « incitation à la haine raciale », « destruction méchante » et vol et dans lequel l’État et 22 ressortissants chinois se sont constitués partie civile, s’est ouvert devant le Tribunal de Kinshasa/Matete. Le prévenu n’ayant pas été notifié dans le délai légal prévu de la tenue de cette audience, celui-ci a refusé de comparaître volontairement. Le tribunal s’est ainsi déclaré non saisi et a renvoyé l’affaire au 18 mars 2015 afin de régulariser la procédure.

Depuis le 12 janvier 2015, M. Ngoyi Mutamba avait participé activement à plusieurs actions pacifiques visant à dénoncer une réforme électorale. Le 21 janvier 2015, après avoir rendu visite à des manifestants blessés, M. Ngoyi Mutamba, a été enlevé par des éléments armés de la garde républicaine à Kinshasa et gardé en détention au secret pendant une vingtaine de jours à l’Agence nationale de renseignement (ANR).

Après avoir interdit la tenue d’une marche visant à alerter l’opinion sur son enlèvement et sur les multiples atteintes subies par les défenseurs des droits humains dans le pays, le 5 février 2015, le porte parole du gouvernement a finalement annoncé les charges pour lesquelles celui-ci serait présenté au Parquet général de la République et poursuivi.

« Au vue des accusations fallacieuses dont Christopher Ngoyi Mutamba est déjà la cible en lien évident avec le contexte politique actuel en RDC, il faut rester vigilant et s’assurer qu’il bénéficie d’un procès équitable devant un tribunal impartial » , a déclaré Karim Lahidji, président de la FIDH.

« Il est du devoir des autorités congolaises de garantir que les droits de Christopher Ngoyi Mutamba soient respectés » , a ajouté Gerald Staberock, secrétaire général de l’OMCT.

Contexte

Le 5 janvier 2015, le gouvernement a déposé un projet de loi portant modification de la loi électorale. Ce projet dispose que la liste électorale « doit être actualisée en tenant compte de l’évolution des données démographiques et de l’identification de la population », faisant ainsi du recensement de la population un pré-requis à l’organisation de tout scrutin législatif et présidentiel à venir. Dans un pays de 2,5 millions de km carré, comptant plus de 77 millions d’habitants, et en proie à la violence et une instabilité récurrentes, un tel recensement paraît difficilement réalisable en moins de 4 ans, permettant ainsi de reporter d’autant la tenue du scrutin présidentiel auquel Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001, ne peut, théoriquement, pas se présenter.

Dès le début de l’examen du projet de loi par le Parlement, l’opposition et la société civile n’ont cessé d’exprimer leurs craintes et désaccords. Des partis d’opposition ont d’abord appelé au rassemblement et au boycott des travaux parlementaires. Le projet de loi ayant été adopté en catimini par l’Assemblée nationale le 17 janvier dernier, l’opposition, a dénoncé un « coup d’État constitutionnel », et appelé la population à manifester massivement dès le lundi 19 janvier alors que le Sénat devait examiner le projet de loi. Faisant suite à cet appel, les autorités avaient notamment coupé les communications internet et SMS.

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