Procès Lubanga : La Chambre d’appel de la CPI devrait intégrer une approche intégrale des réparations en faveur des victimes

Le 3 mars 2015, la Chambre d’appel de la Cour pénale internationale (CPI) rendra sa décision concernant les réparations aux victimes dans la procédure contre Thomas Lubanga Dyilo, reconnu coupable du crime de guerre d’enrôlement et de conscription d’enfants de moins de 15 ans et de l’utilisation de ces enfants pour participer activement aux hostilités.

Cette décision déterminera de manière définitive l’étendue et la procédure de réparation dans le présent cas, permettant aux victimes des crimes commis par Lubanga en République Démocratique du Congo (RDC) d’obtenir enfin réparation.

La FIDH et ses organisations membres en RDC, l’ASADHO, le Groupe Lotus et la Ligue des électeurs demandent à la Chambre d’Appel de la CPI de confirmer des principes de réparation permettant aux victimes d’obtenir une véritable réparation, et demandent à ce que ces principes soient mis en œuvre de façon non discriminatoire et inclusive.

Dismas Kitenge, Vice-Président de la FIDH et Président du Groupe Lotus a déclaré : « La Chambre d’Appel est maintenant en mesure de consacrer une approche intégrale en matière de réparation, une approche qui aille au-delà des seules indemnisations financières et qui tienne compte plus largement des souffrances infligées tant aux victimes directes qu’aux victimes indirectes des crimes internationaux ».

Telle que l’avait établi la Chambre de première instance, nos organisations plaident en faveur d’une interprétation large de la notion de réparation, y compris le droit des victimes à obtenir restitution, indemnisation, réhabilitation, et toute autre forme de réparation, ce qui inclut des campagnes organisées pour limiter la stigmatisation des victimes et des programmes d’éducation. Les réparations doivent être définies non seulement en faveur des victimes directes des crimes établis, mais également en faveur des victimes indirectes, à savoir les membres de leurs familles, les personnes qui sont intervenues pour aider les victimes, les personnes et institutions (par exemple les ONG et les hôpitaux) qui ont eu à souffrir du fait de ces crimes. Nos organisation plaident en faveur d’une conception des réparations qui tienne compte de la dimension complexe des souffrances infligées aux victimes, y compris les souffrances résultant des violences sexuelles.

« Le Fonds au profit des victimes devrait entamer le processus de réparation en RDC aussi vite que possible une fois le jugement rendu, afin que les victimes puissent effectivement obtenir réparation » a déclaré Paul Nsapu, Secrétaire général de la FIDH et Président de la Ligue des électeurs, avant d’ajouter « Nous en appelons aux Etats et aux donateurs privés afin qu’ils soutiennent plus encore le Fonds qui met ainsi pour la première fois en œuvre son mandat en matière de réparation ».

Le Fonds au profit des victimes devra coopérer avec le gouvernement de la RDC et avec les représentants de la communauté internationale présents en RDC afin d’appliquer l’ordonnance de réparation.

« Le gouvernement de RDC doit saisir cette opportunité pour élaborer une politique nationale en matière de réparation. L’ordonnance de réparation de la CPI doit s’accompagner d’une réflexion à l’échelle nationale afin que les victimes des crimes commis en RDC obtiennent aussi une réparation appropriée » a déclaré Jean-Claude Katende, Président de l’ASADHO.

Contexte
Le 7 août 2012, la Chambre de première instance de la CPI avait, pour la première fois, établi les principes de réparation pour les victimes de crimes dans le procès contre Thomas Lubanga qui, le 14 mars 2012, a été reconnu coupable du crime de guerre d’enrôlement et de conscription d’enfants de moins de 15 ans et de l’utilisation de ces enfants pour participer activement à des hostilités. L’accusé avait par la suite fait appel de cette décision.

La CPI est la première juridiction pénale internationale dont le mandat inclut la totale réparation pour les victimes, conformément à l’Article 75 des Statuts de la CPI.
Le Fonds au profit des victimes a été créé conformément à l’Article 79 des Statuts et a été établi par l’Assemblée des Etats Parties en 2002. Il s’agit d’une institution indépendante dont le mandate est double : le Fonds doit mettre en œuvre les réparations ordonnées par la Cour et également porter assistance aux victimes, au travers en particulier d’une réhabilitation physique et psychologique. Dans le cadre de ce second mandat, le Fonds au profit des victimes a d’ores-et-déjà porté assistance à près de 80 000 victimes, notamment en Ouganda et en RDC. Cette décision sera pour le Fonds, la première occasion de remplir son mandat en matière de réparation.

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