Lettre à Monsieur Ange Félix Patassé, Président de la République centrafricaine

11/10/2001
Rapport

Monsieur le Président,

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) est extrêmement préoccupée par la situation des droits de l’Homme qui prévaut actuellement en République Centrafricaine.

Le mercredi 26 septembre, Maître Zarambaud Assingambi, avocat, a été arrêté et brutalisé dans la rue par les gendarmes alors qu’il venait de quitter son cabinet pour se rendre à son domicile. Il a été interpellé sans mandat et conduit à la gendarmerie où il a été placé dans une geôle insalubre avec une trentaine de personnes.

Selon nos informations, il lui est reproché d’avoir tenu des propos séditieux dans des articles publiés par le journal "le Citoyen". La Commission mixte d’enquête judiciaire chargée de faire la lumière sur les responsabilités dans la tentative de putsch vient de l’accuser " d’atteinte à la sûreté de l’Etat et de participation au coup d’Etat manqué ". Toutes les démarches entreprises par son avocat ainsi que par ses proches pour entrer en contact avec lui ont été rejetées.

En signe de protestation, l’ensemble des avocats a observé une grève des audiences toute la semaine dernière. La conférence de presse du barreau prévue le 4 octobre a été interdite par les autorités.

En effet, cette Commission créée au lendemain du putsch manqué multiplie les mesures arbitraires de restriction des libertés.

La mission d’enquête de la FIDH qui a séjourné à Bangui du 6 au 18 juillet 2001 a eu l’occasion de relever des atteintes graves aux droits de l’Homme en Centrafrique, y compris de la part de cette Commission. Les chargés de mission de la FIDH ont d’ailleurs eu l’occasion, au cours d’une audience avec vous, de manifester leur inquiétude face à ces graves dérapages.

La FIDH rappelle que la recherche, par tous les moyens, des auteurs présumés de la tentative de coup d’Etat ne peut exonérer votre gouvernement du respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. En outre, la substitution d’une structure d’exception aux institutions républicaines seules habilitées à poursuivre et prendre des mesures restrictives des libertés publiques, est contraire aux obligations internationales de la Centrafrique.

La FIDH demande l’arrêt immédiat des mesures discriminatoires et la libération immédiate des personnes arbitrairement détenues.

La FIDH insiste, Monsieur le Président, pour que vous donniez les instructions nécessaires à votre gouvernement et à la Commission en particulier, afin qu’ils se conforment aux instruments internationaux en matière de droits de l’Homme.

Dans l’attente que vous preniez toute mesure en votre pouvoir pour faire cesser ces graves violations des droits de l’Homme, je vous prie de bien vouloir accepter, Monsieur le Président, l’expression de ma haute considération.

Sidiki Kaba
Président

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