« La situation sécuritaire en République centrafricaine demeure précaire depuis la fin du processus électoral, en particulier dans les préfectures de l’ouest et du nord-est du pays » souligne un rapport du Secrétaire général des Nations unis soumis au Conseil de sécurité le 29 décembre 2005. Cette insécurité est non seulement due aux agissements criminels des coupeurs de route et des braconniers mais aussi aux « bandes fortement armées, souvent en tenue militaire, qui, en plus des exactions et des vols, auraient des revendications d’ordre politique et procéderaient à des enrôlements forcés » signale un rapport de mission de l’Union africaine (UA) rendu public par le Conseil de paix et de sécurité le 29 décembre 2005.
Confirmant l’organisation de mouvements rebelles, deux attaques récentes dans des villages du nord-ouest du pays ont été revendiquées par un mouvement jusque-là inconnu, l’Armée populaire pour la restauration de la République et la démocratie (APRD), dont l’objectif affiché est la chute du président François Bozizé. D’aucun soulignent que ces groupes armés « seraient composés d’anciens membres de l’unité de la sécurité présidentielle de l’ex-Président Ange Félix Patassé et de démobilisés de l’ancienne rébellion de l’actuel chef de l’Etat », stipule le rapport de l’UA.
Fin janvier 2006, des éléments armés ont lancé une attaque meurtrière sur la ville de Paoua. En réaction, l’armée centrafricaine a lancé le 29 janvier 2006 une violente contre-offensive faisant, de sources concordantes, plusieurs dizaines de morts, principalement des civils soupçonnés de faire partie des bandes armées.
Prise sous le feu quotidien des attaques et contres-offensives lancées au mépris des règles du droit international humanitaire, la population civile fuit en masse vers le Tchad. D’après le Haut commissariat aux réfugiés des Nations unies, ce sont près de 15 000 ressortissants centrafricains qui ont trouvé refuge au Tchad depuis juin 2005 et qui rejoignent les 30 000 autres qui vivent depuis 2003 dans les camps gérés par l’ONU. Cette situation d’urgence fait craindre l’émergence d’une grave crise humanitaire à la frontière tchado-centrafricaine.
LA FIDH et la LCDH sont particulièrement inquiètes de cette situation de grave insécurité pour la population civile dans le nord du pays qui rappelle les tensions armées qui ont précédé la plupart des tentatives meurtrières de putsch qui se sont succédées ces dix dernières années en République centrafricaine. Cette préoccupation est particulièrement vive lorsque le rapport du Secrétaire général des Nations unies démontre que « la crise du Darfour, ajoutée aux effets de la porosité des frontières, a accentué la prolifération et la circulation des armes légères » dans le pays.
La FIDH et la LCDH appellent les autorités centrafricaines et les bandes armées à respecter strictement le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’Homme. La FIDH et la LCDH insistent sur les devoirs du gouvernement centrafricain de protéger l’intégrité de ses ressortissants. Par ailleurs, la FIDH et la LCDH rappellent que la situation en République centrafricaine a été portée devant le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) par le chef de l’Etat, le général Bozizé, en décembre 2004. Considérant non seulement l’impunité des auteurs des crimes perpétrés par les différents belligérants pendant l’offensive militaire du général Bozizé contre l’ancien président Patassé mais aussi la commission actuelle de crimes de la compétence de la CPI dans le nord du pays, la FIDH et la LCDH appellent le Procureur à ouvrir une enquête sur cette situation dans les plus brefs délais. La FIDH et la LCDH soulignent que la prévention des crimes et la dissuasion font partie intégrante du mandat de la CPI et appellent le Procureur à utiliser tous les moyens à cette fin.