Hommage de la FIDH lors des funérailles de Nganatouwa Goungaye Wanfiyo

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme est aujourd’hui en deuil, ses 155 organisations membres et les milliers de femmes et d’hommes engagés en faveur de la défense des libertés fondamentales qu’elle regroupe en Afrique, dans les Amériques, en
Asie et en Europe viennent de perdre un des leurs.

Les militants des droits de l’Homme, du monde entier, sont terriblement affectés par ce décès.

Nous enterrons ce jour un ami, un frère, un collègue, qui nous est cher, qui a porté, haut et fort, tout au long de sa vie les valeurs ­ si essentielles ­ de fraternité et de liberté.

Nous avons aussi une pensée très émue pour la famille de Maître Goungaye, qui, de Grenoble ou d’ici, en dépit des sacrifices, a toujours soutenu son combat quotidien en faveur de la paix et de la justice dans son pays. Nous adressons à toute sa famille nos plus sincères condoléances ; nous partageons votre douleur, et sommes à vos côtés dans ce moment particulièrement difficile. Nous avons aussi une pensée particulière et présentons nos plus sincères condoléances aux familles des deux amies de Maître Goungaye qui ont trouvé la mort lors de cette tragique nuit du 27 décembre et souhaitons un prompt rétablissement à la personne qui a été blessée.

Nous tenons également à saluer chaleureusement et amicalement tous les membres de la Ligue centrafricaine des droits de l’Homme, dont Goungaye était la voix, et qu’il a su animer avec cœur et compétence. Chers militants de la Ligue, toute la famille FIDH vous présente ses condoléances et vous renouvelle son soutien et sa confiance.

Nous nous associons aussi à la douleur des autres organisations centrafricaines de défense des droits de l’Homme qu’il nous avait fait rencontrer, et qui l’ont accompagné dans son perpétuel et incessant combat pour la promotion et la protection des droits de l’Homme et de la justice.

La FIDH a perdu un grand activiste, un grand leader et avant tout un véritable ami.

Maître Goungaye n’a eu de cesse de dénoncer et combattre les violations des droits de l’Homme commises dans son pays et sur le continent africain. Avocat brillant et d’une grande intégrité, il a œuvré sans relâche en faveur d’une justice indépendante, équitable et juste dans son pays.

Sans concession, incorruptible et foncièrement indépendant, Goungaye se distinguait par son franc­parler et son courage à dénoncer, inlassablement, les crimes qui se répètent en Centrafique, à dénoncer leurs auteurs, tous leurs auteurs. Il a toujours été aux côtés des
victimes, les laisser pour compte, les sans droit, les sans voix. Il s’est battu pour que la parole de ces femmes et ces hommes soit entendue, pour que leurs droits légitimes soient reconnus et enfin respectés.

Convaincu, comme nous tous , qu’il n’y a pas de paix sans justice, le président de la Ligue centrafricaine, notre ami et frère, s’est engagé, sans merci pour que la Cour pénale internationale ouvre une enquête, la seule possible, sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis en RCA et rende ainsi espoir et justice aux victimes épuisées par la guerre et ses horreurs. Lundi prochain, il devait représenter devant la CPI de très nombreuses victimes témoignant des exactions perpétrées par les troupes de Jean­-Pierre Bemba sur le sol centrafricain. Lundi, nous serons à La Haye pour continuer son combat
qui est aussi le nôtre. Ses armes étaient le droit, l’espoir d’un monde plus juste et la conviction que chacun d’entre nous pouvait y contribuer. Son courage, son abnégation et sa probité doivent être pour nous un exemple, un modèle et une ligne de conduite.

Goungaye a dénoncé sans relâche les jeux politiciens, l’absence de démocratie et la corruption avec un sens de la formule qui faisait mouche ! Encore très récemment, il dénonçait l’absence des préoccupations des victimes au sein du dialogue national dans ce pays, son pays qu’il a tant aimé, tant désireux de le voir apaisé, unifié, dans la paix, la justice et en marche vers la démocratie et pour son développement.

Avec le sérieux, la rigueur et une certaine intransigeance qui le caractérisait tant, il dénonçait inlassablement tous ceux qui entravaient le chemin vers la démocratie et la paix tant souhaitées par les Centrafricains. Pour cela aussi, il dérangeait. Ce combat lui a valu de se faire certains ennemis, parmi les autocrates et autres puissants d’Afrique et d’ailleurs.

Pour l’ensemble de ses activités, Goungaye était non seulement victime de campagne de dénigrement, mais faisait également l’objet de nombreuses menaces et tentatives d’intimidations. Il avait encore été arrêté récemment de façon tout à fait arbitraire.

Mais son travail, Goungaye le menait avec courage, abnégation, parfois même au péril de sa vie. Il le savait. Il disait qu’il ne se tairait pas. Il ne s’est jamais tu.

Le décès de Maître Goungaye endeuille les 155 organisations membres de la FIDH, endeuille tous les défenseurs de la liberté, de la justice, et de la démocratie. Les témoignages rappelant sa droiture, son courage, sa valeur et le respect qu’il inspirait affluent de toute l’Afrique, d’Europe et du reste du monde. L’exemplarité de son combat doit nous animer.

Sa disparition doit mobiliser l’ensemble de la communauté internationale, la société centrafricaine en faveur de la paix et du respect des droits de l’Homme pour que l’idéal porté par Maître Goungaye soit enfin une réalité en Centrafrique.

A la FIDH, nous nous souviendrons de son air si sérieux et de ses sourires, de son verbe cinglant, de son intégrité et de sa profonde humanité. Il nous manque terriblement...

La FIDH portera son combat, en sa mémoire, aux côtés de la ligue centrafricaine et de tous les défenseurs des droits de l’Homme Centrafricains.

Maître Goungaye est mort debout, il aura notre éternel respect et notre admiration. Salut à toi, notre collègue, notre ami et frère, repose en paix, celle que tu as tant défendue et tant chérie.

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