Graves menaces - CAF 001 / 0106 / OBS 008

20/01/2006
Appel urgent

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir d’urgence à propos de la situation suivante en République centrafricaine.

Description des faits :

L’Observatoire a été informé par la Ligue centrafricaine des droits de l’Homme (LCDH) de graves menaces visant plusieurs défenseurs des droits de l’Homme en République centrafricaine, dans le cadre, notamment, de troubles survenus du 3 au 6 janvier 2006, à Bangui.

Selon les informations reçues, des troubles ont éclaté à la suite d’une rixe entre militaires dans la nuit du 2 au 3 janvier 2006, lors de laquelle le sous-lieutenant Wilfrid Yango Kapita a été abattu par le sergent chef M. Jean-Claude Sanzé. Ce dernier, extrait de la geôle où il se trouvait en garde à vue, puis torturé par des camarades de M. Wilfrid Yango Kapita, a été abattu dans les locaux du Service de renseignement et d’investigation (SRI), le 3 janvier 2006.

Selon les information reçues, dans la nuit du 2 au 3 janvier 2006 au matin, le domicile de Me Nicolas Tiangaye, ancien président de la LCDH, ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau de Centrafrique et ancien président du Conseil national de transition, dont M. Sanzé a été l’aide de camp, a été mis à sac et pillé. Il est à craindre que ces actes de violences ne s’inscrivent en représailles des nombreuses positions de Me Tiangaye en faveur de l’état de droit, des droits de l’Homme et de la démocratie.

Par ailleurs, le 3 janvier 2006, lors d’une réunion au siège du Kwa Na Kwa (« Le travail rien que le travail » - KNK), groupement de partisans du président de la République, M. François Bozizé, composé d’hommes politiques et de « libérateurs » (militaires l’ayant soutenu durant le coup d’Etat de mars 2003), M. Célestin Dogo, un militaire connu pour être l’auteur de nombreuses violations des droits de l’Homme, y compris des assassinats, a déclaré vouloir « régler son compte » à Me Nganatouwa Goungaye Wanfiyo, avocat et président de la LCDH. Ces déclarations s’inscrivent dans le cadre de menaces plus générales visant Me Goungaye Wanfiyo à qui il a été rapporté que certains militaires entendaient créer des troubles, et profiter de cette situation pour l’exécuter. En raison de ces menaces, Me Goungaye est momentanément entré en clandestinité.

De plus, M. Adolphe Ngouyombo, président du Mouvement pour les droits de l’Homme et d’action humanitaire (MDDH), a été menacé par téléphone le 4 janvier 2006. A la même date, M. Maka Gbossokotto, journaliste, rédacteur en chef du quotidien Le Citoyen, et président de l’Union des journalistes centrafricains (UJCA), a été directement menacé par téléphone par M. Célestin Dogo, après avoir notamment publié un article dénonçant le comportement des militaires, à la suite des troubles sus-mentionnés.

Enfin, selon les informations reçues, M. Emile Ndjapou, magistrat et président de la section du Contentieux du Conseil d’Etat, a été menacé après avoir participé, le 10 janvier 2006, à une réunion organisée par l’ECOSEFAD, une association notamment impliquée dans la promotion des libertés fondamentales, lors de laquelle il est intervenu sur la situation des droits de l’Homme et le processus de paix en République centrafricaine et a, à cet égard, critiqué l’attitude de l’armée. Le soir-même, un véhicule militaire a fait irruption à son domicile. Face au refus de son fils d’ouvrir la porte en l’absence de ses parents, les occupants ont menacé de forcer le portail. Le fils de M. Njapou a réussi à éloigner les agresseurs en éteignant les lumière et en lançant les chiens de garde du domicile.

L’Observatoire exprime sa vive inquiétude au regard de ces menaces et intimidations portées à l’encontre des défenseurs mentionnés ci-dessus, qui semblent s’inscrire en lien direct avec leurs critiques concernant l’attitude de l’armée, défavorable à l’établissement de la paix en République centrafricaine.

Ces faits s’inscrivent en flagrante violation des dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, notamment de ses articles 5.b et 5.c selon lesquels « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres », de « publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales » et « d’étudier, discuter, apprécier et évaluer le respect, tant en droit qu’en pratique, de tous les droits de l’Homme et de toutes les libertés fondamentales et, par ces moyens et autres moyens appropriés, d’appeler l’attention du public sur la question ».


Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités de la République centrafricaine et leur demander de :

i. garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de MM. Nganatouwa Goungaye Wanfiyo, Nicolas Tiangaye, Emile Ndjapou, Adolphe Ngouyombo et Maka Gbossokotto et, plus généralement de tous les défenseurs de droits de l’Homme en République centrafricaine ;

ii. mener une enquête indépendante sur les menaces décrites ci-dessus, afin que leurs auteurs soient identifiés et dûment jugés et sanctionnés conformément à la loi de la République centrafricaine et aux dispositions internationales en matière de protection des droits de l’Homme ;

iii. veiller à ce qu’ils puissent exercer leurs activités en faveur des droits de l’Homme librement et sans entraves ;

iv. se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, en particulier à l’article 1, qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international », et des articles 5.b et 5.c sus-mentionnés ;

v. plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la République Centrafricaine.

Adresses :

 M. Francois Bozize, Président de la République. Fax : + 236 05 56 20

 M.Elie Doté, Premier Ministre. Fax : + 236 61 42 71

 M. Michel Sallé, Ministre de l’Intérieur chargé de l’Administration du territoire. Fax : + 236 61 26 27

 M. Paul Otto, Ministre de la Justice, des droits de l’Homme et de la bonne gouvernance. Fax : + 236 61 15 79

***

Paris - Genève, le 20 janvier 2006

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
Email : Appeals@fidh-omct.org
Tel et fax FIDH : 33 (0) 1 43 55 20 11 / 01 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 4122 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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