RDC : Intervention orale lors de la 40ème session du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies

13/05/2019
Déclaration
RDC

Monsieur le Président,

La FIDH, la Ligue des Électeurs, l’ASADHO et le Groupe Lotus saluent les actes posés et les engagements forts pris par le Président Félix Tshisekedi en matière de protection des droits humains, en ce qu’ils marquent une volonté de rompre avec les violations d’État perpétrées dans le passé. En effet, la grâce présidentielle accordée à 700 prisonniers politiques ainsi que la signature de plusieurs décrets suspendant ou remplaçant certains acteurs étatiques suspectés de malversations ou de violations des droits humains sont des avancées importantes.

Néanmoins, pour relever les immenses défis et conduire le pays vers de réels progrès, nous soulignons qu’il est essentiel qu’un ensemble de mesures soit mis en œuvre en faveur de l’établissement d’un État plus respectueux des droits humains. C’est pourquoi nous appelons le Conseil à accompagner les autorités congolaises, dès la formation du nouveau gouvernement, dans l’adoption d’une feuille de route ou d’un plan d’action national en faveur des droits humains afin d’engager les réformes nécessaires à l’instauration de l’État de droit et d’institutions garantes des libertés publiques et individuelles. Cette feuille de route devrait notamment porter sur (1) la lutte contre l’impunité, la promotion de la vérité et le renforcement de la justice afin de garantir une réconciliation nationale et une paix durable ; (2) le respect des droits fondamentaux et la promotion du dialogue politique ; (3) la construction une société égalitaire en promouvant les droits des femmes et l’égalité de genre ; (4) la conduite de réformes substantielles pour construire l’État de droit et la démocratie ; (5) le renforcement de la coopération avec la communauté internationale et les mécanismes de protection des droits humains.

Monsieur le Président,

Malgré certains progrès, nos organisations continuent en effet de déplorer l’impunité quasi totale qui perdure au sein de l’État, gangrenant les institutions jusqu’aux plus hauts niveaux étatiques. Des milliers crimes demeurent impunis et les victimes en attente de soutien, de justice et de réparations. La mise en œuvre de réformes institutionnelles et d’un processus de justice transitionnelle impliquant la population dans son ensemble est urgente et cruciale. Le Conseil devrait œuvrer pour qu’un mécanisme de vérité, d’apaisement et de réconciliation puisse être mis en place en RDC.

Nous demeurons aussi vivement préoccupé.es par la situation dans le territoire de Yumbi, dans la province du Maï-Ndombe, à la suite des violences des 16 et 18 décembre 2018 qui ont fait au moins 535 morts en l’espace de trois jours d’après le BCNUDH. Une procédure judiciaire est actuellement en cours devant la juridiction militaire, et de sérieux doutes existent quant à sa crédibilité. Nos organisations exhortent le Conseil à accompagner les autorités congolaises pour que toute la lumière soit faite sur ces événements et que les plus hauts responsables soient punis ; pour que justice et réparations soient rendues aux victimes qui se trouvent dans une situation précaire ; et pour que des garanties effectives soient mises en place pour la non-répétition de ces crimes. Nous souhaitons également alerter le Conseil sur le risque réel d’une nouvelle escalade liée aux élections législatives, prévues ce 31 mars 2019 à Yumbi, Beni, Butembo.

La situation dans les Kasaï demeure également instable. Les crimes contre l’humanité commis notamment dans le territoire de Kamonia (Kasaï), attribués principalement aux éléments de l’armée et de la police congolaises et leurs supplétifs de la milice Bana Mura demeurent impunis et les victimes en attente de soutien et de justice. La situation dans les Kivu et l’Ituri est également extrêmement volatile. Le Conseil doit renforcer son action en faveur de la prévention et de la gestion des violences en RDC, y compris en contribuant à soutenir la lutte contre l’impunité des graves violations perpétrées dans toutes ces régions.

A nouveau, nous réitérons notre appel à la création d’un mécanisme du Conseil dédié à la surveillance et production de rapports sur la situation des droits humains en RDC couvrant l’ensemble du pays, dans le but de prévenir de nouvelles violations et de garantir que les responsabilités pour ces actes puissent être établies, y compris au plus haut niveau de l’État.

Nous vous remercions.

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