Menaces graves à l’encontre du président et du secrétaire général de Journalistes en danger - COD 001 / 0907 / OBS 114

14/09/2007
Appel urgent
RDC

L’Observatoire a été informé de sources fiables de nouvelles menaces de mort à l’encontre de MM. Donat Mbaya Tshimanga et Tshivis Tshivuadi, respectivement président et secrétaire général de Journalistes en danger (JED).

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en République démocratique du Congo (RDC).

Description des faits :

Selon les informations reçues, fin juin 2007, suite à la dénonciation par JED du meurtre, le 13 juin 2007, de M. Serge Maheshe, journaliste à la radio onusienne Okapi à Bukavu (province du Sud-Kivu), M. Tshivis Tshivuadi a reçu un appel téléphonique, dont l’auteur a déclaré "bien connaître sa femme et ses enfants", et l’a mis en garde contre la possibilité de voir "une roquette tomber sur [sa] maison".

La veille, JED avait révélé que M. Maheshe avait reçu des menaces de mort un mois plus tôt de la part d’éléments de la garde républicaine (garde présidentielle). Face à la précipitation de la justice militaire qui avait ouvert un procès public moins de 24 heures après l’assassinat, mettant en cause une dizaine de personnes dont des femmes et des enfants et deux militaires, JED avait également dénoncé "une tentative de brouiller les pistes" et "de protéger les véritables assassins". En outre, le 3 mai 2007, à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse, M. Tshivuadi avait dénoncé des détentions arbitraires et des actes de torture à l’encontre de journalistes.

De même, le 6 juillet 2007, M. Tshivis Tshivuadi et M. Donat Mbaya Tshimanga auraient été prévenus par une source fiable que les activités de JED dans l’affaire Maheshe provoquaient le mécontentement de certaines personnes au sein du pouvoir. Cette source leur aurait conseillé de "faire profil bas" et de "quitter momentanément le pays".

Le 31 juillet 2007, à la suite d’une conférence de presse donnée par M. M’Baya à Kinshasa afin de dénoncer des modifications de deux projets de lois restreignant la liberté de la presse, le ministre de la Presse et de l’Information, M. Toussaint Tshilombo Send, a donné une interview à la chaîne privée Antenne A, qualifiant JED "d’organisation anti-patriotique qu’il faut anéantir à tout prix" et "chargée par les ennemis du pays de salir l’image du pays à l’étranger pour des raisons bien connues".

A la suite de ces menaces, MM. Donat Mbaya Tshimanga et Tshivis Tshivuadi, qui étaient cités nommément par M. Tshilombo Send, ont quitté temporairement le pays.

A la suite de leur retour en RDC, JED a reçu, le 20 août 2007, un fax anonyme ordonnant "pour la première et dernière fois" à MM. Donat Mbaya Tshimanga et Tshivis Tshivuadi de ne plus "plonger [leur] doigt dans le dossier" du journaliste Franck Ngyke, assassiné en 2006 (cf. Rappel des faits). Le message les avertissait également que "Votre temps viendra et nous saurons quoi faire de vous deux".

Rappel des faits

En février 2006, MM. Donat Mbaya Tshimanga et Tshivis Tshivuadi avaient déjà reçu plusieurs appels anonymes, dont les auteurs les avaient menacés et accusés de "travailler pour l’opposition", de "jouer avec l’honneur des gens" et de faire des "affirmations sans preuves".

Ces menaces avaient fait suite à la parution, le 7 février 2006, dans le journal Le Soft, d’un article sur les enquêtes menées par JED sur l’assassinat de M. Franck Ngyke Kangundu, journaliste, et de son épouse Mme Hélène Mpaka, dans la nuit du 2 au 3 novembre 2005. Les résultats de cette enquête faisaient état de la responsabilité présumée de plusieurs personnes proches du pouvoir ou de hauts fonctionnaires. M. Liyolo Limbe Pwanga, l’une des personnes citées dans les conclusions de l’enquête de JED, aurait alors proféré des menaces contre MM. Mbaya Tshimanga et Tshivuadi, affirmant que ceux-ci étaient désormais ses "ennemis à vie" et "qu’il n’allait pas se laisser faire".

En outre, le 10 février 2006, des témoins s’étaient rendus au siège de JED pour avertir les membres de l’organisation qu’un groupe de policiers surveillait régulièrement leurs bureaux, plusieurs heures par jour. Du fait de ces accusations et menaces, MM. Mbaya Tshimanga et Tshivuadi avient dû entrer en clandestinité pendant près d’un mois pour garantir leur sécurité.

Le 16 février 2006, à la suite de la parution officielle du rapport de JED sur le double assassinat de M. Ngyke et de Mme Mpaka, un officier de police s’était présenté au siège de JED à Kinshasa et avait demandé à voir M. Mbaya Tshimanga. Celui-ci étant absent, le policier avait laissé à son intention une "invitation" à se rendre au siège de la Direction des renseignements généraux et services spéciaux (DRGS) pour "renseignements", signée par l’inspecteur adjoint, chef du Département des opérations, M. Elias Tshibangu. M. Mbaya Tshimanga, alors en clandestinité, ne s’y était pas rendu.

Ce n’est que le 9 mars 2006 que les deux dirigeants de JED avaient pu reprendre normalement leurs activités, après avoir rencontré le président de la République, M. Joseph Kabila.

Actions demandées :

Merci de bien vouloir écrire aux autorités congolaises en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Tshivis Tshivuadi et de M. Donat Mbaya Tshimanga, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en République démocratique du Congo ;

ii. Mener une enquête indépendante sur les faits décrits ci-dessus, afin que leurs auteurs soient identifiés et dûment jugés et sanctionnés conformément à la loi en vigueur ;

iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de tous les défenseurs des droits de l’Homme en République démocratique du Congo, afin qu’ils puissent exercer leur profession et mener leur activité de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à ses articles 1 et 6.b mentionnés ci-dessus, ainsi qu’à son article 12.2, qui dispose que "l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration" ;

v. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la République démocratique du Congo.

Adresses

· Le Président de la République, S.E. Joseph Kabila, Présidence de la République, Kinshasa-Ngaliema, République Démocratique du Congo, E-mail : upp@ic.cd

· La Ministre des Droits Humains, Mme Marie-Madeleine Kalala, Cabinet du Ministre, Boulevard du 30 juin, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax : 00 243 12 20 664, Email : min_droitshumains@yahoo.fr ou mindroits_humains@yahoo.fr

· Observatoire National des Droits de l’Homme (ONDH), Cabinet du Président, avenue Sendwe, Kinshasa/Kalamu, République Démocratique du Congo, Tél : +243 98313740 / + 243 98271199 / + 243 98407633, Email : info@ondh-rdc.org

· Ambassadeur, Antoine Mindua Kesia-Mbe, Mission permanente de la République démocratique du Congo, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, e-mail : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +4122 740.16.82

· Ambassade de la République Démocratique du Congo à Bruxelles, Avenue Foestraets, 6, 1180 Bruxelles. Tel : + 32 2 375 47 96, Fax : + 32 2 372 23 48

Prière d’écrire aux représentations diplomatiques de la République Démocratique du Congo dans vos pays respectifs.

***

Genève - Paris, le 14 septembre 2007

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :

E-mail : Appeals@fidh-omct.org

Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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