EST DE LA RDCONGO : difficile extinction des foyers rebelles (LRA et FDLR) en dépit de la présence des troupes rwandaises et ougandaises

30/01/2009
Communiqué
RDC

Le territoire de Bondo n’est pas non plus épargné. Les rebelles de la LRA
font la loi à Mbomu (à plus ou moins 50 Kms au Nord de Baye vers la frontière
avec la République Centrafricaine). Cette cohorte de malheurs s’étend également
à Magbangu (plus ou moins 120 Kms de Baye vers Bili) où la phonie n’émet plus
depuis le 11 janvier 2009. A Kubangu, une localité située à plus ou moins 70
Kms de Baye, un groupe de personnes non autrement identifiées, armées d’armes
blanches (machettes) se livre à cœur joie aux massacres des populations civiles
et aux incendies des cases. Leurs tactiques et procédés dans la commission de
ces actes criminels s’apparentent à ceux des rebelles de la LRA.

Dans le territoire de Bambesa, particulièrement à Dingila, l’arrivée des
personnes suspectes armées était enregistrée à partir du 15 janvier 2009, aux
abords de l’aérodrome de Dingila à 2 Kms du centre de la cité. Un jeune homme,
non autrement identifié, l’a échappé bel, après être capturé, le 16 janvier
2009, grâce à la vigilance des habitants des environs. Ceux-ci, munis des
fusils de chasse, se mirent à tirer dans toutes les directions et obtinrent sa
libération. A entendre le rescapé, ces ravisseurs voulaient obtenir de lui les
informations sur les positions des militaires et des éléments de la police,
ainsi que la localisation du couvent des prêtres, des habitations des pasteurs
d’autres églises.

Alors que le cri de détresse de la population retentit de plus belle, des
militaires rwandais évalués à des milliers (faute de chiffres officiels), se
déploient depuis le 20 janvier 2009 à la faveur d’un accord bilatéral engageant
les hautes sphères de décision (RDC - Rwanda) en vue d’une opération militaire
conjointe Forces Armée de la RDCongo – Rwanda Defence Forces destinée à
neutraliser les rebelles de FDLR.

Cette présence rwandaise est confirmée par le gouvernement de Kigali, selon
l’Agence France Presse. Le Ministère rwandais des affaires étrangères l’avait
reconnu, même si la Ministre Rosemary Museminali avait cependant refusé de
révéler le nombre exacte de soldats rwandais engagés en RDCongo, ainsi que la
durée de l’opération.

Du côté de la RDCongo, ni le Parlement congolais, institution composée de
représentants du peuple, encore moins la Monuc, pourtant dotée d’un mandat
spécial de protection des populations civiles, n’ont pas été informés ni de la
planification, ni de l’exécution de ladite opération.

Il y a des raisons de craindre que la présence accrue des troupes dans cette
partie de la RDCongo n’entraîne une nouvelle crise humanitaire du fait des
risques évidents de nouveaux déplacements massifs des populations civiles des
zones concernées par ladite opération. Il en va de même pour les agents
humanitaires dont les opérations risquent d’être perturbées alors qu’elles
bénéficient à près d’un million de civils. Les restrictions d’accès aux
personnes déplacés ont déjà été recensés comme le 20 janvier 2009 lorsque les
militaires congolais avaient bloqué un convoi humanitaire à destination de la
localité de Kibumba dans les environs de Goma.

Au regard des faiblesses observées lors des opérations menées contre les
rebelles de la LRA dans la Province Orientale, en l’absence d’un accord cadre
clair déterminant les termes de référence, des limites spatio-temporelles, des
rôles respectifs des intervenants, de l’absence de chronogramme du retrait des
troupes étrangères du sol congolais, l’incertitude demeure. Les incertitudes
demeurent également quant aux résultats escomptés, à savoir neutraliser les
rebelles FDLR. Alors que pendant toute la période de présence des troupes
rwandaises en RDC tant à Goma, qu’à Kinshasa, Kisangani et Mbandaka, les
réfugiés hutus rwandais et par devers eux les rebelles FDLR avaient été
recherchés et pourchassés, et s’était accompagnée de violations des droits de
l’Homme, l’on peut légitimement s’inquiéter des conséquences et de surcroît de
l’opportunité et de l’efficacité de la duplication de cette démarche.

Le juge Atsu Koffi Amega, à la tête d’une commission onusienne chargée des
enquêtes sur les massacres qui auraient été perpétrés contre les réfugiés hutus
rwandais en RDCongo s’est vu empêché en 2000, de s’acquitter de sa tâche et
établir les responsabilités. Le risque est grand de voir l’histoire se répéter
en l’absence de garanties de distinction entre les combattants et les non
combattants lors de ces opérations conjointes.

Aussi, au cours de la réunion interministérielle régionale de la conférence
internationale sur la Région des Grands Lacs, tenue à Brazzaville en mai 2008,
le Ministre des Affaires Etrangères de l’époque, Monsieur Antipas MBUSA N.,
avait annoncé l’organisation par le gouvernement congolais d’une rencontre à
Kisangani autour de la question des groupes armés rwandais agissant en
RDCongo.

Ces propos avaient été bien accueillis, soutenus même par les onze pays
réunis lors de la Conférence internationale sur la Région des Grands Lacs, eux
qui ne cessaient d’encourager la RDCongo à mettre en œuvre le communiqué
conjoint de Nairobi signé en Novembre 2007, concernant l’application du
programme Désarmement, Démobilisation et Réinsertion et ce afin de renvoyer les
groupes armés rwandais dans leur pays.

Dans ce cadre et dans ce contexte précis, la Ville de Kisangani devait
accueillir, en date du 26 Mai 2008, une rencontre entre le gouvernement
congolais, les représentants des groupes armés rwandais actifs en RDCongo et
des partenaires impliqués dans le processus de retour au Rwanda de ces groupes
armés.

En réaction à cette rencontre, les rebelles FDLR avaient réaffirmé leur
attachement au processus de Rome. Ils se disaient prêts à déposer les armes et
souhaitaient non le retour au Rwanda, mais plutôt bénéficier d’une
relocalisation dans une autre Province congolaise ne partageant de frontières
avec le Rwanda.

Même si les Etats-Unis avaient également abondé dans le même sens, en
faisant mention de réinstallation de ces groupes armés dans des centres de
regroupement en RDCongo, les rumeurs de la relocalisation des groupes armés
rwandais dans la Province Orientale avaient fait l’objet des réflexions
profondes dans différents cercles.

Au regard de ce qui précède, il y a lieu de poser trois
hypothèses :

1 - Soit, la nouvelle donne géopolitique confirme, comme il semble en être
le cas, la volonté des gouvernements congolais et rwandais ainsi que du Congrès
National pour la Défense du Peuple (CNDP) de faire taire leurs divergences et
d’en finir avec les Hutus du FDLR ou tout au moins à réduire sensiblement leur
capacité d’organisation et d’attaque non seulement contre le régime de Kigali
mais aussi contre les populations civiles congolaises.

Ceci met en lumière deux aspects spécifiques : le premier concerne les
répercussions de ces opérations sur le gouvernement de Kinshasa alors que
celui-ci est régulièrement accusé d’entretenir des liens et d’armer
régulièrement ces groupes armées hostiles au Rwanda ; le second porte sur
la stratégie à court et moyen termes de ces alliances et des conséquences sur
la situation des droits de l’Homme dans l’Est du pays notamment quant à la
sécurité des populations civiles, l’arrestation et le jugement des auteurs
présumés de crimes de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de
guerre perpétrés tant au Rwanda (pour le génocide notamment) qu’en RDC (pour
les autres crimes internationaux).

2- La seconde hypothèses consisterait à considérer que les belligérants
oeuvrent en faveur ou contre un retour forcé au Rwanda des présumés
génocidaires afin que ceux-ci répondent de leurs actes.

Cette approche, fort moins plausible que la première, pose certaines
questions notamment théoriques sur le statut de ces combattants opérant en
territoire étranger, leur (improbable ?) jugement, selon quelles normes
nationales ou internationales ? Enfin, ce précédant poserait aussi de
nombreuses questions dans une région troublée et soumise aux incursions
étrangères.

3- La troisième hypothèse, serait que le Rwanda veuille garantir ses
frontières en éloignant de celles-ci toute menace de déstabilisation ou
d’incursion en repoussant les rebelles FDLR dans des zones plus reculées et
contrôlables. Une version de cette hypothèse serait que cette relocalisation
des groupes armés se fasse de façon négociée si l’offensive armée en cours
n’arrive pas à éradiquer totalement le FDLR. Auquel cas, les zones de
relocalisation pourraient leur être préalablement indiqués, probablement dans
la cuvette centrale. Cette troisième hypothèse n’est pas improbable, mais
paraît ne pouvoir se dessiner que comme voie de recours en cas d’échec des deux
premières et avec des aménagements.

Il n’en demeure pas moins que la question des réfugiés hutus et des groupes
armés rwandais en RDCongo demeure une question centrale (en plus de celle de
l’exploitation illégales des ressources et de la prédation des populations) et
durable des conflits à l’Est du RDCongo. Par ailleurs, l’implication de la
communauté internationale est fondamentale afin de garantir le respect de la
lutte contre l’impunité de tous les acteurs et des belligérants dont les luttes
ont ensanglantées les provinces orientales du RDCongo et durablement
traumatisées les populations civiles.

Lire la suite