COD 007 / 0709 / OBS 110.5 Libération provisoire / Harcèlement judiciaire

26/08/2009
Appel urgent
RDC

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en République démocratique du Congo (RDC).

Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé de sources fiables de la libération provisoire de M. Golden Misabiko, président de la section katangaise de l’Association africaine pour la défense des droits de l’Homme (ASADHO).

Selon les informations reçues, le 20 août 2009, le Tribunal de paix de Lubumbashi/Kamalondo a ordonné la libération de M. Golden Misabiko sous caution, suite à la demande de mise en liberté provisoire introduite le 19 août par ses avocats, invoquant l’état de santé précaire de M. Misabiko et contre l’avis du Parquet. Le jour même, M. Misabiko a été libéré après paiement d’une caution de 500 dollars. En raison de son état de santé, M. Misabiko est toujours à la polyclinique privée Medicare.

Par ailleurs, la prochaine audience pour la poursuite de l’instruction du dossier au fond a été fixée au 26 août 2009.

L’Observatoire se félicite de la libération provisoire de M. Misabiko et remercie toutes les personnes, organisations et institutions qui sont intervenues en leur faveur.

M. Misabiko reste néanmoins poursuivi et, par conséquent, l’Observatoire appelle à l’abandon de toute charge et acte de harcèlement à son encontre, en ce qu’ils ne visent qu’à sanctionner ses activités de défense des droits de l’Homme.

Rappel des faits :

Le 24 juillet 2009, M. Misabiko avait été arrêté par l’ANR/Katanga, à la suite de la publication par l’ASADHO/Katanga d’un rapport sur l’exploitation artisanale de la mine uranifère de Shinkolobwe dans la province du Katanga en violation du décret présidentiel nº 04/17 du 27 janvier 2004[1].

Le 25 juillet 2009, M. Misabiko a été transféré du cachot de l’ANR vers le Parquet du TGI de Lubumbashi, qui l’a placé sous mandat d’arrêt provisoire.

Le 28 juillet 2009, M. Misabiko a été présenté devant un juge en vue de l’examen de la demande de maintien en détention formulée par le parquet. Au moment où siégeait le juge, le ministre de la Communication et des médias, M. Mende Omalanga, organisait un point de presse à Kinshasa à l’occasion duquel il stigmatisait l’action de la FIDH et de ses organisations membres en RDC et exprimait la volonté du Gouvernement de poursuivre M. Golden Misabiko en raison des propos que celui-ci aurait tenu. Le ministre accuse en effet M. Misabiko d’avoir « déclaré sans ambages que le Gouvernement congolais était impliqué dans un commerce clandestin de l’uranium de Shinkolobwe (Katanga) avec l’Iran et la Corée du Nord », propos passibles, selon lui, de poursuites pour « atteinte à la sureté de l’Etat » et de « propos diffamatoires ».

Selon les informations en possession de l’Observatoire, M. Golden Misabiko n’aurait jamais tenu publiquement de tels propos, y compris lors de l’interview accordé à la BBC le 17 juillet 2009. Par ailleurs, l’Observatoire s’inquiète des moyens disproportionnés utilisés par les autorités et la justice congolaise à l’encontre des responsables de l’ASADHO/Katanga alors que le rapport de l’organisation congolaise de défense des droits de l’Homme tendait à alerter ces mêmes autorités sur les dangers de la non application d’un décret présidentiel.

Le 29 juillet 2009, le Tribunal de paix de Lubumbashi a confirmé le placement en détention préventive de M. Golden Misabiko, pour une durée de 15 jours pour « atteinte à la sûreté de l’Etat » et « dénonciation calomnieuse ».

Le 3 août 2009 vers 17 heures, le Tribunal de grande instance (TGI) de Lumumbashi a rendu sa décision confirmant le maintien en détention de M. Golden Misabiko pour une durée de 15 jours, pour « atteinte à la sûreté de l’Etat » et « diffamation ». L’audience en appel s’était tenue le 31 juillet 2009, au cours de laquelle le magistrat du parquet avait demandé le maintien en détention de M. Misabiko, notamment pour des nécessités liées à l’instruction.

Enfin, le 4 août 2009, l’Agence nationale des renseignements (ANR) aurait transmis au parquet de Lumumbashi plusieurs « pièces à conviction », parmi lesquelles figure le rapport de l’ASADHO/Katanga sur l’exploitation d’une mine uranifère ainsi qu’une note explicative visant à appuyer les charges existant contre le prévenu. Au vu de ces nouveaux éléments, le magistrat instructeur a décidé de poursuivre l’instruction du dossier.

Le 12 août 2009, le procureur général de Lumbumbashi a décidé de poursuivre M. Misabiko pour « propagation de faux bruits de nature à alarmer les populations et exciter celles-ci à se soulever contre les pouvoirs établis » en application de l’article 199 du Code pénal congolais. La première audience a été fixée au 19 août 2009 à 9h00 devant le Tribunal de paix de Lubumbashi.

Par ailleurs, les 16 et 17 août, M. Misabiko s’est plaint de douleurs aigues au ventre, lesquelles se sont suivies de vomissements. Suite aux demandes insistantes de ses avocats, le procureur général a décidé le 17 août de transférer M. Misabiko à la polyclinique privée Medicare et a ordonné aux policiers de garde de n’autoriser aucune visite, surtout de la part de défenseurs des droits de l’Homme, sous peine d’arrestation.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités congolaises en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Golden Misabiko et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme congolais ;

ii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à son encontre, ainsi qu’à celle de tous les défenseurs des droits de l’Homme en RDC, afin qu’ils puissent exercer leur profession et mener leur activité de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui stipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation de tous les droits de l’Homme et de toutes les libertés fondamentales aux niveaux national et international” et son article 12.2 qui prévoit que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;

iv. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la RDC.

Adresses

* Le Président de la République, S.E M. Joseph Kabila, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax +243 88 02 120
* Le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, M. Alexis Thambwe Mwamba, Cabinet du Ministre, bâtiment du Ministère des Affaires Etrangères, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo
* Le Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, M. Luzolo Bambi, Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Fax : + 243 88 05 521
* Ministre des Droits Humains, M. Upio Kakura Wapol, Cabinet du Ministre, Boulevard du 30 juin, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax : + 243 12 20 664 ; + 243 9939971 ; Email : min_droitshumains@yahoo.fr
* Mission permanente de la République démocratique du Congo auprès des Nations unies, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, Email : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 22 740.16.82

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de RDC dans vos pays respectifs.

***

Paris-Genève, le 20 août 2009

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :

· E-mail : Appeals@fidh-omct.org

· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80

[1] Dans ce rapport, publié le 13 juillet 2009 et intitulé : « Mine uranifère de Shinkolobwe : de l’exploitation illicite artisanale à l’accord entre la République démocratique du Congo et le groupe nucléaire français AREVA », l’ASADHO/KATANGA dénonce la poursuite à petite échelle de l’exploitation de la mine uranifère de Shinkolobwe malgré sa fermeture officielle par décret présidentiel nº 04/17 du 27 janvier 2004 portant classement de Shinkolobwe comme zone interdite à l’activité minière.

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