Ouganda : Dominic Ongwen condamné par la CPI pour un large éventail de crimes sexuels et basés sur le genre

(La Haye - Paris - Kampala) — Aujourd’hui, après un long procès de quatre ans, la Cour Pénale Internationale (CPI) a déclaré l’ancien commandant en chef de l’Armée de Résistance du Seigneur (LRA – Lord’s Resistance Army), Dominic Ongwen, coupable de crimes internationaux commis dans le nord de l’Ouganda depuis juillet 2002. La FIDH et la FHRI se félicitent de ce verdict qui rend enfin justice aux victimes des crimes atroces commis par la LRA, notamment un large éventail de crimes sexuels et basés sur le genre.

Pour plus d’information sur l’affaire Dominic Ongwen, voir notre Q&A.

“La condamnation de Dominic Ongwen est une étape cruciale vers la recherche de responsabilisation pour les crimes commis par la LRA en Ouganda, la première situation sur laquelle la CPI a enquêté. Elle constitue un message fort pour les autres commandants de la LRA qui sont toujours actifs et responsables des crimes atroces commis dans la région, qu’ils peuvent être tenus pour responsables de leurs actes.”

Sheila Muwanga, vice-présidente de la FIDH

La Chambre de première instance de la CPI a déclaré Dominic Ongwen coupable de 61 des 70 chefs d’accusation de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre dont il était initialement accusé. Ces crimes ont été commis entre le 1er juillet 2002 et le 31 décembre 2005 dans le nord de l’Ouganda, en particulier lors d’attaques dans quatre camps de déplacés internes. Parmi les charges pour lesquelles il a été condamné figurent des chefs d’accusation liés à l’utilisation et à la conscription d’enfants soldats, aux attaques contre des civils, au meurtre, à la torture, au pillage, à la destruction de biens, à l’esclavage et à la persécution pour raison politique. Dominic Ongwen a également été condamné pour mariage forcé, viol, esclavage sexuel et grossesse forcée, pour la première fois inclus dans un verdict à la CPI. La Chambre, dans son résumé détaillé de l’arrêt rendu ce matin, a nommé les victimes individuelles de chaque crime, ce qui peut être salué comme un précédent important.

“Avec la condamnation de Bosco Ntaganda en 2019 pour viol et esclavage sexuel en tant que crimes contre l’humanité, la condamnation de M. Ongwen pour viol, esclavage sexuel, mariage forcé et grossesse forcée en tant que crimes de guerre et crimes contre l’humanité constitue un énorme progrès dans la reconnaissance de la gravité de ces crimes et un résultat important de la politique du procureur sur les crimes sexuels et basés sur le genre.”

Delphine Carlens, responsable du bureau justice internationale de la FIDH

La décision de la Chambre de première instance sur la peine de M. Ongwen suivra. Sa peine est particulièrement attendue compte tenu de son statut d’ancien enfant soldat. Cette question a été au cœur du procès et est au centre de la stratégie de son équipe de défense. En effet, les enfants soldats sont eux-mêmes des victimes, et le statut de la CPI ne prévoit pas de compétence pour les crimes commis par une personne de moins de 18 ans. Bien que M. Ongwen ait été jugé et condamné par la CPI pour des crimes internationaux qu’il a commis à l’âge adulte, son statut d’enfant soldat devrait avoir un impact sur l’établissement de sa peine.

Contexte

L’Armée de Résistance du Seigneur (LRA) est un groupe rebelle armé, dirigé par Joseph Kony, qui a vu le jours vers 1987. Il a d’abord combattu le gouvernement ougandais dans le nord de l’Ouganda, avec des incursions dans le sud du Soudan. De juillet 2002 à décembre 2005 au moins, un conflit armé ne présentant pas un caractère international entre la LRA et les forces armées du gouvernement ougandais a existé dans le nord de l’Ouganda. Les opérations militaires ougandaises ont forcé le groupe à quitter l’Ouganda en 2005 et 2006. Après cela, la LRA est progressivement devenue une menace régionale, opérant dans les zones frontalières éloignées entre le Sud du Soudan, la République démocratique du Congo et la République centrafricaine (RCA).

Le 8 juillet 2005, la Chambre Préliminaire II de la CPI a émis des mandats d’arrêt à l“encontre de Dominic Ongwen, ainsi que quatre autres hauts commandants de la LRA - Joseph Kony, Vincent Otti, Raska Lukwiya et Okot Odhiambo - pour la commission de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.

Le 6 janvier 2015, Dominic Ongwen s’est rendu aux militaires américains stationnés en RCA, luttant contre la LRA, et a ensuite été transféré au centre de détention de la CPI à La Haye où il est arrivé le 21 janvier 2015.

Le procès de M. Ongwen a commencé le 6 décembre 2016 et s’est terminé par des déclarations finales le 12 mars 2020. Plus de 4 000 victimes ont participé à la procédure et environ 130 témoins ont été entendus.

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